Les accords avec l’Union européenne et la Zone Arabe de Libre Echange sont l’objet de critiques récurrentes en Algérie. Opérateurs économiques et syndicats demandent leur révision, ou leur abrogation pure et simple.
L’Algérie n’arrive pas à trouver les leviers nécessaires pour rééquilibrer son commerce extérieur. L’organisation générale de l’économie, décriée par la plupart des acteurs économiques et les spécialistes, favorise les importations, qui ont explosé à la faveur de l’embellie financière des dernières années, et décourage la production locale et l’exportation. Le constat fait consensus au sein du monde syndical, des entreprises et des experts économiques, mais le gouvernement, malgré un discours récurrent sur la question, n’arrive pas à trouver la bonne méthode pour inverser la tendance.
Mercredi, le représentant d’une organisation patronale est monté au créneau pour dénoncer cette situation. Il a mis en cause l’accord d’association avec l’Union européenne, entré en vigueur depuis une décennie, et perçu comme un boulet par les opérateurs économiques algériens, ainsi que l’accord de libre-échange au sein de la zone arabe, qui pénalisent une production algérienne encore limitée et peu performante.
M. Abdelouahab Ziani, président de la fédération de l’Agro-alimentaire, a demandé au gouvernement de revoir les accords avec l’Union européenne, qui ont mis en place un démantèlement tarifaire progressif, à l’issue desquels les véhicules, par exemple, sont imposés autour de dix pour cent. Le résultat est là : la fameuse Renault Symbol, fabriquée depuis le 10 novembre à Oued Tlélat, près d’Oran, sera vendue plus cher que celle importée.
Gaspillages
A ces difficultés structurelles, s’ajoutent des gaspillages et de mauvais choix, selon M. Ziani, qui compare les bilans des trois principaux pays du Maghreb dans le commerce extérieur. Selon lui, pour 100 dollars importés, la Tunisie en réexporte 80, contre 50 pour le Maroc, et seulement cinq dollars pour l’Algérie. Il met en cause l’organisation de l’économie, la complexité des opérations d’exportation, mais aussi une vision erronée de la part des opérateurs eux-mêmes, qui privilégient le marché européen. « Il faut regarder ailleurs, notamment vers l’Afrique », où « les produits algériens peuvent être concurrentiels », dit-il.
Il pointe aussi les gaspillages, comme dans le transport, secteur où le pavillon algérien est presque inexistant. Alors que les rotations vers l’Algérie sont plus nombreuses, le coût de transport d’un container est de 1.000 dollars entre Marseille et Alger, contre 850 dollars entre Marseille et Tunis. Selon lui, les gaspillages liés aux importations s’élèvent à six milliards de dollars par an.
Dinar surévalué
M. Ziani en arrive naturellement à la nécessité de réguler les importations. Bien qu’il soit président d’une organisation patronale, il rejoint, sur ce point, la principale centrale syndicale du pays, l’UGTA, et le Parti des Travailleurs de Mme Louisa Hanoun. Ces deux derniers soutiennent le président Abdelaziz Bouteflika, mais rejettent les négociations menées par le gouvernement algérien pour préparer son adhésion à l’Organisation Mondiale du Commerce.
Mais les partenaires économiques évitent soigneusement d’évoquer le sujet qui fâche, la parité du dinar, facteur essentiel dans ces distorsions. Nettement surcoté à 107 dinars pour un euro contre 160 dinars pour un euro au marché noir, le dinar fait baisser artificiellement la valeur des importations, et pénalise toute opération d’exportation. « Toute mesure politique sérieuse destinée à changer le commerce extérieur de l’Algérie doit passer par là », affirme un membre du think-tank Nabni. Ces débats sont par ailleurs devenus pressants, avec la chute des prix du pétrole, au plus bas depuis 2009, en passant sous la barre des 70 dollars.