Selon Youcef Benabdallah, l’absence d’une politique de construction d’avantages comparatifs est dangereuse pour l’outil national de production, parce que cela n’incite pas les agents économiques à investir dans des activités de production.
Abordé en marge de la conférence sur le développement économique et social qui se déroule au palais des nations, au club des pins, l’économiste Youcef Benabdallah qui a donné une conférence sur les conditions de relance de l’outil national de production en liaison avec les échéances internationales, a expliqué que l’Etat doit jouer un rôle de chef d’orchestre, car disposant du pouvoir régalien et des instruments nécessaires pour le faire (taux de change, tarifs douaniers, fiscalité..).
Il a souligné que les actions à entreprendre doivent être entreprises de manière concertée et non pas isolément. Benabdellah soulève en ce sens le manque d’une vision globale justement et de l’ignorance du calcul économique et l’incompréhension du comportement des agents économiques. L’exemple qu’il a cité sur le taux des tarifs douaniers est plus que parlant. « Il y a un taux unifié pour les tarifs douaniers et cela relève de l’absence d’une politique de mondialisation, de construction d’avantages comparatifs. C’est carrément dangereux », a-t-il déclaré.
Et de démystifier le recours à l’importation en ces termes : « Les agents économiques prennent leurs décisions suivant les paramètres du marché et l’importation en Algérie est le choix de l’efficacité. Un taux de tarifs douaniers unifié dénote que les négociateurs algériens n’ont aucune préférence. Et quand vous soumettez les importateurs et les producteurs au même taux, le choix est vite fait ».
De l’insoutenabilité du budget de l’Etat à long terme
Au sujet du changement de cap du gouvernement se tournant vers le secteur marchand pour le financer la construction des infrastructures, l’économiste Youcef Benabdallah pense que le budget de l’Etat commence à montrer que ces réalisations ne peuvent être soutenables sur le long terme. Pour lui, si le gouvernement peut encore se baser sur le Fond de régulation des recettes (FRR) pour concevoir des programmes à court et moyen terme, il anticipe ainsi sur l’avenir, vu l’explosion de la demande sociale et l’incertitude sur les prix du baril du pétrole.
Quant aux capacités du secteur national marchand à financer des infrastructures, à l’image de l’entreprise qui gère l’aéroport d’Alger qui a lancé la construction d’une nouvelle aérogare, l’entreprise qui gère le port d’Alger pour construire un nouveau grand port en mer profonde entre Ténès et Cherchell ou encore le groupe Cevital qui a dans ses tiroirs un projet de construction d’un port à Cap Djinet, Benabdallah s’est dit sceptique.
En tout cas, a-t-il conclu, si l’option pour la formule dite BOT (Build, Operate, Transfer) a été remise au second plan pendant des années à cause de l’embellie financière et du nationalisme qui fait que nous ne donnons pas des concessions de ce type à des privés, « en la matière, nous ne pouvons éviter les capitaux étrangers ».