Me Noureddine Benissaâd a écarté l’éventualité d’interpeller le Chef du gouvernement tunisien, en visite à Alger, sur le cas du jeune Tunisien arrêté, avec son ami algérien, le 16 avril 2014, à la place Audin, où se déroulait une manifestation hostile à la candidature d’Abdelaziz Bouteflika à un 4e mandat. La justice algérienne doit statuer demain sur les accusations d’« attroupement illégal » et d’ « atteinte à l’ordre public » portées contre les deux jeunes hommes.
La Chambre d’accusation près le Tribunal Abane Ramdane (Alger) examinera demain dimanche le cas du jeune Mohamed Kadi (dit Mohand), militant de l’association RAJ, et de son ami tunisien Moez Benncir, arrêtés tous lors d’une manifestation du mouvement « Barakat ! », le 16 avril dernier, alors qu’ils étaient attablés à une terrasse de café place Audin au centre d’Alger. « Sur la base des éléments du dossier, je suis très confiant quant à la relaxe de mes mandants », a déclaré à Maghreb Emergent leur avocat, Me Noureddine Benissaâd.
Me Benissaâd, qui estime la détention provisoire de Mohamed Kadi et de Moez Benncir, est « injustifiée », rappelle que le jeune Tunisien est en situation régulière en Algérie. Il a écarté l’hypothèse de saisir de son cas le Premier ministre tunisien, Mehdi Jomaa, en visite officielle de deux jours à Alger à partir d’aujourd’hui. « Pour le moment, nous nous concentrons sur l’audience de demain », s’est-il contenté de dire. Interrogé sur les conditions de détention des deux jeunes hommes à la prison Serkadji (Alger), il a indiqué qu’il avait prévu de les voir jeudi dernier mais qu’il n’a pu le faire car ce jour-là a coïncidé avec la Fête du travail.
L’association RAJ reste mobilisée
Abdelwahab Fersaoui, président de l’association Rassemblement Action Jeunesse (RAJ), à laquelle appartient Mohand Kadi, partage l’optimisme de Me Benissaâd. Il espère lui aussi voir les deux détenus relaxés mais affirme que le collectif constitué pour leur libération restera mobilisé. Pour lui, l’accusation d’ « attroupement » et d’ « atteinte à l’ordre public » ne tient tout simplement pas la route ».
Selon Abdelwahab Fersaoui, le nombre de signataires de la pétition la libération de Mohamed Kadi et Moez Benncir se chiffrent à 1.300. Interrogé sur les attentes qu’aurait le collectif de la visite du Premier ministre tunisien à Alger, il a écarté lui aussi l’éventualité de saisir ce dernier du cas du ressortissant tunisien détenu à Alger.
Selon son employeur Moez Benncir a été arrêté sur une terrasse de café
Julien Pescheur,le gérant des Editions franco-berbères (Sefraber, présentes en France et en Algérie), prend la défense de son employé Moez Benncir, dont il dit qu’il travaillait pour son entreprise à Bejaïa depuis 12 mois et qu’il était déclaré aux assurances sociales tout comme au bureau de main-d’œuvre de cette ville. Il juge inadmissible que des écrits de presse insinuent que le jeune Tunisien était un « clandestin » se trouvant sur le territoire algérien de façon irrégulière.
Julien Pescheur apporte des précisions quant à ce qui s’est passé, selon lui, le jour de l’arrestation de Moez Benncir : « Il avait été convoqué au Centre des visas, à Ben Aknoun. A 14 heures , lorsque je l’ai appelé , il m’a répondu qu’il sortait du Centre des visas et qu’il s’apprêtait à rentrer à Bejaia ». L’éditeur ajoute : « Il appartient à la justice algérienne de statuer sur son cas en fonction des lois algériennes et des accords internationaux. Je lui fais confiance pour ne pas oublier qu’il est incarcéré pour avoir pris un café place Audin. Son incarcération cause un grave préjudice à Sefraber. Nous étions en pleine diffusion de 6 nouveaux titres qui, évidemment, seront tous retardés. ».
Human Rights Watch appelle à la libération de Moez et Mohamed
Dans un communiqué publié vendredi 2 mai 2014, Human Rights Watch (HRW) a exhorté les autorités algériennes à remettre immédiatement en liberté les deux jeunes hommes et à abandonner toute poursuite contre eux.
Selon HRW, Mohamed Kadi et son ami tunisien ont été arrêtés devant la Faculté centrale d’Alger lors d’une manifestation organisée par le mouvement Barakat !( Ça suffit »), qui s’opposait à la candidature du président Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat. « Les autorités algériennes se servent régulièrement de lois répressives pour poursuivre en justice des personnes qui n’ont fait qu’exprimer pacifiquement une opinion dissidente », a déclaré Eric Goldstein, directeur-adjoint de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord à HRW.
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