Le ministre de l’Energie, Salah Khebri, mise sur une augmentation lente mais continue de la production d’hydrocarbures qui pourrait ainsi atteindre, autour de 2020, son niveau de 2007. La question se pose si cela est possible sans forcer la production des gisements en exploitation au risque d’y provoquer des dégâts irréversibles.
Bien qu’il révise les ambitions de son secteur à la baisse, Salah Khebri rejette l’idée selon laquelle l’Algérie a atteint son peak oil en 2007. En relançant l’investissement, l’exploration et en améliorant le taux de récupération des grands gisements de Hassi Messaoud et de Hassi R’mel, le ministre de l’Energie espère que la production d’hydrocarbures revienne, à l’horizon 2020, à son niveau de 2007.
M. Khebri est encouragé, dans ses prévisions, par les résultats obtenus après le creux de 2012. Cette année-là, la production avait chuté à 187 millions de tonnes équivalent pétrole (TEP), après le pic de 2007, à 233 millions de TEP. En cinq ans, la baisse avait atteint 20%, poussant certains analystes à parler de déclin définitif. Mais à partir de 2013, la production s’est légèrement redressée pour se stabiliser en 2014, selon le ministère de l’Energie, qui compte sur une nouvelle amélioration en 2015.
Pour l’année en cours, le ministère de l’Energie table sur une production de 195 millions de TEP, ce qui représenterait 16,5% de moins que le pic de 2007 mais serait une amélioration de 4% par rapport au niveau très bas de 2012. Avec un tel résultat, il espère améliorer les exportations de 4,1% durant l’année en cours, ce qui serait, de toutes les façons, très insuffisant pour compenser la baisse des prix.
Facteurs convergents
Les prévisions de M. Khebri sont plus dures à tenir sur le moyen terme. Selon un rapport qu’il avait présenté au conseil des ministres, il table sur une production de 224 millions de TEP en 2019, soit 96% du niveau de production record de 2007. Son prédécesseur, Youcef Yousfi, prévoyait de revenir au niveau de 2007 dès 2018.
M. Khebri prévoit l’amélioration du taux de récupération des gisements de Hassi Messaoud et de Hassi R’mel et « l’accélération de la mise en exploitation des gisements en cours de développement à Ahnet-Tidikelt, Tinhert, Timimoun et Reggane ». Il cite aussi, mais au conditionnel, « la poursuite de l’effort » de forage », aussi bien pour « l’appréciation des découvertes réalisées » que pour « la prospection dans les zones peu explorées ». La convergence de tous ces facteurs devrait assurer une progression lente mais continue de la production.
Scepticisme
Des spécialistes consultés par Maghreb Emergent émettent, toutefois, de sérieuses réserves quant à la possibilité de concrétiser les projets de M. Khebri. La plupart d’entre eux se hérissent particulièrement quand on évoque l’augmentation de la production des gisements de Hassi Messaoud et Hassi R’mel, après la malheureuse expérience de l’ère Chakib Khelil. Celui-ci, affichant des projets grandioses en vue d’arriver notamment à exporter 80 milliards de mètres cubes de gaz par an, avait forcé la production du gisement de Hassi R’mel, ce qui avait fini par y provoquer des dégâts peut-être irréversibles.
Le secteur de l’énergie n’a pas gagné en transparence depuis. Rien ne dit que face à des besoins financiers pressants, le gouvernement ne sera pas tenté de produire à tout prix pour colmater des brèches, quitte à provoquer de nouveaux dégâts dans les gisements. M. Khebri est dans une position d’autant plus délicate qu’il n’est plus possible de prendre des décisions aussi importantes dans l’opacité, comme l’a montré l’expérience de son prédécesseur, Youcef Yousfi. Celui-ci avait été balayé par une vague de protestations contre l’exploration du gaz de schiste, alors que sa probité n’avait jamais été mise en cause.