Le ministre français des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a jeté un pavé dans la mare lors de son intervention dominicale sur RTL. “Nous observons des postures, des décisions qui sèment le doute sur les véritables intentions algériennes”, a-t-il déclaré, critiquant ouvertement le refus d’Alger de respecter les engagements bilatéraux établis en 2022.
La crise couve depuis l’été dernier. Le 30 juillet 2024, l’Algérie rappelle brutalement son ambassadeur à Paris, furieuse du soutien français au plan d’autonomie marocain sur le Sahara occidental. Un geste diplomatique fort, qui marque le début d’une série d’incidents. En décembre, la tension monte encore d’un cran. Le ministère algérien convoque l’ambassadeur français Stéphane Romatet et accuse directement la DGSE de mener des opérations de déstabilisation sur son territoire. “Des allégations totalement infondées et fantaisistes”, rétorque sèchement Barrot, qui dénonce une manœuvre politique.
Dans ce climat déjà électrique, un nouvel élément vient exacerber les tensions, à savoir l’arrestation de Boualem Sansal. L’écrivain franco-algérien croupit en prison depuis mi-novembre 2024 pour “atteinte à la sûreté de l’État”. Sa demande de libération, rejetée sans ménagement, provoque l’indignation de Paris. Le président Tebboune lui-même entre dans la danse, qualifiant publiquement l’auteur “d’imposteur” manipulé par la France, une accusation qui fait bondir la diplomatie française.
“Les raisons invoquées pour cette incarcération ne tiennent pas la route”, martèle Barrot, qui s’inquiète ouvertement de l’état de santé de l’écrivain septuagénaire. Mais Alger reste sourd aux protestations françaises. Le ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, durcit même le ton en agitant la menace de nouvelles “mesures de rétorsion”.
La situation diplomatique semble dans l’impasse. D’un côté, l’Algérie maintient ses accusations de déstabilisation et refuse tout dialogue sur l’affaire Sansal. De l’autre, la France s’insurge contre ce qu’elle considère comme une violation flagrante des droits fondamentaux. “Pour tenir la feuille de route, il faut être deux”, assène Barrot, laissant entendre que les accords de 2022 sont désormais lettre morte.
Cette crise révèle que les relations entre la France et l’Algérie demeurent fragiles. Les désaccords historiques, les tensions régionales et le dossier du Sahara occidental empêchent toujours d’établir un véritable dialogue. Sur ce point, Barrot est catégorique : “Nous souhaitons entretenir les meilleures relations avec l’Algérie, mais pas à n’importe quel prix”. Une déclaration qui ne fait qu’accentuer les tensions déjà vives entre les deux pays.
Yasser Kassama