Qu’était elle devenue cette indépendance attendue pendant 132 ans ? Qu’avons-nous fait pour être fidèles à nos martyrs ?
« Il aura à apprendre, je sais, que les hommes ne sont pas tous justes, ne sont pas tous sincères. Mais enseignez-lui aussi que pour chaque canaille il y a un héros; que pour chaque politicien égoïste, il y a un dirigeant dévoué… Qu’il apprenne de bonne heure que les tyrans sont les plus faciles à flatter… Enseignez-lui, si vous pouvez, les merveilles des livres… Mais laissez-lui un peu de temps libre pour considérer le mystère éternel des oiseaux dans le ciel, des abeilles au soleil, et des fleurs au flanc d’un coteau vert. À l’école, enseignez-lui qu’il est bien plus honorable d’échouer que de tricher… Apprenez-lui à écouter tous les hommes mais apprenez-lui aussi à filtrer tout ce qu’il entend à travers l’écran de la vérité, et à n’ en retenir que ce qui est bon Apprenez-lui toujours à avoir une immense confiance en lui même, parce que dès lors, il aura une immense confiance envers l’Humanité. C’est une grande exigence, mais voyez ce que vous pouvez faire… Il est un si bon garçon, mon fils ! »
Lettre d’Abraham Lincoln au précepteur de son fils
Cette merveilleuse recommandation d’Abraham Lincoln est là pour nous indiquer ce que devrait être l’éducation qui permet l’enthousiasme. Je veux marquer le 55e anniversaire de l’indépendance de l’Algérie en parlant de l’Education.
L’aura de l’indépendance et ce qu’elle est devenue
Souvenons nous à l’indépendance, nous étions tout feu tout flamme. La lune était à portée de mains. Nous avions l’ambition de soulever des montagnes Nous étions libres ! La révolution de novembre était un phare qui guidait les pays qui luttaient pour leur indépendance. Il n’était pas rare de croiser les révolutionnaires algériens dans les rues d’Alger ; Nelson Mandela ; à Samora Machell, Les Blacks Panthers et même l’icône Che Guevara montraient au monde par leur présence que l’Algérie « Mecque des révolutionnaires » était véritablement le maitre étalon de la Révolution des peuples opprimés .
Qu’était elle devenue cette indépendance attendue pendant 132 ans ? Qu’avons-nous fait pour être fidèles à nos martyrs ? Cette indépendance s’est faite grâce au sacrifice de tout un peuple et notamment de ceux qui donnèrent leur vie et à qui on ne rend pas un hommage particulier, leur sacerdoce étant squatté par une évanescente famille révolutionnaire qui dicte la norme en squattant les idéaux de novembre pour en faire une rente.
Notre pays est un pays qui se cherche, qui peine à se déployer, qui prend du retard, qui vit sur ce qui reste d’une rente car elle n’est pas celle de l’effort, de la sueur, de la créativité L’Algérie de 2017 importe pratiquement tout, a perdu son savoir-faire que l’on tente difficilement de réhabiliter. Nous n’avons plus la foi et pire nous n’avons pas su la transmettre aux générations montantes comme un moteur feu sacré qui nous faisait espérer en l’avenir avec 100 fois moins de moyens actuellement
Qu’est-ce qu’être indépendant ?
Qu’est-ce qu’être indépendant ? quand on est dépendant à 80% pour sa nourriture, à 100% pour sa construction, les transports, quand on est dépendant à 100% pour ses achats de tous les jours.
Qu’est ce qu’être indépendant quand notre loi des finances est indexée sur les convulsions erratiques d’un baril de pétrole ? Notre mimétisme de l’Occident ne concerne que la dimension consommation et non dans celle du travail, de l’effort, de l’intelligence et de l’endurance. L’Algérien ne pense pas, il dépense, l’Algérien veut, sans effort, tout et tout de suite.
Qu’est ce qu’être indépendant quand on donne aux Algériens des habitudes de consommation qui ne sont pas le fruit de l’effort nous en remettant par fatalisme aux événements qui nous ballottent et qu’on s’enfonce dans le farniente du « tidjara chtara » » « le commerce c’est de la débrouille » qui confirme l’atavisme qui nous colle à la peau ; les Arabes n’ont jamais été des bâtisseurs, mais des jouisseurs qui n’inventent rien, installés dans les temps morts et se détruisant mutuellement sous les yeux ravis d’un Occident qui dicte la norme. Thomas Friedman du New York Times avait raison de dire s’adressant aux Arabes comparés à Israël : « Au moment où vous vous cherchez des poux dans la tête, Israël invente des puces électroniques »
Qu’est-ce qu’être indépendant quand notre système éducatif est en miettes e que nous allons plein gaz sur la scolastique et les élèves se contentant de répéter d’une façon convulsive des « vérités » qui n’ont plus court et nous éloignent de la science et de la modernité bien comprise. Nous le voyons avec la casse des dernières défenses immunitaires que sont les formations technologiques (ingéniorat)?
Quoi qu´on dise, et sans faire dans la théorie du complot, les regards sont braqués sur l´Algérie. Braises mal éteintes du régionalisme, l’échec du vivre ensemble, l’appât du gain et pour notre malheur, l’étendue du pays, sa richesse en hydrocarbures et en terres agricoles, sont autant de critères de vulnérabilité. On ne nous laissera pas tranquilles, un pays avec sa profondeur stratégique, son potentiel énergétique, ses différents climats… son potentiel archéologique et touristique.
Le monde avance avec une vitesse V. Pour avoir une idée de ce que c’est que le pouvoir de l’intelligence, nous devons prendre exemple sur les meilleurs. En 2011, l’Ocde a classé Israël, le pays, au niveau d’éducation le plus élevé au monde, après le Canada. Toute évolution réelle est indexée sur le savoir ou la connaissance. En 1984, Steve Jobs (le patron de Microsoft) affirme «le logiciel, c’est le nouveau baril de pétrole». La connaissance mondiale double environ tous les 9 ans.
Il m’est de ce fait apparu utile de consacrer ce 55e anniversaire à la situation délicate que vit le système éducatif. S’il est avéré que la gestion économique est discutable malgré une rente cumulée de 700 milliards de dollars, la grande erreur des gouvernants depuis l’indépendance est de ne pas s’être occupés du système éducatif qui n’a jamais pu se redresser. L’Ecole étant devenu le creuset des luttes idéologiques. D’un côté les artisans de l’arabisation à marche forcée au nom d’une langue liturgique et d’un arrimage à une métropole moyen orientale qui ne nous a ramené que des avanies. De l’autre les nostalgiques de ce qu’ils appellent la modernité et qui pense que notre bonheur est d’être dans le giron de la Francafrique !!
Le combat idéologique concernant l’école avait connu son acmé avec Lacheraf qui a voulu laver les écuries d’Augias. Il perdit son pari et nous avons eu l’école fondamentale puis les différents ministères surtout pendant la décennie noire où les enseignants ont payé le prix fort le grand djihad- mais ne sont toujours pas reconnus comme des vrais moudjahed car ils ont combattu l’ignorance et y ont laissé leur vie-
Ce fut ensuite la mise en place d’une commission de réforme qui avait donné l’illusion que nous avions divorcé avec les vieux démons. Hélas, nous n’avons jamais vu la version finale. Depuis le système éducatif poursuit sa descente aux enfers, abandonné des pouvoirs publics qui s’en souviennent chaque année en septembre, pour que la rentrée ait lieu sans vagues.
Etat actuel des lieux du système éducatif
Près de 10,5 millions d’élèves 18.826 écoles primaires, 4.427 collèges, 2.370 lycées, 97 universités. Voilà pour le quantitatif pour un budget de 1050 milliards de DA soit une moyenne de 100.000 DA soit encore 8 à 10 fois moins par comparaison avec les pays européens (8000 à 13.000 euros). Plus de 90% de ce budget sont constitués par une masse salariale.
Dans un monde de la technologie suprême, les sciences et le technologie ont été exclus par bêtise et paresse. Il est plus simple de conditionner des cohortes de jeunes en les endoctrinant par une scolastique qui exclut la rigueur scientifique d’autant que par paresse, on va toujours vers la facilité. Les laboratoires des travaux pratiques ont été graduellement exclus et les élèves se trouvent orientés vers un fourre tout : le baccalauréat sciences qui n’a de sciences que le nom . Toutes les matières se valent ; Il n’y a pas de singularité mettant en valeur les sciences avec un fort coefficient. Résultat des courses les élèves en science peuvent réussir avec des faibles notes en sciences expérimentales mathématiques, physique et chimie . il suffit pour cela qu’ils ait des notes généreuses en arabe, en anglais, en français en « sciences islamiques » en histoire et en sport…
En fait, problème des filières scientifiques c’est qu’elles sont engluées dans un magma d’une douzaine de matières .En Algérie on peut réussir au bac science avec de faibles notes en math et en physique chimie biologie. Il y a à peine 2 % de candidats au bac math et math technique, les bacs lettres et sciences se partagent le reste. En Iran 25% des étudiants vont dans les disciplines technologiques ce chiffre est de 35 % en Allemagne !
Cette filière mathématique ainsi que celle mathématiques techniques sont condamnés à court terme. Nous aurons alors atteint le fond : Plus d’esprit critique qui favorise la raison mais abrutissement dont on voit les preuves tout les jours avec l’abandon d’un certain nombre d’acquis qui faisait que les Algériens, appelés à tort les Arabes d’Occident,avaient une façon moderne d’appréhender l’avenir. Le constat est que le curseur est totalement du côté d’un retour vers l’obscurantisme dont nous pensions avoir eu raison dans le dernier combat pendant la décennie rouge.
Ce cap vers l’irtationnel est en partie décrit par une productivité faible mais aussi une disparition des disciplines scientifiques . Ainsi une enquête réalisée en 2013 montre que sur 1.000 élèves au primaire, 657 arrivent en cinquième année primaire, 550 en première année d’enseignement moyen, 397 en quatrième année d’enseignement moyen, 150 en première année secondaire et 41 élèves seulement, soit 4% décrochent leur Bac sans redoublement. Les 959 élèves restants font l’objet de redoublement, d’abandon ou d’échec scolaire. En clair la productivité du système est dérisoire
En Europe en moyenne c’est 80 % d’une classe d’âge . Ces 4% qui arrivent à l’université réussissent dans le meilleur des cas à peine 50 % pour aller enrichir la cohorte des chômeurs et une bonne partie des cursus ne sont pas en phase avec la réalité sociale. Quant à la formation professionnelle elle gère le quotidien et n’a jamais été à l’honneur, les élèves s’y orientant par l’échec.
Quatre millions de diplômés ont été formés par l’université algérienne en cinquante ans d’existence les bacheliers que nous recevons ne maîtrisent aucune langue, n’ont pas lu un livre dans leur vie, ne savent pas rédiger une lettre et de plus les disciplines scientifiques ont régressé dangereusement qualitativement et quantitativement. Enfin, un constat grave, il y a un total clivage entre les trois sous-systèmes ; chacun s’occupe de sa chapelle et chacun est jaloux de ses prérogatives. Il fut une époque lointaine du fait qu’en théorie le baccalauréat étant le premier diplômes universitaire, les présidents de jury du baccalauréat étaient des enseignants du supérieur qui devaient contribuer à arrêter les dérives populistes des scores de réussite brejnéviens au bac.
Un bac pour les retardataires et les absents ?
Dans un réquisitoire sans concession le professeur Abdelkader Khelil décrit la malvie du système éducatif et sa descente aux enfers du fait de la triche comme sport national Il écrit : Tout le monde doit savoir que « zéro fuite » est une utopie parce que notre société traîne derrière elle un boulet, celui de la carence criarde en matière de civisme ! Il faut aussi relever la mobilisation sans précédent des forces sécuritaires ( ) Oui ! Force est de constater qu’on triche assez souvent pour devenir « représentants du peuple » sous l’habit usurpé de député ou de sénateur, voire ministre par défaut même de très, très courte durée ! ! Qu’on triche avec le fisc en ne payant jamais d’impôts Alors ! Pourquoi s’étonner de la triche lorsqu’elle provient de nos jeunes aux examens, quand leurs ainés, apprentis grands tricheurs sont là pour leur indiquer la voie à suivre? ( ) Triste société que celle qui comme la nôtre fait du tricheur d’aujourd’hui : le cadre de la « nation estropiée » de demain ! Et dire qu’autrefois, la triche se limitait juste à d’insignifiants pense-bêtes introduits dans les chaussettes, collés sur l’avant-bras ou cachés dans des stylos à plume ! ( )» (1)
A toutes les avanies notamment le feuilleton de la ’atba ( le seuil) le sujet du bac étant indexé sur le niveau d’avancement du plus faible lycée . Depuis quelques années la triche est devenue au fil des ans une performance. Cette année on est au chevet des tricheurs et des lèves tard. Un scoop ! La session exceptionnelle organisée au profit de 104 000 candidats retardataires aura lieu du 13 au 18 juillet avec une pause le vendredi 14 juillet C’est de mon point de vue, le signe d’une dégénérescence de la symbolique du bac. A la demande de parents d’élèves dont les enfants sont arrivés, on remet en marche une machine lourde à gérer, que celle d’organiser un nouveau bac.
Qu’on le fasse pour 1000, ou 100.000, le scénario est le même, il faut mettre en place des sujets qui ont demandé 3 mois pour la session normale et trois semaines pour le bac des retardataires. Cette décision ne repose pas sur un argumentaire solide Pourquoi ne pas étendre la session aux candidats recalés de la session de juin. Comment reconnaître un retardataire d’un absent ? En fait on s’achemine vers une deuxième session pour les candidats absents. Pour l’équilibre des chances des syndicats ont proposé une deuxième session pour tous ceux qui ont échoué en juin ! Cela fera alors une jurisprudence l’année prochaine si le bac est toujours maintenu, les élèves demanderont deux sessions C’est une réaction en chaine qui va chambouler tout de proche en proche l’enseignement supérieur dont le calendrier des inscriptions donc l’année universitaire va démarrer une fois de plus bien après le mois de septembre.
En définitive, avons-nous une école qui fait réussir? Une université vue comme un ascenseur social? Rien de tout cela! L’école a été qualitativement un échec. Nous avons beaucoup d’étudiants mais que valent ils ? La tentation de faciliter qui consiste à implanter une université dans chaque wilaya est une erreur ! Une université cela ne se décrète pas ! Il faut respecter les critères universels en terme de niveau du corps enseignant, de disponibilité de moyens pédagogiques, laboratoires, équipements, bibliothèques mais aussi aspect tout aussi importants d’espaces de détentes pour le sport. Le niveau est déplorable, nous le voyons aussi dans le supérieur qui reçoit ces bacheliers mal formés et qui seront par la force des choses mal pris en charge aggravant ainsi définitivement le gap par rapport aux normes de compétences universelles
Que doit on faire : Les mesures de bon sens ?
Le problème est le suivant. Devons nous condamner définitivement le savoir en Algérie en tournant le dos à la science et à la technologie ? L’échec du système éducatif est de faire dans la facilité, l’absence du raisonnement logique et en définitive la condamnation des jeunes à ne jamais réfléchir par eux-mêmes mais être livrés pieds et poings liés à des discours rétrogrades qui gangrènent le corps social . Aucun pays ne peut se passer d’une élite, même si ce mot sent encore le soufre en Algérie du fait d’une vision égalitariste L’Ecole algérienne est à une croisée de chemins. L’éducation a besoin de se remettre en cause se moderniser, recycler ses enseignants..
Doit on continuer le parcoeurisme un héritage colonial avec le Bac , ou privilégier le raisonnement ? Il est temps de revoir cela. Faut-il concevoir des épreuves jugeant plus le raisonnement, la logique, l’esprit de synthèse que le parcoeurisme et la restitution de cours ? Andreas Schleicher directeur de l’éducation et des compétences, chargé de la politique de l’éducation, au sein de l’OCDE nous dit : « Le monde moderne se moque bien de ce que vous savez. Il s’intéresse à ce que vous savez en faire.
Il a besoin de gens créatifs, capables de croiser les sujets. Mieux encore à force de vouloir caporaliser l’élève dans un enseignement sans imagination on atrophie son enthousiasme à l’invention tout en jouant Il nous faut former le maitre capable de faire réussir l’élève en l’instruisant par le jeu.
De mon point de vue, du fait que le système éducatif est un système à temps de réponse long, il ne faut pas se leurrer, il nous faut tous ensemble y aller graduellement avec un maitre-mot : comment améliorer l’acte pédagogique qui se décline différemment selon les paliers de l’école et à l’université. L’idée est de partir de l’embouchure pas de la source. Graduellement on remonte à la source pour savoir quels sont les considérants à mettre en place, en amont d’abord, dans le secondaire.
La formation professionnelle doit suivre les besoins réels de l’économie nationale et au moins doubler ses capacités l’école ne fait plus rêver. Il nous faut la réhabiliter. Notre système éducatif devra être la priorité des priorités Ce n’est pas du jour au lendemain que nous aurons un système parfait. Nous devons revoir les programmes pédagogiques dans l’éducation où on peut penser dès à présent à un baccalauréat du développement durable dont les prolongements seront pris en charge dans les métiers aussi bien à la formation professionnelle que dans l’enseignement supérieur.
Par ailleurs, dans un monde où les langues sont des vecteurs identitaires de civilisation, de consommation et d’accès à la technologie : un postulat de base est de former de parfaits bilingues ou trilingue Aller vers les langues du futur sur les 20 prochaines années est une obligation quatre langues seront dominantes, l’anglais, le chinois, l’allemand et le russe. Doit-on enseigner ces matières scientifiques en français ou faire le saut qualitatif qui nous permet de sauter une étape qui se posera tôt ou tard aller sans état d’âme en allant même d’une façon progressive vers l’anglais scientifique
Les lycées d’excellence et les olympiades de mathématiques
Une élite sélectionnée sur la base des mathématiques ne doit pas souffrir de retard. Il nous faut mettre en place dès à présent une vingtaine de lycées d’excellence. Les effets d’annonce actuels reposent sur du vent. Ce n’est pas comme cela qu’on sélectionne les meilleurs. Il faut avoir commencé et s’inscrire dans la durée pour repérer sur les 25.000 établissements, les génies en herbe Les mathématiques, les sciences devraient avoir plus de la moitié (60%) dans les bacs scientifiques et au moins 40% dans les autres disciplines. Les enseignants doivent détecter les petits génies dès la sixième et graduellement les encourager en mettant à leur disposition un lycée spécifique avec toutes les commodités, une bourse confortable et surtout en leur affectant les meilleurs enseignants. Cela ne peut se faire que si on est convaincu que c’est une cause nationale qui doit mobiliser tout le système éducatif, notamment le supérieur par grande discipline (CPN) mathématiques, physique-chimie, informatique, sciences du vivant, sciences naturelles. Favoriser le vivre-ensemble avec les échanges inter-wilayas, inter-lycées, inter- universités, il est nécessaire de spécialiser les universités pour éviter la consanguinité régionale synonyme d’effritement identitaire, faire ce que fait le service national et ce que devrait faire le ministre de la jeunesse responsable de 75% de la population,
Pour un diplôme de fin d’études secondaires qui remplace le bac
Où allons nous avec des cohortes au bac qui vont dépasser le million ? Par comparaison nous avons plus de candidats que la France. Peut on continuer ainsi à mobiliser les forces de police de gendarmerie voire de l’armée pour un examen dont la finalité est discutable ? Dans la grande majorité des pays, le baccalauréat est un diplôme de fin d’études secondaires, l’entrée à l’université se fait sur concours en fonction des possibilités d’accueil et surtout ce ne sont que les meilleurs qui rentrent. On ne sait pas où cela va mener; à cette cadence d’inscription nous aurons les 2 millions d’étudiants bien avant 2020. Un pays comme la France ou l’Iran ont environ 2,5 millions d’étudiants. Le niveau de ces étudiants est sans commune mesure avec celui des étudiants algériens.
En Algérie, pour cette année, plus de 760 000 candidats ont passé le baccalauréat. L’organisation du baccalauréat exige de par sa lourdeur ,son cout et la mobilisation de dizaines de milliers de personnes des dispositions de plus en plus difficiles à mettre en place Aura-t-on, dans le futur les moyens de le faire ? Est-il nécessaire de le faire en dehors de la dimension symbolique ? On ne sait pas où cela va mener ; à cette cadence d’inscriptions nous aurons 1 million de candidats au bac. Peut on mobiliser chaque année 600 à 700 milliards pour un résultat auquel on peut aboutir autrement les 2 millions d’étudiants bien avant 2020. Un pays comme l’Iran ou la France ont environ 2,5 millions d’étudiants. C’est une évidence : l’Etat ne pourra pas prendre en charge tous les étudiants uniquement à l’université.
Dans la grande majorité des pays, il existe un diplôme de fin d’études secondaires, l’entrée à l’université se fait sur concours en fonction des possibilités d’accueil de chaque filière étant entendu qu’on offre une place à chacun en fonction de ses aptitudes pédagogiques Le diplôme de fin d’études secondaires (DFES) qui remplacerait le bac ne fait que consacrer la situation actuelle d’entrée par concours en utilisant comme critère les notes du bac. Cela permettrait de faire en fin le programme jusqu’au 30 juin et non pas un arrêt en fin avril !
La mise en place de cette nouvelle vision du bac transformé en DFES pourrait être annoncée pour être appliquée aux nouvelles cohortes qui rentrent dans le secondaire en septembre 2020. Un mixage des notes de l’année avec le bac blanc organisé localement permettrait d’aboutir à des lauréats qui ont clôturer d’une façon satisfaisante le secondaire. L’inscription à l’université répondra à d’autres critères spécifiques à l’université généralement un concours d’entrée. Le candidat pouvant se présenter à plusieurs concours Ajoutons que ce sont des centaines de milliards qui seront économisés en plus de toute la mobilisation stressante qui sera évitée.
Que doit faire l’université ?
Il nous faut un cap et une vision du futur. Partout dans le monde, l’université traditionnelle «L’université de papa» est morte. L’université du nouveau siècle est une entreprise du savoir où seuls les plus compétents, quelles que soient leurs origines réussiront et seront rétribués à la juste mesure de leurs efforts. Un Etat stratège doit donner sa chance à toutes et à tous, mais il est évident que chacun s’arrêtera là où ses capacités peuvent le faire aboutir. Il nous faut avoir le courage la patience et la détermination de revoir les programmes pédagogiques pour les rendre crédibles et en phase avec la réalité du monde. Cependant, il est très important de ne pas sacrifier a la mode des spécialités dans le vent mais sans lendemain notamment dans les disciplines économiques financières, il me parait important que l’étudiant acquière les fondamentaux du socle de base fait à la fois d’humanités bien enseignées mais aussi de disciplines scientifiques ouvertes sur l’universel qui feront de l’étudiant un citoyen responsable qui appréhende le monde à travers sa propre grille et non pas à travers celle des autres
Dans le même ordre, nous devons donner un destin technologique à ce pays et il est scandaleux que les formations d’ingénieurs aient été supprimée dans les universités au profit d’un LMD dont on découvre graduellement les errements et les limites. Il est nécessaire de réhabiliter les formations technologiques d’une façon franche On prête à la tutelle l’intention de supprimer la publication scientifique et pis encore l’inscription au doctorat serait permise aux titulaires d’un master. Nous aurons de ce fait des bataillons de docteurs. Partout dans le monde, l’université traditionnelle, «l’université de papa», a vécu. «L’université du nouveau siècle est une entreprise du savoir où seuls les plus compétents, quelles que soient leurs origines réussiront et seront rétribués à la juste mesure de leurs efforts.» Aucun pays au monde ne peut avancer technologiquement s’il ne forme pas d’ingénieurs et de techniciens. L’Algérie a autant besoin d’ouvriers, de techniciens, de maçons, de plombiers que d’ingénieurs ou de médecins. Des passerelles rigoureuses doivent être mises en place pour évoluer ; un technicien peut devenir ingénieur s’il en a les aptitudes.
Quelques soient la santé financière du pays il est important d’avoir une élite du neurones. Ce n’est ni celle de la naissance ni celle de l’argent. Dans les grandes disciplines (Sciences exactes, Métiers de l’ingénieur, Droit, Médecine Economie. Nous devons mettre en place des institutions à taille humaines de formation et de recherche environ 50.000 personnes soit 10 à 15000 diplômés de top niveau qui sont là pour garantir la pérennité de l’Etat. Pour cela les programmes des écoles du moyen et des lycées en amont devraient poser les prémices de ces métiers.
A titre d’exemple, dans le domaine du développement humain durable, c’est à l’école que l’on formera l’éco-citoyen de demain. En terminale, la compétence acquise dans ce diplôme de fin d’études secondaires (DFES) qui remplacerait le bac) serait le préalable aux formations au développement humain durable.
Les dérives constatées plus haut ont des solutions qui ne peuvent être mises que par une étroite coordination. Il y a une nécessité absolue d’une coordination des trois sous-systèmes. Quand on enseigne les mathématiques, cela devrait aller de l’école primaire vers l’agrégation de mathématiques dans un continuum global mis en œuvre par le comité pédagogique de mathématiques De plus il devrait y avoir une collaboration pour une synergie des moyens. Dans l’achat et l’intégration des équipements pédagogiques
L’éthique à réhabiliter
700 000 enseignants font du mieux qu’ils peuvent dans l’anonymat le plus strict. Force est de constater que nous ne savons pas récompenser l’effort et le mérite. Tout le monde est logé à la même enseigne. Ce qui stérilise toute initiative pour l’amélioration de l’acte pédagogique qui n’a pas été jusqu’à présent la priorité. le pays donne l’impression d’avancer sans son école et sans son université.
Le système éducatif est gangrené par la corruption. De plus l’enseignant est livré à lui-même car il n’y a pas de sanction des élèves et étudiants contrevenants. La mort d’enseignant est un signe inquiétant et l’Etat doit sévir avec la plus extrême rigueur. En plus de ces chasseurs de primes, il y a le plagiat, il a la triche au bac. La corruption est encore plus grave, puisqu’il s’agit de former l’élite de demain. Il semble que la fraude soit devenue un sport national en Algérie. De plus les enseignants de plus en plus vulnérables coincés entre une administration qui souvent leur demande de tricher en leur âme et conscience, des étudiants de plus en plus libres de s’ingérer par la force dans le système de notation, par la force des choses, ne voulant pas avoir d’histoires cèdent à leurs corps défendant car ils sont seuls face aux problèmes. De compromis en compromis on arrive à la compromission voire à une mercuriale des notes qui peuvent être achetées de différentes façons ( menace, et vente pure et simple au plus offrant) . Que devient alors le niveau des diplômés et que peut on faire de ces diplômés au rabais ?
Le scandale des fuites au bac nous interpelle. Rien ne peut se faire sans éthique. C’est peut-être le premier chantier qu’il faut lancer pour réhabiliter le système éducatif. La charte de l’éthique aurait pu si elle était appliquée servir de garde-fou. Il est nécessaire de la remettre sur rail dans les trois piliers du système éducatif car elle fixe les droits et les devoirs de chaque acteur de la communauté de l’éducation, et de l’enseignement; les enseignants, les étudiants et l’Administration qui ne doit pas outrepasser ses prérogatives
Il faut réhabiliter l’effort et le mérite en séparant le bon grain de l’ivraie, les besogneux des tricheurs, coupables doublement de compromettre l’avenir des générations futures. Une charte de l’éthique bien expliquée aux acteurs de la communauté du système éducatif (enseignants, administratifs, élèves étudiants) emportera l’adhésion du plus grand nombre. Les chefs d’établissement ne devraient pas l’être à vie ce sont des enseignants qui sont là pour une mandature limitée. Ils doivent s’interdire d’interférer dans le pédagogique et résister à la tentation du score, du chiffre, de plaire. L’acte pédagogique ne concerne que les enseignants..
Le vivre ensemble plus que jamais nécessaire
Après avoir parlé du système éducatif et des voies et moyens de redresser les dérives criardes, rien ne peut se faire sans une société apaisée qui conjure les démons du régionalisme et la chape de plomb d’une idéologie à des années lumières de notre islam maghrébin qui est en train de travailler le corps social. Nous devons prôner avant tout le vivre ensemble Nous devons avec un consensus de la société pour militer pour une école tournée vers l’avenir, une école protégée des convulsions politiques et idéologiques. L’Ecole est le bien commun, nous devons veiller sur l’éducation de nos enfants. L’école ouverte, fascinée par l’avenir, avec une identité plurielle et assumée, sans faire de la langue arabe et de la religion un fonds de commerce.
En son temps, le service national participait à l’édification du pays en faisant que les Algériens se connaissent véritablement du Nord au Sud d’Est en Ouest. Qu’avons-nous fait de tout cela ? Nous avons un lycée par grande ville une université par wilaya. Le jeune nait, fait ses études travaille en ne sortant pratiquement pas de sa ville.
La grande erreur est de permettre à chaque université, certaines sans compétence aucune, d’ouvrir toutes les spécialités au lieu de les répartir judicieusement. Le ministère de la jeunesse en charge de 75% de la population a – t-il les moyens de sa politique? Peut il mobiliser sainement la jeunesse dans des activités sportives intellectuelles, et ludiques autrement que l’Internet dévoyé ou de s’occuper d’une équipe off shore? A-t-on vu le sport à l’école et à l’université, l’organisation d’un championnat inter -wilaya, région, lycée, national? A-t-on vu des compétitions interwilaya, inter-lycée ? Le ministère de la Jeunesse devrait être avec le système éducatif la cheville ouvrière de la mobilisation de la jeunesse s’il y a un cap.
La situation du pays impose plus que jamais, un consensus politique sur les grands défis qui seront là quels que soient les pouvoirs en place, mais qui risquent, s’ils ne sont pas pris en charge, rapidement d’être de plus en plus difficiles à gérer. Le meilleur hommage que l’on puisse rendre à nos martyrs est d’aller vers la science du parler vrai et d’inciter les jeunes à l’effort, à l’endurance et à la performance L’Algérie du million de martyrs vaut mieux que cela. En son temps, la Révolution de Novembre fut à la fois un miracle et une belle réussite.
Comment faire émerger de nouveaux révolutionnaires capables d’impulser cette Révolution qui fait son Graal de l’économie de la connaissance ; un autre djihad aussi important qui permettra à l’Algérie de garder son rang dans un monde de plus en plus crisique où nous pourrons survivre que scientifiquement et que ne comptant que sur nous même en tant que créateurs de richesse. Cela ne pourra se faire ,outre le consensus qu’avec le parler vrai.
Je plaide pour une école qui joue le rôle d’ascenseur social, qui donne la chance à tout le monde et qui ne laisse personne sur le bord de la route. Je plaide pour une Algérie du futur, fascinée par l’avenir. Il nous faut changer de paradigme. Ne pas miser sur la rente. C’est à cette seule condition que nous mobiliserons les Algériennes et les Algériens qui se sentiront alors acteurs de leur destin donnant ce faisant la pleine mesure de leurs talents Bonne fête aux Algériennes et aux Algériens qui ont encore et malgré tout l’Algérie au cœur.
Amen
Pr. Chems Eddine Chitour
Professeur – Ecole Polytechnique Alger