Le gouvernement a introduit une pression supplémentaire sur le marché noir de la devise, en autorisant l’importation de véhicules par des acheteurs autres que les concessionnaires.
Le marché noir de la devise est au bord de l’explosion. En autorisant les particuliers et les entreprises à importer des véhicules pour leur propre compte, le gouvernement a introduit un nouvel élément de pression sur ce marché qui se trouvait déjà au bord de la rupture.
Au taux officiel déjà, le dinar était sous pression. Avec la hausse du dollar face aux autres devises fortes, il faut désormais 110.52 dinars pour un dollar, un plafond historique, alors que l’euro est à 125.70 dinars, un niveau proche de son plus haut historique.
Au marché noir, l’euro était, cette semaine, entre 178 et 180 dinars à Port-Saïd, le principal marché noir de la devise d’Alger. Mercredi, il a été acheté à 181 dinars et vendu à 180 dinars, selon un commerçant. Le prix de la devise au marché noir se maintient ainsi autour de 50% au-dessus de celui du marché interbancaire.
Cette marge risque cependant d’exploser dans les semaines qui viennent, si les informations de presse faisant état d’une levée de l’interdiction des importations par des opérateurs autres que les concessionnaires se confirmaient.
Contourner les concessionnaires
Pour le gouvernement, la mesure vise d’autres objectifs. La décision de contingenter les importations de véhicules en les soumettant à des licences a fortement déstabilisé le marché, et poussé les prix vers le haut. Les modèles de véhicules les plus demandés ont déjà augmenté de 30 à 50 pour cent depuis début 2015, sous le double effet de la rareté des véhicules et de la baisse du dinar. Le nombre de véhicules à importer a été ramené de 560.000 en 2013, année de tous les records, à 150.000 en 2016.
En même temps, le gouvernement estime que cette mesure permet de recourir à d’autres financements que ceux transitant par les banques. Les devises acquises au marché noir ou auprès de proches installées à l’étranger, traditionnellement consacrées aux vacances ou à d’autres dépenses, vont être partiellement réorientées vers l’importation de véhicules. Cela peut même contribuer à améliorer les recettes fiscales, grâce à une augmentation éventuelle des recettes douanières.
Autre « bénéfice » de cette mesure, le gouvernement montre aux concessionnaires, qui constituent un puissant lobby, qu’il dispose d’autres atouts pour les affronter. Il peut en effet les contourner en libéralisant davantage les importations.
Moment délicat
Revers de la médaille, la décision d’autoriser d’importation par des particuliers et des entreprises va livrer ces derniers un face-à-face difficile à assumer avec des concessionnaires bien installés dans des pays étrangers, en France notamment. Tous les avantages obtenus grâce au dispositif laborieusement mis en place avec la formule des concessionnaires (prix bas grâce aux achats groupés, obligation de garantie, service après vente, organisation des transports des véhicules importations, etc.) est, de fait, abandonné.
Par ailleurs, cette mesure a été aussi prise dans un moment particulièrement délicat pour le marché noir de la devise. Au début de l’été, la demande sur les devises atteint traditionnellement son niveau le plus élevé, avec les besoins exprimes par les vacanciers et les achats de devises effectués par ceux qui préparent leur pèlerinage à La Mecque, se septembre prochain.