Le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ), qui a révélé les Panama Papers, se donne quelques semaines pour finir le traitement des données et rendre publique la totalité des noms cités dans le monde, et donc en Algérie.
La liste brute de toutes les personnes physiques et morales détenant un compte off-shore chez la société fiduciaire panaméenne Mossack Fonseca sera bientôt rendu publique. « Il faudra encore quelques semaines pour le traitement des fichiers qui paraissent prioritaires pour les partenaires médias de l’ICIJ et ensuite tout sera mis en ligne sur Internet « .
C’est ce qu’a appris Maghreb Emergent auprès d’une source près de l’ICIJ à Paris en marge du Meeting international de 4M qui a réuni cette fin de semaine des acteurs mondiaux de l’édition digital.
Plusieurs médias partenaires de l’ICIJ étaient présents à cet important rendez-vous annuel dédié au 4e média, qui a été marqué par de nombreux échanges sur le traitement de l’affaire des Panama Papers sur le web.
Inkyfada de Tunisie et ARIJ de Jordanie figurent parmi les médias et organismes partenaires de l’ICIJ dans la région MENA (Moyen Orient Afrique du nord) présents au Meeting 4M international de Paris.
Ils ont confirmé la difficulté de la prise en charge de centaines de fichiers et le suivi des investigations pour établir les connexions pertinentes entre les entreprises off-shore et leurs actionnaires le plus souvent cachés derrière des prête-noms.
L’ICIJ a dû faire face à des critiques sur le traitement sélectif des centaines de milliers de fichiers fuités des entreprises off-shore inscrites chez Mossack Fonseca. La publication de l’ensemble des listings devrait mettre un terme à cette polémique. Elle permettra par ailleurs à d’autres médias que ceux partenaires de l’ICIJ de lancer des investigations sur des entreprises et des noms dont l’importance aura pu échapper au premier traitement.
L’Algérie encore sous-traitée par le journal le Monde
La publication complète attendue des listings de Panama Papers devrait permettre aux médias algériens qui le souhaitent de compléter le traitement des fichiers algériens de l’affaire par le journal français le Monde, partenaire de l’ICIJ.
Ce traitement prioritaire fait par le Monde des listings algériens vient du fait qu’aucun média algérien n’est partenaire de l’ICIJ, une anomalie qui devrait disparaitre dans le courant de l’année 2016.
Maghreb Emergent a travaillé début 2015 en partenariat avec l’ICIJ à travers un journaliste d’investigation qui a depuis rejoint un journal papier.
Cette collaboration a donné lieu en mars 2015, à la publication inédite du listing des principaux comptes détenus par des algériens chez HSBC en Suisse, affaire d’évasion fiscale massive connue sous le nom de Swissleaks.
L’administration fiscale algérienne n’a pas jugé nécessaire d’ouvrir des enquêtes sur l’approvisionnement de ces comptes suisses de HSBC, notamment par des résidents fiscaux en Algérie.
Le Desk et Inkyfada se distinguent au Maghreb
Le meeting 4M international de Paris a rappelé la nécessaire protection des lanceurs d’alerte par les médias puis par les mouvements sociaux : « c’est un renouvellement de l’idéal démocratique du début du journalisme » a notamment déclaré Edwy Plenel directeur co-fondateur de Mediapart le site français payant connu pour l’indépendance de ses investigations.
Ce modèle économique qui fait porter les revenus de l’éditeur par les abonnements a été tenté par l’équipe marocaine du Desk, autour du journaliste éditeur Ali Amar. Les révélations de Panama Papers les plus gênantes pour le Roi Mohamed VI et son entourage ont été publiées par le Desk.
Le nouveau média électronique marocain indépendant est même arrivé à une partie des révélations de Panama Papers au prix de sa propre investigation, notamment sur le financement secret par le palais royal d’hommes d’affaires marocains afin qu’ils s’emparent de positions dans des médias régionaux.
Inkyfada le site d’information indépendant en Tunisie a, lui, essuyé une cyberattaque après sa première publication des noms de personnalités tunisiennes détenant des entreprises off-shore chez Mossack Fonseca.
En Algérie, les révélations de Panama Papers ont impliqué le ministre de l’industrie et des mines Abdeslam Bouchouareb, l’entourage d’affaires de Chakib Khelil ancien ministre de l’énergie et plus récemment l’un des fils de Chadli Bendjedid l’ancien président de la République. La publication complète des listings par l’ICIJ devrait relancer les investigations en Algérie et dans le reste du monde.