Le débat économique est bien pauvre dans cette campagne électorale pour la présidentielle 2014. Ali Benflis, lui, construit sur les hésitations de la politique de Bouteflika. Il veut reprendre le programme de réforme bancaire abandonné en 2007.
Alors que le secteur financier et bancaire est l’un des grands absents du programme du candidat Président dont les rédacteurs semblent se contenter dans ce domaine du statu quo en évoquant de façon lapidaire des mécanismes financiers « à parfaire » , Ali Benflis compte au contraire relancer de façon vigoureuse la réforme bancaire dans le but de« transformer la structure du secteur bancaire en cinq ans ». Ce résultat est censé être obtenu en particulier grâce à l’inscription « d’au moins deux banques publiques dans un contrat de gestion avec un partenaire international reconnu » ainsi que « l’introduction en bourse d’une partie du capital de banques et entreprises publiques, afin d’augmenter la transparence, de renforcer et de redynamiser la bourse d’Alger ». Il passe aussi par une « réforme de la gouvernance du secteur bancaire public qui vise la révision des contrats de performance des dirigeants des banques d’Etat et à les rendre publics ».
Un programme mis en veilleuse en 2007
Ali Benflis reprend ainsi à son compte la relance de ce que les pouvoirs publics ont désigné au cours de la décennie écoulée sous le vocable de “réforme bancaire et financière”. Un programme global de modernisation conçu dans le cadre d’une collaboration discrète entre le FMI, la Banque mondiale et le ministère algérien des Finances, dirigé à l’époque par M. Abdellatif Benachenhou. Il était assisté à l’époque de Karim Djoudi au titre de ministre délégué à la réforme financière. Le programme avait été adopté par le gouvernement algérien à la fin de l’année 2004. En simplifiant à peine on peut considérer que sa mise en œuvre s’est poursuivie sans encombre jusqu’à la fin de l’année 2007, date à laquelle l’une de ses dispositions phares qui concernait le processus de privatisation d’une grande banque publique, en l’occurrence le CPA (Crédit populaire d’Algérie), a été interrompue officiellement pour cause de crise financière internationale. Quelques mois plus tard, en juin 2008, la suppression du ministère chargé de la Réforme financière, occupé à cette date par Fatiha Mentouri, fut la mesure la plus spectaculaire adoptée lors de la formation du nouveau gouvernement d’Ahmed Ouyahia. Les ambitions et l’audace, même pour l’époque, de ce programme ne font pas de doute. Cette nouvelle “vision stratégique” visait à transformer en profondeur le paysage financier algérien à travers, tout d’abord, une réforme des banques publiques y compris au moyen de la privatisation de plusieurs d’entre elles. Le CPA devait ouvrir la voie et montrer le chemin à la BDL (Banque de développement local). La privatisation était conçue comme le moyen le plus efficace et le plus rapide de favoriser la concurrence et la diversification des acteurs, des activités et des produits et services proposés à la clientèle dans un secteur bancaire algérien dominé par une poignée de mastodontes publics Une feuille de route à forte connotation libérale, équilibrée par l’objectif affiché de renforcer les moyens et les prérogatives des organismes de supervision du secteur. La mise à niveau des infrastructures, à travers la modernisation du système de paiement via la télé-compensation et le développement de la monétique, n’a pas été oubliée et figurait également au programme.
La faiblesse du financement des PME privées en question
La réforme prônée par le staff de Ali Benflis semble surtout s’inquiéter des faibles performances du secteur bancaire public en matière de financement des PME privées .L’ensemble des mesures proposées par l’ancien premier ministre «devrait avoir en particulier pour résultat de dynamiser la distribution de crédit et d’augmenter de 50% la part des crédits bancaires aux PME à l’horizon 2019 ». Dans le but de parvenir à ce résultat ,des mesures complémentaires devront réaliser la « fusion des organismes de garantie de crédit (CGPME, FGAR) en une seule agence de garantie qui sera mise en conformité avec les normes des organismes de garantie de crédit en vigueur dans les pays avancés » et «achever la mise en place de toutes les centrales d’information de crédit, de paiement et de défaut de paiement » . Rappelons que les fonds de garantie ont été créés et sont opérationnels depuis quelques années. Leur démarrage s’avère cependant laborieux, et le nombre d’entreprises que compte leur portefeuille ne dépasse pas quelques centaines. Le plus important d’entre eux est la Caisse de garantie des crédits d’investissement aux PME (CGPME). Son directeur général est un banquier chevronné, Ammar Daoudi, qui nous déclarait voici quelques mois : “Les banques ne peuvent plus refuser un bon projet pour absence ou insuffisance de garanties. A condition cependant, ajoutait-il, que les banques commerciales prennent la bonne habitude d’intégrer ce nouveau dispositif dans leurs procédures d’octroi de crédits. Ce qui est loin d’être le cas pour le moment. Le décollage attendu en 2011 et 2012 n’a pas eu lieu. Le niveau d’activité du fonds est toujours très en deçà des attentes exprimées par les pouvoirs publics. Un constat confirmé par le DG du FGAR, Abdelhalim Hamidi, qui nous confiait, en marge d’un séminaire réuni à l’hôtel El-Aurassi que “les banques ne sont pas actuellement suffisamment motivées par le nouveau dispositif”.