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Arrestation et garde à vue, scellés des locaux : ce que dit la Loi

Par Maghreb Émergent
janvier 9, 2023
<strong>Arrestation et garde à vue, scellés des locaux : ce que dit la Loi</strong>

Lors de la conférence de presse sur l’affaire du journaliste Ihsane El Kadi et les deux médias scellés Maghreb Emergent et Radio M, les avocats de la défense ont pointé du doigt de nombreuses entorses et violations de la loi. Focus sur les dispositions de lois qui, selon eux, n’ont pas été respectées depuis l’arrestation d’Ihsane El Kadi et sa garde à vue jusqu’à son placement sous mandat de dépôt en passant par la mise sous scellés des deux médias.

Présomption d’innocence

Me Zoubida Assoul a, dès l’entame de son intervention, répliqué à tous les détracteurs du journaliste en rappelant le principe de présomption d’innocence garanti par la Constitution algérienne. « Toute personne est présumée innocente jusqu’à l’établissement de sa culpabilité par une juridiction régulière dans le cadre d’un procès équitable lui assurant les garanties nécessaires à sa défense », stipule l’article 56.

Conditions de poursuite

L’avocate a également mis l’accent sur l’importance du respect de la loi et des conditions de la poursuite des citoyens. Elle cite, dans ce cadre, les deux article 41 et 44 de la Constitution qui sont claires, selon elle, et qui démontrent le non-respect de la loi dans l’affaire de Ihsane El Kadi (arrestation et garde à vue) et la fermeture des deux médias Radio M et Maghreb Emergent.

Que stipulent les deux articles en question ?

Article 41 : « Les infractions commises à l’encontre des droits et libertés, ainsi que les atteintes physiques ou morales à l’intégrité de l’être humain sont réprimées par la loi ».

Article 44 : « La liberté de création intellectuelle, artistique et scientifique est garantie au citoyen. Les droits d’auteur sont protégés par la loi. La mise sous séquestre de toute publication, enregistrement ou tout autre moyen de communication et d’information ne pourra se faire qu’en vertu d’un mandat judiciaire. Les libertés académiques et la liberté de recherche scientifique sont garanties. Elles s’exercent dans le cadre de la loi. L’Etat œuvre à la promotion et à la valorisation de la recherche scientifique au service du développement durable de la Nation ».

« En tant qu’avocats, nous allons parler d’une manière générale de cette affaire car le dossier est encore en instruction. Dès que l’enquête sera clôturée, vous allez découvrir la réponse de la défense dans les salles d’audiences. Il y a une loi dans ce pays et nous la respectons. Cette loi interdit la fermeture des médias sans décision juridique d’une manière claire et qui ne supporte aucune modification ou interprétation », affirme Me Assoul.

Financement

De son côté, l’avocat Abdellah Heboul, a fait savoir que le journaliste Ihsane El Kadi est poursuivi en vertu des articles 95, 95 bis, 96 du code pénal et de l’article 1 de l’ordonnance 77-3 liée aux quêtes.

Article 95 : « Quiconque reçoit, de provenance étrangère, directement ou indirectement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, des fonds de propagande et se livre à une propagande politique, est puni d’une peine d’emprisonnement de six (6) mois à cinq (5) ans et d’une amende de trois mille six cents (3.600) DA à trente-six mille (36.000) DA. Tous moyens ayant servi à commettre l’infraction sont saisis ; le jugement ordonne, selon le cas, leur confiscation, suppression ou destruction. Le tribunal peut prononcer, en outre, la peine de l’interdiction des droits énoncés à l’article 14 du présent code ».

Article 95 bis 1 : « Sans préjudice des peines plus graves, est puni d’un emprisonnement de cinq (5) ans à dix (10) ans et d’une amende de 500.000 DA à 1.000.000 DA, quiconque, se livre à des actes mentionnés à l’article 95 bis, en exécution d’un plan concerté à l’intérieur ou à l’extérieur du pays ».

Article 96 : « Quiconque distribue, met en vente, expose au regard du public ou détient en vue de la distribution, de la vente ou de l’exposition, dans un but de propagande, des tracts, bulletins et papillons de nature à nuire à l’intérêt national, est punie d’un emprisonnement de six (6) mois à trois (3) ans et d’une amende de trois mille six cents (3.600) DA à trente-six mille (36.000) DA. Lorsque les tracts, bulletins et papillons sont d’origine ou d’inspiration étrangère, l’emprisonnement peut être porté à cinq (5) ans. Le tribunal peut prononcer, en outre, dans les deux cas, la peine de l’interdiction des droits énoncés à l’article 14 du présent code et l’interdiction de séjour ».

Article 1 de l’ordonnance 77-3 relative aux quêtes : « Les quêtes sont soumises à autorisation préalable, dans les conditions prescrites par les articles suivants ». Les articles suivants évoquent les conditions dans lesquelles peuvent se faire ces quêtes.

Abdellah Heboul soutient que ces accusations entrent dans le cadre des infractions politiques. « En tant que personnalité publique, Ihsane El Kadi a déjà été poursuivi en criminel, mais il n’a pas été incarcéré. Pourquoi l’emprisonner maintenant ? » s’est interrogé l’avocat, ancien juge de son état, avant de donner une réponse à son questionnement. « Il est emprisonné car l’affaire est politique ».

L’avocat explique, en outre, que cette « affaire politique » se distingue par une « couverture juridique fragile ». « Quand on arrivera au procès publique, l’opinion va découvrir la fragilité de cette couverture juridique » a noté Me Heboul.

Pour appuyer ses dires, l’avocat explique que « ce dossier est intervenu après que le journaliste ait publié un article d’opinion et un tweet, qui ont, selon lui, provoqué la réaction des autorités ».  « Ihsane El Kadi est en prison, mais est ce que ses opinions et ses articles vont être emprisonnés ? », se demande Abdellah Heboul.

Par ailleurs, Abdellah Heboul fait remarquer que le parquet ne « fournit pas l’identité de la partie étrangère qui prétendument aurait financé Ihsane El Kadi, ni le montant qu’il aurait perçu ».   

Arrestation et mise sous scellés des locaux

Au sujet de l’arrestation d’Ihsane El Kadi par des agents de la Direction générale de la sécurité intérieure au milieu de la nuit du 24 au 25 décembre passé, les avocats ont dénoncé la violation de la loi concernant les conditions de l’arrestation du journaliste.

L’article 65-1 du code de procédure pénale précise que : « L’officier de police judiciaire peut contraindre à comparaitre par la force publique avec l’autorisation préalable du procureur de la république, les personnes qui n’ont pas répondu à deux convocations à comparaitre.

Toutefois, les personnes à l’encontre desquelles il n’existe aucun indice faisant présumer qu’elles ont commis ou tenté de commettre une infraction, ne peuvent être retenues que le temps nécessaire à leur audition.

L’officier de police judiciaire est tenu de dresser un procès-verbal de leurs déclarations.

Les agents de police judiciaire désignés à l’article 19 peuvent également, sous le contrôle d’un officier de police judiciaire, entendre les personnes convoquées.

Les procès-verbaux sont dressés et transmis conformément à l’article 18 de la présente loi ».

Quant à la fermeture des locaux de l’entreprise Interface Médias, éditrice de Maghreb Emergent et de Radio M, les avocats ont expliqué que c’est un acte légalement inexpliqué d’autant que cette société par actions n’est pas accusée dans l’affaire du journaliste et qu’une éventuelle fermeture des locaux ne peut avoir lieu que dans le cadre des peines complémentaires citées dans l’article 9 du code pénal. Dans cette affaire il s’agit selon les avocats de « l’interdiction temporaire d’exercer une profession ou une activité », mais qui ne devrait pas avoir lieu sans l’ordre d’un juge.

L’Article 9 stipule : « Les peines complémentaires sont : 1 – l’interdiction légale, 2 – l’interdiction d’exercer les droits civiques, civils et de famille, 3 – l’assignation à résidence, 4 – l’interdiction de séjour, 5 – la confiscation partielle des biens, 6 – l’interdiction temporaire d’exercer une profession ou une activité, 7 – la fermeture d’un établissement, 8 – l’exclusion des marchés publics, 9 – l’interdiction d’émettre des chèques et/ou d’utiliser des cartes de paiement, 10 – le retrait, la suspension du permis de conduire ou l’annulation avec l’interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis, 11- le retrait du passeport, 12 – la diffusion ou l’affichage du jugement ou de la décision de condamnation ».

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