L’exercice budgétaire habituel de cette période consiste à faire les arbitrages nécessaires au titre de la loi de finances 2023. Cependant, fait inédit, le prochain exercice marquera l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances. Celle-ci devrait, théoriquement, orienter les finances publiques sur de nouvelles normes en matière de gestion et de calcul, au-delà des sempiternels inscription et allocation des budgets en fonction des moyens. Théoriquement aussi, la lisibilité doit être plus claire dans l’action du gouvernement au titre du prochain exercice budgétaire. Cela rend plus complexe le travail d’élaboration du budget 2023. Les arbitrages budgétaires ne seront pas moins complexes, d’autant que les tensions inflationnistes se sont exacerbées, lézardant davantage le pouvoir d’achat des ménages et des entreprises, dans un contexte de faible évolution des salaires rapportée à l’évolution du taux d’inflation et, plus particulièrement, des indices et sous-indices affectant directement le budget des ménages. Les précédentes revalorisations des rémunérations, au moyen d’une baisse du taux de l’IRG appliqué aux salaires et d’une hausse infime du point indiciaire dans la Fonction publique se sont révélées insuffisantes et totalement inefficaces face à une inflation galopante. En glissement annuel (avril 2022-avril 2021) l’indice national des prix à la consommation était de 10,86%. Les prix des produits alimentaires ont évolué de 15,72%. Cela signifie que le défi inflationniste demeure entier le gouvernement, dans un contexte mondial où l’inflation est orientée à la hausse compte tenu de l’impact persistant des tensions géopolitiques. Cependant, la hausse de l’inflation en Algérie trouve également sa source dans la hausse de la dépense publique dans un contexte pétrolier favorable ainsi que dans la hausse de la monnaie en circulation.
Le dilemme de la croissance
La dépréciation ininterrompue du dinar participe également à cette fièvre inflationniste. Il serait difficile au gouvernement de lutter davantage contre l’inflation à coups de faibles revalorisations des salaires, alors que les politiques budgétaires et monétaires censées contenir cette pression inflationniste pourrait se révéler à double tranchant. En effet, dans une conjoncture pos-pandémique où la croissance reste faible, le gouvernement sera tenté par la poursuite de la politique d’expansion budgétaire dans l’espoir d’accroitre l’activité économique. Or, cette option pourrait être préjudiciable pour les comptes publics sur fond d’incertitude quant à l’évolution des prix du pétrole, alors que la dette publique interne flirte avec les 10.000 milliards de dinars. Avec les risques de récession qui pèsent sur l’économie mondiale et une hausse imprévue des excédents du marché, les facteurs sont plutôt baissiers. C’est un budget qui s’annonce difficile pour 2023 même si l’état des finances publiques se sont nettement améliorées par rapport à la situation de tension dans laquelle elle se sont empêtrées depuis le contrechoc pétrolier de l’état 2014. Des arbitrages sont ainsi nécessaires entre une inflation exceptionnellement élevée et ses conséquences sur le pouvoir d’achat des ménages et des entreprises et une croissance faible nécessitant une hausse des dépenses afin de soutenir l’activité économique et réduire l’ampleur du chômage. Mais tout porte à croire que la sobriété budgétaire attendra compte tenu d’une croissance plutôt capricieuse, notamment dans les segments hors hydrocarbures de l’économie, nécessitant, comme à l’accoutumée, un important concours budgétaire de l’Etat.
Ali. T.