Le chef du gouvernement tunisien, Youssef Chahed, a assuré samedi aux chefs d’entreprises allemandes implantées en Tunisie, que son pays mettra tout en œuvre pour mener à bien les réformes nécessaires, soulignant que les acquis démocratiques devraient aller de pair avec le développement économique.
«Nous ferons tout pour rendre le site Tunisie attractif et compétitif et nous finirons par améliorer le climat d’affaires et vaincre toutes les difficultés», a souligné lors Chahed lors d’une rencontre organisée par la Chambre de Commerce tuniso-allemande (AHK).
Fixer un cadre juridique approprié pour l’investissement
Des tensions sur les finances publiques persistent et le lancement des réformes nécessaires accuse des retards, a reconnu M. Chahed, cité par plusieurs médias tunisiens. Il a, néanmoins, assuré que les tendances économiques sont en cours de renversement positif. Il a signalé à cet égard le dernier rapport de la Banque mondiale (BM) selon lequel le taux de croissance devrait être de 3% cette année alors que le gouvernement a fondé ses estimations sur un taux de 1.8%.
Plusieurs représentants des entreprises présentes ont mis l’accent sur le besoin essentiel de fixer un cadre juridique approprié pour l’investissement dans les plus brefs délais, en évoquant notamment les décrets relatifs à la loi de l’investissement et la loi sur les avantages fiscaux qui tardent à paraître.
«Les entreprises en Tunisie ont besoin de visibilité et de sécurité juridique», a déclaré Raouf Ben Debba, président de l’AHK Tunisie, estimant qu’il s’agissait d’une «condition clé pour promouvoir l’esprit d’entreprise dans le pays».
La contribution conjoncturelle exceptionnelle porte atteinte au climat d’investissement
Les chefs d’entreprises ont notamment exprimé leur inquiétude quant à la contribution conjoncturelle exceptionnelle, adoptée dans le cadre de la loi des finances 2017, qui porte atteinte au climat d’investissement. La taxe étant appliquée rétroactivement et va à l’encontre des règles de la loi de l’investissement.
Les entreprises allemandes sont, en effet, très inquiètes suite à l’instauration de la contribution conjoncturelle exceptionnelle pour l’année 2016 incluse dans la Loi des finances 2017 de même qu’elles ne comprennent pas les raisons du report de la date d’entrée en vigueur du Code de l’Investissement au mois d’avril 2017, alors qu’elle était initialement prévue pour janvier 2017, les décrets d’application n’étant pas encore parus. Il en est de même pour la loi relative aux incitations fiscales qui n’est pas encore adoptée.
Au sujet de la nouvelle contribution conjoncturelle de 7.5% stipulée par la nouvelle Loi de finances, M. Chahed a espéré qu’elle ne porterait pas préjudice à la rentabilité des entreprises, notamment exportatrices. «Nous restons disposés à examiner, s’il y a lieu, des cas particuliers » a-t-il indiqué, appelant les 250 entreprises allemandes présentes en Tunisie qui emploient quelque 55 000 personnes et ont investi 51 millions d’euros entre 2011-2015, à faire preuve de compréhension et de confiance.
Lourdeurs administratives et difficultés au port de Radès
Certains chefs d’entreprises se sont également plaints des lourdeurs administratives, du silence de l’Administration qui ne répond ni par oui, ni par non, des difficultés rencontrées au port de Radès et de la chaîne logistique, ainsi que du retard de la mise en œuvre de la loi sur le partenariat public-privé (PPP).
« Les deux premiers indicateurs que je vérifie chaque matin en arrivant au bureau, ce sont le nombre de bateaux en rade au port de Radès et le volume de la production de phosphates. Il faut dire que nous sommes actuellement entre zéro et deux bateaux en rade et que l’extraction des phosphates commence à retrouver un bon rythme, l’année 2016 s’est terminée avec 3.7 millions de tonnes », a déclaré, en réponse, M. Chahed qui a exhorté les entreprises allemandes à faire preuve d’optimisme et saisir les nouvelles opportunités qui s’offrent surtout après la conférence Tunisia 2020.
Il a assuré avoir pris note des doléances des entreprises tuniso-allemandes, notamment la nécessité de créer un cadre juridique clair et fiable. «Soyez en assuré. Soyez rassurés !», a-t-il dit.
«Nous nous y sommes déjà engagés et la Loi d’incitation fiscale qui est actuellement en discussion à l’assemblée des représentants du peuple, devra, dans sa forme finale, entrer en vigueur également le 1er avril 2017. Nous nous y sommes déjà engagés et la Loi de finances 2017 va dans le sens d’un meilleur équilibre macroéconomique même si je sais que la nouvelle contribution exceptionnelle de 7,5% sur le bénéfice a pu créer quelques crispations. Mais, sans solidarité sur le partage des richesses, nous ne pourrons pas renouer avec une croissance inclusive. Et la croissance doit être inclusive. Nous nous y sommes déjà engagés et nous allons continuer. Arrivés il y a 4 mois, nous avons préalablement posé les grandes orientations. Nous allons maintenant vers les réformes qui traduiront par des actions et des actions palpables, concrètes, mesurables, quantifiables».
Il a tenu à rappeler que la Tunisie était en phase de transition et que, malheureusement, pendant qu’on s’assurait de la réussite politique de la transition, l’économie a été délaissée, relevant cependant, que plusieurs réformes structurelles étaient en cours et que d’autres ne tarderont pas à être mises en œuvre en 2017, notamment celles des caisses sociales, de l’administration publique, du climat d’affaires, des PPP adoptée mais pas activée, d’urgence économique, etc.
Concernant la participation exceptionnelle, il a rappelé que le pays traversait une crise financière avec des contraintes imposées par le FMI et les syndicats.