En Algérie, l’opposition se plie à l’agenda électoral du pouvoir - Maghreb Emergent

En Algérie, l’opposition se plie à l’agenda électoral du pouvoir

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L’opposition n’a pas tenu face aux sirènes électorales. La Coalition de l’opposition (CNLTD) aborde les prochaines échéances en ordre dispersé. Sans surprise.

 

Signe de sagesse, ou résignation devant une situation sur laquelle elle peine à influer, l’opposition algérienne a choisi de jouer le jeu électoral imposé par le pouvoir, tout en maintenant une position critique. Ce choix l’a amené à une participation quasi-générale aux prochaines échéances électorales, dont les législatives, prévues pour mai 2017.

A l’exception notable de « Talai el-houirriate » (Avant-garde des Libertés) de l’ancien premier ministre Ali Benflis, et de Jil Jadid (Génération Nouvelle) de Sofiane Djillali, les partis membres de la Coordination pour les libertés et la transition démocratique (CLDT) ont entérine ce choix, qui ne faisait plus de doute depuis plusieurs semaines. Le FFS et le Parti des Travailleurs de Mme Louisa Hanoun, non membres de la CNLTD, ont également choisi de participer.

Samedi, le Parti des Travailleurs (PT) a clos la liste, en choisissant, sans surprise, la participation, tout en maintenant les critiques d’usage à la veille de chaque échéance électorale. Le parti de Mme Hanoun est un partisan résolu de « l’entrisme », ce qui le pousse à s’engager dans toutes les échéances, avec l’idée de faire avancer les choses de l’intérieur.

MSP et RCD sur la même ligne

Sans surprise non plus, le MSP, parti islamiste modéré considéré comme la branche algérienne de Frères musulmans, a choisi de participer aux prochaines législatives. Lui aussi partisan de l’entrisme, le MSP s’est éloigné du gouvernement durant les deux dernières années, ce que son appareil n’a pas accepté. De fortes pressions s’exerçaient sur Abderrezak Makri, son président, qui se voulait partisan d’une ligne dure envers le pouvoir. La participation du MSP et du RCD aux élections a virtuellement dégonflé la CNLTD, qui n’a plus guère de base de regroupement.

La plupart des autres partis d’opposition ont choisi la même voie, celle de la participation, même s’ils ne se font pas d’illusion sur l’équité des élections. Réunis au siège du parti islamiste Ennahdha, les membres de la CNLTD ont lancé un appel au « peuple algérien, à la société civile et à toutes les composantes de la classe politique » à « choisir leurs représentants au sein des institutions élues ». La coalition prône « le contrôle populaire permanent » en prévision des prochaines échéances électorales ».

Abandon de la ligne radicale

Ce choix s’inscrit, selon la CNLTD, «dans la ligne de la plate-forme de Mazafran pour les libertés et la transition démocratique », un texte adopté par des états-généraux de l’opposition réunie à Zéralda, près d’Alger, dans la foulée de la présidentielle de 2014.

La CNLTD affirme « la détermination » de ses membres à « poursuivre l’action politique commune en vue de concrétiser les clauses » de la plateforme de Zéralda et à « réaliser ses objectifs dans le cadre de l’instance de concertation et de suivi » (ICSO), une structure de coordination créée pour tenter de coordonner l’action de l’opposition.

Même si le discours se veut rassurant, la CNLTD fait un constat implacable. Malgré son attitude depuis 2014, elle n’a pas été en mesure de peser sur la décision politique. Elle n’a pas non plus réussi à créer une dynamique politique capable de changer le rapport de forces. Certains partis membres de la coalition, impatients, ne pouvaient plus supporter de vivre loin des cercles de décision.

Sur un autre registre, le Front des Forces Socialistes (FFS), faisant cavalier seul,  a décidé depuis un mois de participer aux élections législatives et locales. Traditionnellement porté plutôt vers le boycott, le FFS veut se placer sur un autre registre, la réalisation d’un consensus national, et situe toutes ces actions dans cet objectif.

Le cercle du boycott se réduit

A l’opposé, M. Benflis, dont le parti Talai El-Hourriate est membre de la CNLTD, avait annoncé en début de semaine dernière qu’il boycotterait les prochaines législatives. Le comité central de ce parti a voté le boycott par 291 voix contre 16 favorables à la participation.

M. Benflis lui-même s’était déclaré lui-même hostile à la participation, mais avait formellement laissé au parti le soin de prendre la décision. Pour M. Benflis, son parti possède « une identité et une ligne politiques », et refuse de se laisser enfermer dans un agenda fixé par le pouvoir.

Auparavant, Jil Jadid, présent sur la scène médiatique grâce à son principal dirigeant, Sofiane Djillali, mais dont l’ancrage reste inconnu, avait annoncé sa décision de boycotter les législatives, tout en critiquant les autres partis qui y participaient. Jil Jadid avait déjà quitté la CNLTD il y a six mois, préconisant une position plus radicale de l’opposition envers le pouvoir.

Une déconfiture attendue

Cette dispersion de l’opposition était attendue. Même si elle ne marque pas, formellement, la fin de la CNLTD, elle montre clairement les limites de cette coalition, tiraillée entre courants idéologiques et intérêts contradictoires.

De nombreux signes montrent que la recomposition de la vie politique partisane est en train de se faire sur d’autres bases. Les islamistes veulent prendre une longueur d’avance : le MSP et le parti du changement de M. Menasra, un dissident du MSP, ont décidé de se réunifier.

Dans la même mouvance, le parti Ennahdha et le Front pour le développement et la justice ont décidé de créer une « Alliance stratégique », premier pas vers la réunification. Abdallah Djaballah, président de la seconde formation, avait été l’initiateur du premier mouvement, dont il avait été expulsé depuis près de vingt ans.

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