«Si on ne se remet pas debout sur le plan économique, on risque de se retrouver chez le FMI », déclarait il y a quelques semaines l’actuel Premier ministre.
Les recettes en devises en 2017 après plus de cinquante années d‘indépendance politique, proviennent directement et indirectement pour plus de 97% des hydrocarbures qui conditionnent l’évolution des réserves de change, le rythme de la dépense publique et par là le taux de croissance, la valeur du dinar, le taux d’inflation et le taux de l’emploi. L’actuelle politique, sans cohérence, conduit à terme le pays droit au mur – endettement/dépendance (ratio de balance devises et technologique). Elle doit être impérativement corrigée. D’après différentes déclarations de M. Ahmed Ouyahia avant sa nomination en tant que Premier ministre reprises par l’APS, je le cite : «si on ne se remet pas debout sur le plan économique, on risque de se retrouver chez le FMI ». Alors que faire ?
1.-Quel sera le contenu de la loi de finances 2018 ?
-Retiendra t- on, dans la loi de finances 2018 pour le calcul budgétaire de la loi de finances le baril de pétrole à 50 dollars comme pour la loi de finances 2017 ?
-Ira t –on vers l’augmentation de la fiscalité ordinaire de 11% ?
– Peut-on agir sur le taux de la TVA passé de 7% à 9% pour le taux réduit, et de 17% à 19% au risque de provoquer un processus inflationniste et injuste, les impôts indirects s’appliquant à toutes les catégories sociales ?
-Que restreindra-t-on pour les dépenses ? le budget d’équipement qui a été ramené à 22 milliards de dollars en 2016 suite au dernières coupes budgétaires autant que le budget de fonctionnement environ 4600 milliards de dinars incompressible à moins d’une refonte profonde de la fonction publique ?
-Etablira-t-on l’impôt sur la fortune ? mais que possède-t-on faute d’une échelle d’évaluation exacte de la répartition du revenu et du modèle de consommation par couches sociales et d’une maitrise de l’importance de la sphère informelle ?
-Quel programme pour la démonopolisation ( nouveaux acteurs privés) et la privatisation( cession partielle ou totale ) d’un certain nombre d’entreprises publiques dont la situation financière se détériore en raison des problèmes liés au plan de charge et à la gestion ou le trésor public qui a supporté plus de 70milliards de dollars d’assainissement entre 1974/2016 ou plus de 70% de ces entreprises sont revenues à la case de départ ?
-Ira-t-on vers des subventions ciblées où d’après les déclarations de l’actuel Premier ministre environ 18 milliards de dollars, sont consacrés par l’État aux transferts sociaux en 2016, alors que les revenus en devises durant la même année ont baissé de 37 milliards de dollars.
-Utilisera t-on toujours le dérapage du dinar à plus de 127 dinars un euro (officiel) comme moyen artificiel d’ajustement du déficit de la balance des paiements ?
2.- Quelle sera la politique socio-économique ?
L’actuelle politique industrielle, sans cohérence, conduit à terme le pays droit au mur. Comment dynamiser le secteur industriel qui représente moins de 5% du produit intérieur brut et 80/85% des matières premières du secteur public et privé proviennent de l’extérieur, le taux d’intégration étant faible d’où les effets pervers. Sans analyse et dans la précipitation, des usines de montage de voitures dont le montant des importations des entrants si toutes les usines devaient se réaliser aurait été de 5/6 milliards de dollars/an 2018/2019, sans perspectives d’exportation?
Quels sont été les résultats des organismes chargés de l’emploi, ANDI l’ANSEJ autant que le CNAC et le montant les nombreux avantages accordés, l’attribution des logements presque gratuits et peut-on continuer dans cette voie ?
Quel modèle de consommation énergétique, dont les énergies renouvelables et quel est le mode de construction actuellement énergivores, envisage le gouvernement pour éviter que la consommation intérieure n’atteigne le niveau actuel des exportations horizon 2030 ?
Quel a été, le montant de la dépense publique 2000/2016 (plus de 800 milliards de dollars) et le taux de croissance relativement faible en référence à la dépense publique de 3% en moyenne 2000/2016 et comment résoudre le problème du taux de chômage de 12,3% en avril 2017( officiel), où pour le Fonds monétaire international (FMI) , si en 2016, la croissance du PIB réel a été de 4,2%, la situation devrait fortement se dégrader en 2017 et en 2018, tablant sur une croissance de 1,4% du PIB algérien en 2017 et en 2018, seulement 0,6% avec un taux de chômage dépassant les 13% dont le taux de plus de 25% pour les jeunes entre 18/25 ans ?
Conservera –on cette politique périmée des années 1970/1980 fondée sur l’ère mécanique du passé, du fameux slogan quant le bâtiment va tout va, ignorant la quatrième révolution économique qui s’annonce entre 2020/2030 reposant sur la bonne gouvernance, l’économie de la connaissance ( intelligence artificielle) et les défis écologiques ?
Quel sera le programme daté , précis, tenant compte de la transformation du nouveau monde des réformes structurelles de lutte contre la bureaucratie centrale et locale dominante par une décentralisation réelle , du système financier lieu de redistribution de la rente, du système socio-éducatif pivot de al création de la valeur et de l’épineux problème du foncier ?
Conservera t –il au nom d’un nationalisme chauviniste dépassé ( à ne pas confondre avec le patriotisme économique) la règle des 49/51% instaurée en 2009 généralisables à tous les secteurs devant être ciblée, ayant permis des rentes à certains prédateurs, sans permettre de faire baisser les importations et de dynamiser le tissu productif décourageant les IDE hors hydrocarbures ?
Qu’en sera-t-il des licences d’importation sans vision stratégique tenant compte que l’économie algérienne est dominée par la tertiarisation où petits commerce et services représentent 83% de la superficie économique avec la dominance de la sphère informelles , source de rente de situation et de corruption, une loi n’étant jamais rétroactive devant éviter les mesures actuelles qui ont reproduit les schémas bureaucratiques des années 1970/1985 ayant conduit à l’anarchie au niveau des ports avec des pertes en devises supportées par le trésor public , certes admises dans les accords internationaux mais sous réserve ‘une totale transparence, et transitoire, des pays pouvant appliquer la réciprocité pour nos exportations hydrocarbures qui constituent l’essentiel de nos recettes ?
Comment éviter l’endettement extérieur après l’épuisement du fonds de régulation des recettes fin 2016 , avec des réserves de change évaluées à juillet 2017 d’environ 100 milliards de dollars, malgré une dette extérieure faible ( moins de 5 milliards de dollars, avec une sortie de devises en 2016 – biens- services et transferts de capitaux de 60 milliards de dollars (rentrées de devises de 29 milliards de dollars), des sorties de devises- biens-servies, transfert légaux de capitaux entre 55/60 milliards de dollars et des entrées en devises fin 2017 d’environ 32/35 milliards de dollars si le cours du baril se maintient entre 50/55 dollars malgré toutes les restrictions à l’importation à l’origine, combinée au dérapage du dinar, du processus inflationniste ?
Comment mettre en application un des articles de la nouvelle constitution de ne pas différencier le secteur d’Etat et le secteur privé national et international créateur de richesses, à ne pas confondre avec les prédateurs qui doivent être combattus , en levant toutes les contraintes du milieu des affaires.
Et enfin comment organiser le dialogue économique et social pour mener à bien les réformes avec une intermédiation économique et sociale crédible, loin des intérêts de distribution de la rente.
3.-Avoir une vision stratégique de l’Algérie d’adaptation au sein du nouveau monde
Il faut être réaliste. L’ensemble des acteurs politiques, sociaux et économiques sont rivés à l’échéance présidentielle d’avril 2019. Mais l’Algérie ne peut attendre cette échéance, le statut quo étant suicidaire, devant privilégier les intérêts supérieurs du pays car toute Nation en ce monde turbulent et instable qui n’avance pas recule forcément. Il y a lieu de s’attaquer à l’essence par une vision stratégique et non aux apparences par des politiques conjoncturelles de court terme qui accroissent les tensions économiques et sociales à terme, c’est-à-dire à l’inefficacité de la dépense publique, vecteur de concentration des revenus au profit de couches spéculatives, qui ne peut qu’entraîner une détérioration plus poussée du pouvoir d’achat des Algériens. Cette hausse du taux d’inflation impliquera la hausse des taux d’intérêts des banques primaires, si elles veulent éviter la faillite, décourageant l’investissement productif. Sans réformes structurelles liées à la bonne gouvernance, il ne peut y avoir de développement véritable en Algérie avec le risque de retourner au FMI 2019/2020. Il existe, pour l’Algérie, des possibilités pour augmenter le taux de croissance du fait d’importantes potentialités, malgré la crise, supposant une nouvelle gouvernance stratégique, des institutions et des entreprises. Tout projet est forcément porté par des forces politiques, sociales et économiques sinon tout modèle économique est voué à l’échec. L’enjeu majeur pour l’Algérie et sa survie implique donc de mettre en place des instruments opérationnels capables, d’identification, d’anticiper les modifications de comportement des acteurs économiques, politiques, sociaux et militaire au niveau géostratégique. Il existe un lien dialectique entre développement et sécurité car sans un développement durable il y a nécessairement accroissement de l’insécurité qui a un cout croissant L’objectif stratégique doit concilier la modernité et notre authenticité, l’efficacité économique et une profonde justice sociale si l’on veut à terme éviter la marginalisation de l’Algérie au sein de la société mondiale avec d’importances incidences géostratégiques. L’Algérie sera ce que les Algériens voudront qu’elle soit. Le mal est en Nous et la guérison dépend avant tout des algériennes et algériens, impliquant un dialogue permanent et un large Front National sans exclusive, tolérant nos divergences d’idées, source d’enrichissement mutuel. Le passage de l’Etat de « soutien contre la rente » à l’Etat de droit « basé sur le travail et l’intelligence » est un pari politique majeur car il implique tout simplement un nouveau contrat social et un nouveau contrat politique entre la Nation et l’Etat.
(*) Professeur des Universités, expert international Dr Abderrahmane MEBTOUL