Le programme mis en place par les autorités marocaines pour régulariser les sans-papiers subsahariens a montré ses limites. C’est du moins le constat établi par des ONG de défense des droits des migrants et des droits de l’homme, réunies la semaine dernière à Paris pour faire le bilan de cette opération, lancée en décembre dernier.
De nombreuses organisations marocaines, subsahariennes et internationales de défense des droits des migrants sont arrivées au constat, selon lequel, le programme du Maroc pour régulariser les africains en situation irrégulière dans le Royaume comporte »un certain nombre de défauts ». Selon un communiqué conjoint de la FIDH et du Gadem (groupe antiraciste d’accompagnement et de défense des étrangers et migrants), les participants à cette rencontre estiment que des améliorations substantielles sont nécessaires pour la réalisation du programme de régularisation des sans-papiers subsahariens. »Les critères pour la régularisation sont appliqués trop strictement et ne tiennent pas compte de la difficulté d’obtenir des justificatifs au Maroc », estime la SG de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), Amina Bouayach. Elle explique que »l’une de nos recommandations principales est d’assouplir leur interprétation ». De son côté, Hicham Rachidi, SG du GADEM, relève qu’il est »aussi crucial d’augmenter la durée du titre de séjour obtenu à l’issue de la procédure de régularisation, qui n’est actuellement que d’un an, ou de prévoir dès maintenant les conditions favorables dans lesquelles il pourra être renouvelé ». Les autorités marocaines ne délivrent que des titres de séjour d’une année renouvelable, à l’exception des algériens qui se voient délivrer un titre de séjour de 10 ans à l’expiration de la première année de séjour régulier.
Dialoguer
Pour rendre ce programme de régularisation des sans-papiers subsahariens plus souple, les mêmes associations recommandent aux autorités marocaines de renforcer le dialogue et sa systématisation »entre les organisations de défense des droits des migrants et les pouvoirs publics en charge de cette question ». »La FIDH et le GADEM recommandent la mise en place d’un comité regroupant les différents acteurs impliqués dans la mise en œuvre du programme (autorités, organisations de la société civile, avocats et barreaux), qui se réunirait tous les mois, afin que les autorités soient en mesure de comprendre les problèmes pratiques qui se posent tout au long du processus et procèdent aux aménagements nécessaires », préconise Mehdi Alioua, président du GADEM. Selon ces ONG, »une telle mesure favoriserait la transparence du programme et renforcerait son efficacité ».
Le programme
Les autorités marocaines avaient annoncé début janvier dernier, face aux pressions des ONG locales de défense des migrants et des droits de l’homme, mais aussi celles des associations européennes, une vaste opération de régularisation des »sans-papiers » qui prendra fin le 31 décembre 2014. Les conditions pour être régularisé sont, toutefois, draconiennes. Selon le ministère chargé des Marocains résidant à l’étranger et des Affaires de la migration, seuls seront régularisés les étrangers conjoints de ressortissants marocains justifiant d’au moins 2 ans de vie commune, les étrangers conjoints d’autres étrangers en résidence régulière au Maroc et justifiant d’au moins 4 ans de vie commune, les enfants issus des deux cas susvisés, les étrangers disposant de contrats de travail effectifs d’au moins 2 ans, les étrangers justifiant de 5 ans de résidence continue au Maroc, et les étrangers atteints de maladies graves et se trouvant sur le territoire national avant le 31 décembre 2013. Les migrants subsahariens qui vivent cachés dans les forêts de Rosto Gordo, près de Tanger, ou à Gourougou (Oujda-Nador), pas plus que ceux qui vivent d’expédients dans les villes pourchassés par la police, sont exclus d’office du bénéfice de cette régularisation. La Commission des affaires étrangères du parlement auditionnera le ministre des affaires migratoires le 21 mai prochain sur le déroulement de cette opération de régularisation.