La mobilisation des femmes dans le Hirak s’est faite de manière tout à fait naturelle depuis le début de la révolution. Sourire aux lèvres, belles, élégantes, tenues traditionnelles pour certaines, revendications portées à bout de bras, elles ont marché chaque vendredi et continuent de le faire depuis le 22 février. Chacune à sa façon, elles participent à écrire cette page de l’histoire de l’Algérie nouvelle.
Il y a une année, le 8 mars 2019, c’était un vendredi. 20 millions d’Algériens sont dans la rue, les femmes étaient selon les médias majoritaires. Elles ont marqué la marche hebdomadaire du 3eme vendredi. Etudiantes, fonctionnaires, enseignantes, avocates, médecins, mères aux foyers, jeunes, ou encore âgées, leur participation au Hirak a donné à cette révolution un autre visage : Le visage d’une Algérie belle, rebelle, combattante.
Des citoyennes jusque-là anonymes vont devenir des icônes du Hirak. Leurs noms est désormais dans l’histoire.
Nour el Houda Yasmine Dahmani, Samira Messouci, Nour el houda Oggadi, Sabrina Malek
Certaines seront arrêtées avec pour seul « crime », avoir pris part à une marche, porter le drapeau Amazigh ou encore relayer des vidéos.
Nour el Houda yasmine Dahmani a été arrêtée le 17 septembre 2019 lors d’une manifestation à Alger, la trentième marche des étudiants. On reproche à cette jeune étudiante en droit d’avoir brandi une pancarte sur laquelle elle dénonçait « la corruption de la bande». Le 25 novembre, elle a été condamnée par un tribunal d’Alger à six mois de prison dont quatre avec sursis. Sa durée de détention provisoire excédant d’ores et déjà sa peine de prison ferme, elle a été libérée le jour même du verdict.
Samira Messouci, jeune élue de la wilaya de Tizi Ouzou pour le RCD a été arrêtée fin juin 2019 pour port du drapeau Amazigh lors d’une marche à Alger. Elle a été placée en détention provisoire par le tribunal de Sidi M’hamed qui l’a condamnée à 1 an de prison dont six mois de prison ferme. Elle quittera la prison d’El Harrach à Alger après avoir purgé sa peine de prison de six mois.
La militante du RAJ, Sabrina Malek interpellée lors du vingt-huitième vendredi à Alger en possession du drapeau amazigh, a été remise en liberté le 2 septembre 2019 sans être présentée devant le procureur de la République de Sidi M’hamed.
Oggadi Nour Elhouda a été condamnée à 6 mois de prison dont 5 mois avec sursis et 1 mois ferme. Elle a été libérée le 13 février de la prison de Ghazaouet à Tlemcen. Convoquée par les services de cybercriminalité de la wilaya, Nour El Houda avait été placée sous mandat de dépôt, le 19 décembre dernier, par le juge d’instruction près le tribunal de Tlemcen pour entre autre : « atteinte à l’unité nationale», «atteinte à corps constitué et au moral des troupes» et «incitation à attroupement ».
Des figures emblématiques de la guerre de libération algérienne présentes au sein du Hirak
Des Moudjahidates vont joindre leurs voix à cette révolution. Pouvait-il en être autrement pour ces femmes qui ont combattu le colonialisme français et qui luttent aujourd’hui pour une « autre indépendance ». Dès les premières semaines du Hirak, elle marquera sa présence presque chaque vendredi. Malgré l’âge et la difficulté de marcher, Djamila Bouhired, est dans la rue le vendredi, soigneusement coiffée, sourire aux lèvres, elle marche, dit-elle, « toujours pour l’indépendance de l’Algérie ».
S’appuyant sur sa béquille, Louisette Ighil Ahriz 83 ans, militante durant la guerre de libération nationale bat le pavé chaque vendredi depuis le 22 février, pour réclamer à son tour la fin du système en place. « J’ai l’impression de retrouver mes vingt ans. Je suis fière de marcher aux côtés de cette jeunesse. Ce qui se passe aujourd’hui est magnifique, c’est la révolution du sourire ! », confie-t-elle à la presse.
Mères, épouses, femmes et filles de détenus.
Leur courage, leur combat, leur force, leur dignité est à rappeler en ce 8 mars, elles ont continué à marcher, à porter les revendications de tout un peuple, alors que leurs maris, leurs fils, ou encore leurs pères sont en prison. Présentes devant les tribunaux espérant à chaque audience une libération, elles retournent le vendredi dans la rue, les photos de leurs maris, fils ou pères à la main, sans se décourager, criant les mêmes slogans et portant les mêmes revendications comme au premier vendredi. Le changement radical, le départ du système et la libération des détenus.
Fortes, humbles, dignes, ces mères, ces épouses, ces filles de détenus confirment aux côtés de toutes les femmes algériennes que cette révolution est pacifique. Avec le sourire aux lèvres, chaque vendredi, la révolution du sourire « au féminin » continue…..
Nabila Lamali