M A G H R E B

E M E R G E N T

Actualités

Ihsane El Kadi et une vingtaine de détenus d’opinion libérés par grâce présidentielle

Par Maghreb Émergent
1 novembre 2024
Ihsane El Kadi et une vingtaine de détenus d’opinion libérés par grâce présidentielle

En ce 1er novembre 2024, un vent d’espoir souffle sur l’Algérie alors que le président Abdelmadjid Tebboune signe des décrets de grâce présidentielle. Cette décision inattendue permet la libération d’Ihsane El Kadi et d’une vingtaine d’autres détenus d’opinion, offrant une fragile et symbolique éclaircie dans le ciel assombri de la liberté d’expression en Algérie.

Cette libération marque un moment crucial pour Ihsane El Kadi, directeur du groupe médiatique Interface Médias, qui retrouve sa liberté après presque deux ans derrière les barreaux. Son cas est devenu emblématique de la lutte pour la liberté de la presse dans le pays. Sa libération résonne bien au-delà des frontières algériennes, mettant en lumière la répression systémique des voix indépendantes qui sévit depuis des années.

Condamné initialement à sept ans de prison, dont cinq fermes, pour des accusations de “financement étranger” et de “mise en danger de la sûreté de l’État”, El Kadi était devenu malgré lui le symbole de la résistance contre l’asphyxie médiatique. L’absurdité des accusations avait d’ailleurs été mise en évidence par ses avocats, qui avaient démontré que les fonds incriminés servaient simplement à régler des dettes.

Une grâce étendue à d’autres détenus d’opinion

Cette vague de clémence présidentielle ne se limite pas au seul cas d’El Kadi. Elle touche également d’autres figures marquantes du journalisme et de l’activisme algériens. Parmi les libérés, on compte notamment Omar Ferhat, directeur d’Algeria Scoop, Sofiane Ghirous, son rédacteur en chef, ainsi que plusieurs militants reconnus tels que Mohamed Tadjadit, Othmane Mohamed, Samir Khitous, Sofiane Rabiai, Rabah Mahroyche et Aidouni Massinissa. Ces libérations simultanées témoignent de l’ampleur de la répression qui s’est abattue sur les voix dissidentes ces dernières années.

Car depuis 2019, l’Algérie a connu une détérioration constante de ses libertés fondamentales. Le recul du pays dans le classement mondial de la liberté de la presse, passant de la 136e à la 139e place sur 180 pays, illustre cette trajectoire préoccupante. Cette régression s’est manifestée à travers un arsenal répressif sophistiqué, combinant pressions légales et économiques. Des médias comme Liberté, Radio M ont été contraints au silence, tandis que de nouvelles lois draconiennes sont venues renforcer l’appareil répressif, prévoyant notamment jusqu’à 14 ans d’emprisonnement pour “réception de fonds étrangers”.

Le harcèlement judiciaire est devenu monnaie courante, s’appuyant sur des articles ambigus du Code pénal pour museler toute voix critique. Les cas de journalistes comme Mustapha Bendjama, Khaled Drareni et Rabah Karèche illustrent cette tendance aux condamnations exemplaires. En parallèle, le régime a perfectionné ses mécanismes de contrôle, utilisant notamment le levier de la publicité étatique pour exercer une pression économique sur les médias indépendants. Cette stratégie, couplée aux détentions arbitraires, a engendré une culture de l’autocensure particulièrement préoccupante.

La timing de cette grâce présidentielle, coïncidant avec le 70e anniversaire du début de la guerre d’indépendance, soulève des questions légitimes sur les intentions réelles du pouvoir. S’agit-il d’un véritable changement de cap ou d’une simple opération de communication ? La mobilisation internationale, illustrée par les plus de 10 000 signatures recueillies par Reporters sans frontières pour la libération d’El Kadi, montre que cette question dépasse largement le cadre national.

À l’heure actuelle, l’Algérie se trouve face à un choix crucial : poursuivre sur la voie de la répression ou renouer avec les valeurs de liberté qui ont façonné son histoire. Si la libération d’Ihsane El Kadi et de ses compagnons d’infortune représente indéniablement une avancée, elle ne constitue qu’une première étape sur le long chemin vers une véritable liberté d’expression.

ARTICLES SIMILAIRES

Á la une Algérie

Investissements : L’AAPI accélère ses réformes dans une course régionale serrée

Dans un contexte de forte concurrence régionale, l’Agence algérienne de promotion de l’investissement (AAPI) engage la deuxième phase de ses réformes. Cette nouvelle étape, centrée sur l’optimisation du guichet unique… Lire Plus

Actualités

Algérie : Hausse de l’euro sur le marché officiel

Contrairement au marché noir, l’euro reprend du terrain face au dinar algérien sur le marché financier officiel. En effet, le taux de change officiel du 25 décembre, est d’un euro… Lire Plus

Actualités Entreprise

Boissons énergisantes : un danger silencieux chez les collégiens, les écoles tirent la sonnette d’alarme

Les collégiens deviennent de grands consommateurs de boissons énergisantes, bien que ces dernières soient fortement déconseillées aux personnes de moins de 16 ans. L’alerte a été donnée le 12 décembre… Lire Plus

Actualités Commerce

Modernisation du commerce : Plus de 600 marchés “fantômes” au cœur de la bataille contre l’informel

Dans le paysage économique algérien, une situation paradoxale persiste où 618 marchés communaux et de wilayas, construits à grands frais, demeurent inexploités. Cette réalité, révélée par le ministre du Commerce… Lire Plus

Actualités Finances

Marché noir : baisse de toutes les devises face au dinar algérien

Un phénomène inédit est en train de se produire sur le marché noir de change des devises. Une forte baisse des cotations des devises étrangères face au dinar algérien qui… Lire Plus