L’économiste et ancien ministre des Finances, Abdellatif Benachenhou estime que le mode financement adopté, jusque-là, pour la réalisation des grandes infrastructures économiques a montré ses limites. Il suggère d’aller vers le financement mixte des projets d’infrastructure.
Lorsqu’on lui demande si l’économie algérienne est aujourd’hui en crise Abdellatif Benachenhou, qui était hier l’invité de Radio M, répond qu’il « n’aime pas beaucoup les mélodrames ». Ce dont il est sûr c’est que l’Algérie est un pays qui « consomme beaucoup et qui n’investit pas assez ». Un pays, qui au cours de la décennie écoulée « n’a pas participé à l’évolution technologique du monde en raison de son faible niveau d’investissement ».
Pas assez d’investissements productifs
Pour l’ancien ministre des finances d’Abdelaziz Bouteflika, notre pays a d’ailleurs moins un problème de volume de l’épargne que d’efficacité de son affectation. La structure de l’investissement algérien est aujourd’hui « dominée par l’Etat qui réalise plus de 60% de l’investissement national , tandis que le secteur de l’énergie en concentre près de 25% et le reste de l’économie entre 10 et 15% seulement ». Une structure qui « n’est pas satisfaisante parce qu’elle fait une place trop importante aux investissements réalisés dans les infrastructures économiques et sociales et pas assez de place aux investissements productifs ».
Des financements mixtes pour les grands projets d’infrastructures
Benachenhou suggère que la faute incombe en partie au mode de financement adopté pour la réalisation des grandes infrastructures économiques au cours de la dernière décennie. A ce propos, il affirme avoir plutôt défendu, jusqu’à son départ du gouvernement en 2005, l’option d’un « financement mixte de ce type d’infrastructures ». A l’image de l’autoroute Est –Ouest pour laquelle « on avait la possibilité de monter un financement mixte. L’Etat aurait pu apporter les terrains d’assiette, qui représentent près de 25% du montant de l’investissement, ainsi que les portions déjà existantes de l’autoroute, en laissant les partenaires financer le reste du projet ». Une formule, d’ailleurs envisageable pour les investissements à réaliser à l’avenir, et qui, outre la diminution du coût de réalisation pour le budget de l’Etat, aurait l’avantage supplémentaire « d’impliquer les partenaires dans la responsabilité de l’exploitation des infrastructures réalisées ».
Pour une « pause » dans la réalisation des grands projets
A l’étape actuelle, Abdellatif Benachenhou plaide plutôt en faveur d’une « pause dans la réalisation des grands projets d’infrastructures. Alger n’est pas l’Algérie et on devrait s’orienter davantage vers une meilleure couverture du territoire nationale à travers la réalisation d’équipements de petite et moyenne taille ». Pour lui, l’« extraordinaire portefeuille d’investissement réalisés depuis l’arrivée d’Abdelaziz Bouteflika n’est pas suffisamment valorisé ». « Quand les institutions multilatérales évoquent une efficacité marginale et insuffisante de ces équipements, c’est précisément, ajoute-t-il, parce que les infrastructures réalisées ne sont pas valorisées et restent aujourd’hui souvent des équipements gratuits » qui courent éventuellement de ce fait le risque d’une dégradation précoce. Benachenhou s’interroge également sur l’influence insuffisante voire la mise en sommeil d’une institution comme la Caisse nationale d’équipement pour le développement(CNED) chargée théoriquement de contribuer à la maturation des grands projets d’équipements publics et dont il avait initié la création.
Extraits vidéo : http://bit.ly/1vWm2XW
Ecouter l’émission: