Dans les études et analyses concernant l’évolution de l’économie mondiale, la Chine, on le sait, tient une place de choix. On parle moins de l’Inde qui est pourtant un sérieux compétiteur.
Une récente étude (payante*) du Centre for Economics and Business Research (CEBR) établit qu’en 2018, ce pays se classera au cinquième rang des économies mondiales devant la France et la Grande-Bretagne (classement établi en termes de produit intérieur brut, PIB, exprimé en dollars). Quant à la Chine, les experts de ce centre de recherche estiment que c’est en 2032, c’est-à-dire demain, qu’elle détrônera les Etats-Unis au sommet du classement.
Emergence asiatique
Ces dernières années, de nombreux concepts apparus au début des années 2000 ont subi de profondes remises en cause. On sait, aujourd’hui, que l’acronyme BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) est de plus en plus contesté par ceux qui estiment que ces pays ne seront pas capables de peser aussi lourdement sur l’économie mondiale qu’on ne le pensait il y a deux décennies. Et pourtant, il est une composante de cette prévision qui demeure entière. Année après année, vaille que vaille, la Chine et l’Inde avancent et gagnent des points. Ces deux pays illustrent l’émergence irrésistible de l’Asie et le fameux «recentrage du monde» dont, par exemple, se faisait l’écho l’ex-président Barack Obama quand il entendait justifier le retrait progressif de son pays des affaires du Moyen-Orient.
D’ailleurs, une autre hypothèse émerge aujourd’hui. D’ici cinquante ans, seuls les Etats-Unis et l’Allemagne figureraient dans le classement des dix premières économies mondiales. Exit donc la France, la Grande-Bretagne ou l’Italie et entrée en force de pays tels que l’Indonésie, le Vietnam ou la Thaïlande. Bien entendu, il ne s’agit que de prévisions mais il est indéniable que c’est à l’Est que tout se joue désormais. Or, pour les pays du Maghreb, les schémas intellectuels continuent d’être totalement orientés vers le Nord. Bien sûr, il y a des exceptions, mais si l’Algérie, comme le Maroc ou la Tunisie, ne veulent pas rater le train de la nouvelle donne stratégique du XXIe siècle, il leur faut «penser Asie». Cela passe par une réflexion profonde dans tous les domaines, à commencer par celui de l’éducation. Apprentissage des langues, dont bien sûr le mandarin, études de l’histoire et des cultures, échanges pédagogiques : il n’est pas trop tard pour densifier des liens qui demeurent modestes.
Le pari de la modernisation
Pour autant, la partie n’est pas totalement gagnée pour l’Inde et les autres pays asiatiques. Outre la question de la pauvreté endémique d’une partie de la population, c’est aussi celle de la modernisation des infrastructures, voire la construction de nouvelles, qui se pose. L’Inde, comme la Chine, a encore un sérieux retard en matière de transports, de réseaux d’assainissement des eaux ou de système de santé. C’est aussi de ce rattrapage nécessaire que viendra une partie de la création de richesses. Dans un contexte de relative stabilité politique, même si le pouvoir actuel du BJP continue d’inquiéter en raison de ses orientations ultranationalistes, l’Inde a donc toutes les cartes pour talonner à terme son voisin et rival chinois.
* World Economic League Table 2018, CEBR, 195 £, https://gcp.global/uk/products/welt-2018