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Algérie

L’industrie mécanique peine à démarrer en Algérie malgré des investissements massifs

Par Maghreb Émergent
avril 8, 2014
L’industrie mécanique peine à démarrer en Algérie malgré des investissements massifs

 RENAULT

L’Algérie investit massivement dans l’industrie mécanique, mais les résultats restent dérisoires par rapport aux besoins du pays.

 

 

 A côté du projet phare Renault à Oued Tlelat (Oran), qui devrait produire au rythme de 25.000 véhicules par an dès cette année, pour passer ensuite à 150.000, un tissu industriel s’installe laborieusement, sans pour autant permettre l’émergence d’un label algérien. Il s’agit essentiellement de projets menés par des entreprises publiques, en partenariat avec de grandes firmes étrangères. Certains sont très avancés. A Tiaret, un projet pour fabriquer des engins est sur le point d’entrer en production, selon le PDG de la holding publique « SGP mécanique » Mustapha Dehimi. Deux accords conclus avec la firme Mercédès devraient permettre de produire 16.500 camions et autocars par an pour le premier, et 25.000 moteurs pour le second.

Avec la firme Massey Ferguson, le holding public s’est lancé dans un projet pour fabriquer 5.000 tracteurs par an, avant de monter à 10.000. D’autres projets de moindre importance, pour fabriquer des moissonneuses batteuses (1.000 par an), des engins de travaux publics, ont été également lancés.

Renault, projet phare

Selon M. Dehimi, « toutes les échéances ont été respectées », en matière de réalisation, de formation, d’investissement et de préparation du personnel. Pour le projet Renault d’Oran, le premier véhicule devrait sortir d’usine en novembre prochain. A terme, la production montera en cadence pour atteindre 75.000 puis 150.000 dans une troisième étape. La gamme de véhicules produits sera élargie progressivement, pour quatre modèles, parallèlement au grand défi auquel sera confrontée l’industrie mécanique algérienne, le lancement d’un véritable réseau de sous-traitance.

Celle-ci est d’ailleurs considérée comme un défi majeur pour le secteur, selon un économiste. « Elle est à la portée d’entreprises de taille modeste », elle crée beaucoup d’emplois indirects, et elle permet « un transfert de savoir-faire, à défaut de transfert de technologie », dit-il. La partie algérienne table sur un taux d’intégration de 42% au sein de l’usine Renault quand celle-ci produira 75.000 véhicules. Mais au moment du démarrage, seules quatre pièces fabriquées en Algérie seront utilisées. Ce qui n’empêche pas M. Dehmi d’affirmer que « c’est une performance », et qui montre tout le décalage qui sépare encore les managers algériens de ceux qui font l’actualité mondiale.

Pourtant, les responsables algériens affirment haut et fort qu’il est possible d’aller très rapidement à un taux de 20% d’intégration pour l’usine Renault. Selon eux, tout ce qui est plastic, verre et câbles devrait être rapidement fabriqué localement. « A condition que les fabricants algériens répondent aux normes requises, ce qui n’est pas acquis ».

Seules les entreprises publiques

Le marché de la production est dominé par quatre grands opérateurs, tous portés par l’investissement public, selon M. Dehimi. Aux côtés de la holding publique SG mécanique, qui regroupe une quarantaine d’entreprises, on retrouve la SNVI Rouiba, maintenue en vie vaille que vaille malgré ses déficits abyssaux, la société mixte montée en partenariat avec Renault, et une chaine de sous-traitants, près de 500, dont beaucoup n’ont toutefois pas atteint le standard requis.

L’explosion du marché automobile, qui a atteint 560.000 véhicules importés en 2012, avant de se contracter en 2013, a alarmé le gouvernement, qui a décidé de relancer les investissements dans le secteur. Mais le privé ne suit pas. L’effort est donc porté essentiellement par les entreprises publiques. La SGP Mécanique a ainsi investi 41 milliards de dinars, dont près de la moitié sont déjà engagés. Le chiffre d’affaires des entreprises relevant de son portefeuille est passé de 17 milliards de dinars (170 millions d’euros) en 2009 à 52 milliards en 2013 (520 millions d’euros). Il devrait franchir la barre des 100 milliards de dinars (un milliard d’euros) en 2016. Malgré ces montants, les entreprises publiques ne devraient entrer sur le marché des véhicules légers qu’au début de l’année prochaine. Leur part globale devrait rester très modeste. Mais c’est surtout leur modèle économique qui inquiète, car leur capacité à être concurrentielle n’est pas évidente.

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 Une marge étroite pour l’industrie algérienne

 L’Algérie peut encore se lancer dans l’industrie automobile. Mais les choix sont restreints, affirme un ancien ministre de l’industrie

Comment mettre un pied dans le difficile marché de l’industrie automobile ? Un ancien ministre, très critique envers la démarche adoptée avec l’usine Renault d’Oran, affirme que plusieurs démarches sont possibles. L’Algérie peut développer « une stratégie maghrébine », en entrant en partenariat avec les entreprises marocaines et tunisiennes, pour « aborder ensemble marchés, capitaux, et intégration ». En ligne de mire, « une perspective d’ouverture africaine sur le produit bon marché ». L’Algérie apporterait ce qu’elle possède : des capitaux, une petite expérience dans la fabrication d’engins et camions, une main d’œuvre formée, une énergie bon marché, et un marché.

Elle peut aussi se lancer dans la production de véhicules « très bon marché, d’au moins 30% inférieure » au produit Renault qui sortira de l’usine d’Oran, pour des caractéristiques similaires. Ce type de véhicule peut être produit Algérie, et distribué au Maghreb et en Afrique, en partenariat avec des Chinois, des Sud-Coréens ou des Indiens, qui connaissent bien ce créneau. Ces choix, palliatifs, peuvent être envisagés après l’abandon de l’option la plus prometteuse définie lors de l’ouverture du marché algérien, il y a vingt ans. Le deal proposé alors aux constructeurs automobiles était d’accéder au marché algérien, en contrepartie de la fabrication locale d’une partie des pièces pour leurs besoins. Beaucoup de constructeurs étaient disposés à jouer le jeu, pour avoir le droit d’entrer sur un marché en pleine expansion, encore contrôlé par l’Algérie.

Mais aujourd’hui, « la capacité de négociation de l’Algérie a fortement diminué », note un économiste, qui rappelle la phrase prononcée en mai 2012 sur le ton de la moquerie par l’ancien premier ministre Ahmed Ouyahia, encore en poste à ce moment-là : « il parait qu’il y a un projet » en négociation avec Renault ».  Ahmed Ouyahia est revenu aux affaires, mais rien n’a changé. Ces choix que peut envisager l’Algérie ont un préalable : définir des choix économiques et industriels, et les assumer.  ABC

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