Pour le politologue Mohamed Chafik Mesbah, les USA ont joué un rôle important dans la reconduction de Bouteflika à la tête du pays en 2004 mais pas en 2014. L’ « Invité du Direct » de Radio M, la web radio de Maghreb Emergent estime que la première puissance mondiale a demandé au chef d’état-major de l’époque de laisser Bouteflika remporter l’élection espérant un possible soutien de l’Algérie au projet du Grand Moyen Orient.
La reconduction de Abdelaziz Bouteflika à la tête du pays a eu le soutien de la France, selon l’analyse de Mohamed Chafik Mesbah, politologue et ancien colonel du Département du renseignement et de la sécurité (DRS). « L’appui de la France à M. Bouteflika ne souffre d’aucune contestation », a-t-il indiqué ce mardi lors de son passage sur l’émission «Invité du Direct » de Radio M, la webradio de Maghreb Emergent.
Selon ses explications, ce sont les lobbies d’affaires et les hiérarchies militaires qui dictent la politique algérienne de la France. « Les lobbys d’affaires ont besoin de l’Algérie parce que c’est un marché important et les hiérarchies militaires ont besoin de l’Algérie dans leur stratégie de guerre au Sahel », a-t-il expliqué.
Pour les Etats-Unis d’Amérique, ils « ne sont pas intéressés au premier plan par la situation interne en Algérie », a précisé M. Mesbah. Il en veut pour preuve un fait saillant incarné par la visite du secrétaire d’Etat américain John Kerry à la veille de l’élection présidentielle (les 2 et 3 avril) qui a préféré diner avec Sid Ahmed Ghozali (à l’hôtel El Aurassi), ancien chef du gouvernement dont la position franche contre le 4e mandat de Bouteflika n’est pas à démontrer, alors qu’il devait séjourner dans une résidence d’état.
Pour l’ancien colonel du DRS, c’est à l’élection présidentielle de 2004 à laquelle s’est présenté Ali Benflis que les USA ont pu jouer un rôle dans la reconduction de Bouteflika à la tête du pays. Selon lui, une semaine avant le scrutin, l’ambassadeur US à l’époque avait demandé audience au chef d’état-major Mohammed Lamari. « Il (l’ambassadeur US lui avait dit que les USA ne voudraient pas que le scrutin soit perturbé. Décryptage : « laissez M.Bouteflika remporter l’élection », a-t-il précisé, ajoutant que la grande puissance mondiale, préoccupée à l’époque par la concrétisation du projet du Grand Moyen Orient qui avait essuyé des refus de la part de nombreux pays arabes, cherchait un soutien en Algérie.
Election présidentielle : il n’y avait pas de contrôle réel du scrutin
L’invité du Direct estime que c’est ce « fait » qui a bouleversé la donne en 2004, alors que l’Armée à travers son état-major incarné par le général Lamari farouchement hostile à une reconduction de Bouteflika.
Pour l’élection de 2014, Mohamed Chafik Mesbah conteste les résultats annoncés par le ministre de l’Intérieur. « Ce sont des chiffres décidés d’une manière administrative », a-t-il dit, d’autant qu’il n’y avait pas eu, selon lui, de contrôle réel du scrutin.
Sur la candidature de Benflis, le politologue estime qu’elle n’avait pas le soutien de l’Armée. « Je l’ai mis en garde (Benflis) avant qu’il ne se présente en lui disant que Bouteflika allait se présenter contrairement à ce que disait son entourage et qu’il ne permettras jamais une élection libre et transparente », a-t-il révélé, rappelant qu’il avait soutenu en 2004 parce qu’il voyait en lui un candidat « ouvert à tous les courants politiques » qui peut assumer la conduite de la transition politique à l’époque.