Pour la première fois depuis le début de la crise diplomatique entre Rabat et Paris, le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a exprimé jeudi son intention de se rendre prochainement au Maroc pour rétablir la coopération policière et judiciaire entre les deux pays.
Répondant à une question au Sénat français, M. Fabius a déclaré : « J’ai vu mon collègue, Salaheddine Mezouar, encore la semaine dernière. Nous nous sommes entretenus, nous avançons dans cet esprit de trouver des solutions pour rétablir les relations telles qu’elles n’auraient jamais dû cesser d’être avec le Maroc. Je compte me rendre, prochainement, personnellement dans ce pays qui, je le répète, est l’ami de la France ».
M. Fabius a également affirmé que les deux pays avançaient pour trouver des solutions afin de rétablir la coopération judiciaire, suspendue depuis près d’un an. Les accords de coopération judiciaire entre les deux pays sont suspendus depuis le 27 février 2014, une décision prise par Rabat pour protester contre le dépôt de plaintes pour « torture » et « complicité de torture » visant son chef du renseignement, Abdelattif Hammouchi.
Suite à cet incident, toute la coopération judiciaire avec le Maroc est suspendue depuis près d’un an, avec des répercussions au niveau civil pour les dizaines de milliers de Franco-Marocains, et au niveau pénal pour toutes les procédures judiciaires entre la France et le Maroc.
« Nous avons fait ce que nous pouvions pour essayer d’éteindre ces incidents. Les choses ne sont pas complètement rétablies mais c’est une nécessité absolue non seulement pour des raisons d’amitié que vous avez dites mais parce que, désormais, la coopération judiciaire, la coopération policière, ce n’est pas une option, c’est une obligation absolue par rapport aux phénomènes que vous avez décrits », a encore expliqué le ministre français.
Une coopération sécuritaire cruciale entre les deux pays
C’est la première fois depuis le début de la crise diplomatique que M. Fabius se rendra au Maroc. Le contexte international et la menace terroriste ont sans doute accéléré cette volonté de rétablir au plus vite les relations. Et la coopération sécuritaire, cruciale entre les deux pays qui ont chacun des centaines, voire des milliers de ressortissants tentés par le jihadisme ou enrôlés au sein du groupe Etat islamique (EI), souffre également de cette dispute, selon des sources à Paris et à Rabat, même si des canaux officieux demeurent.
D’autres accrocs entre la France et le Maroc ont eu lieu par la suite, et les tentatives d’apaisement n’ont pas pour l’heure permis de faire baisser la tension. « La coopération antiterroriste entre les deux pays est également fortement entravée », voire gelée depuis février 2014, selon des sources diplomatiques.
Dans un entretien accordé à l’hebdomadaire Jeune Afrique paru la semaine dernière, le ministre marocain des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar a dénoncé l’absence de détermination et de volonté politique de la France pour résoudre la crise diplomatique. Il avait aussi jugé que « le temps de la tutelle française » était révolu en critiquant le rôle de Paris dans la région sahélo-saharienne.
Pour rappel et au moment des attentats en France, Elisabeth Guigou, la présidente de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée nationale de France s’est rendue à Rabat pour désamorcer la crise. Reçue par le chef du gouvernement marocain Abdelilah Benkirane, Mme Guiguou a plaidé pour une reconnaissance de la Palestine défendue âprement par le Maroc et le roi Mohammed VI qui préside le comité Al-Qods (Jérusalem).