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La tournée de Mohamed 6 en Afrique de l’Ouest a confirme l’intérêt croissant du Maroc pour cette région (analyse)

Par Yacine Temlali
juin 28, 2015
La tournée de Mohamed 6 en Afrique de l’Ouest a confirme l’intérêt croissant du Maroc pour cette région (analyse)

Les échanges commerciaux entre le Maroc et les pays d’Afrique sub-saharienne ont crû annuellement de 12% entre 2003 et 2013, selon des chiffres publiés par le ministère de l’Economie. Les exportations vers cette région ont affiché une croissance plus marquée, à hauteur de 18% annuellement même si les volumes globaux restent modestes en termes absolus (moins de 7% du total des échanges du royaume).

 

 

La tournée du chef de l’Etat marocain en Afrique de l’Ouest et en Afrique Centrale au mois de mai a souligné l’intensification de la stratégie du pays qui vise à renforcer les échanges commerciaux et les relations en matière d’investissements avec ses voisins au sud du Sahara.

Le gouvernement marocain est passé à l’offensive ces dernières années pour étendre la présence économique du pays sur le continent africain, avec en fer de lance le Roi Mohammed VI, qui a effectué plusieurs voyages dans les marchés d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale. La délégation de ce mois de mai, qui comptait notamment des ministres et des personnalités du monde des affaires, s’est rendue successivement dans quatre nations d’Afrique de l’Ouest. Affichant des objectifs de facilitation des investissements et d’accroissement de la coopération économique, la tournée – la troisième du genre dans la région en l’espace de seulement trois ans- a fait étape au Sénégal, en Côte d’Ivoire, en Guinée-Bissau et au Gabon.

Cette dernière s’est soldée par la signature de dizaines d’accords de coopération, notamment dans le domaine technique, ainsi que par un certain nombre d’investissements de faible ampleur, et ce dans une large gamme de secteurs allant du soutien à l’agriculture en Côte d’Ivoire à la formation professionnelle au Sénégal.

 

Stratégie sur le long-terme

 

Ces nouveaux accords viennent s’ajouter aux contrats déjà signés entre le Maroc et des économies sub-sahariennes au cours des dernières années et s’inscrivent dans une stratégie plus vaste qui entend stimuler les échanges commerciaux et les investissements du pays dans la région.

Alors que l’Europe, principal partenaire traditionnel du Maroc, est toujours en proie à des difficultés économiques, le royaume chérifien a su ces dernières années retirer des avantages considérables de la situation par certains aspects, en renforçant notamment ses liens avec des partenaires commerciaux en dehors de la zone euro – l’Afrique y figurant en bonne place.

Résultat, les échanges commerciaux entre le Maroc et les pays d’Afrique sub-saharienne ont enregistré une hausse annuelle de 12% entre 2003 et 2013, selon des chiffres publiés par le ministère de l’Economie et des Finances, les exportations vers la région affichant une croissance encore plus marquée, à hauteur de 18% annuellement. Les volumes globaux restent toutefois modestes en termes absolus, représentant moins de 7% du total des échanges commerciaux.

Ce n’est pas faute d’essayer. Le royaume nord-africain a déjà accordé la clause de la nation la plus favorisée à huit économies d’Afrique de l’Ouest et six économies d’Afrique Centrale, mais si le Maroc parvient à avancer sur la question de l’accord de libre-échange (ALE) avec l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), attendu de longue date, il est fort probable que ces chiffres évolueront encore à la hausse.

L’UEMOA regroupe huit pays, dont le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Niger, le Mali et le Bénin – des marchés où des dizaines d’entreprises marocaines se sont déjà implantées dans le cadre de récentes stratégies d’expansion. Les échanges commerciaux avec l’UEMOA représentaient moins d’un dixième de l’ensemble des volumes l’an dernier, mais le pays a un excédent commercial considérable avec la région et la signature de cet ALE clé ne manquerait pas d’accroitre encore davantage l’attrait du Maroc en tant que base d’investissement vers de plus vastes régions du continent africain.

Dans un rapport daté de septembre 2014, le Ministère marocain de l’Economie et des Finances notait également que le pays envisageait de négocier des partenariats commerciaux avec la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest, composée de 15 membres, et la Communauté Economique et Monétaire des Etat de l’Afrique Centrale, qui en comporte six.

 

Renforcement des relations en matière d’investissements

 

Au cours des dix dernières années, on a également assisté à l’expansion d’entreprises marocaines – en particulier des institutions financières- sur le sol de l’Afrique sub-saharienne par le biais de nombreuses acquisitions à travers le continent. Les banques marocaines sont désormais présentes dans plus de 20 pays d’Afrique.

Les plus grandes banques du pays, dont Attijariwafa et la BMCE Bank, ont procédé à plusieurs acquisitions au lendemain de la crise financière mondiale, alors que les institutions financières européennes se retiraient des marchés émergents pour se concentrer sur les régions économiques clés. Cette dynamique n’a pas cessé depuis.

Parmi les exemples les plus récents, on peut citer l’acquisition par la BCP de 50% des parts du Groupe Banque Atlantique ivoirien, implanté dans huit pays d’Afrique. Si le Groupe Banque Atlantique se consacrait avant tout à des activités de banque d’affaires, la BCP a lancé en 2014 un projet pilote de banque de détail en Côte d’Ivoire et au Sénégal et compte, à terme, développer des banques de détail sur l’ensemble des huit pays.

Au vu des faibles taux de pénétration bancaire dans de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale, il existe un potentiel de croissance extraordinaire et l’enjeu de cette expansion africaine ne se limite pas simplement à une augmentation du vivier potentiel de clients de services bancaires. Nombreux sont les investisseurs étrangers qui investissent dans les banques marocaines, signent des alliances stratégiques avec ces dernières ou encore y ouvrent des lignes de crédit dans le but d’accéder ou d’investir indirectement dans des pays africains souvent considérés comme présentant un risque élevé.

Pour citer un exemple, en juin 2013 la Qatar National Bank a signé un partenariat stratégique avec Attijariwafa Bank afin de stimuler les flux d’investissements entre les institutions, et notamment de développer les intérêts de cette dernière au Sénégal, au Congo-Brazzaville, au Cameroun, en Côte d’Ivoire et au Gabon.

En fin de compte, le virage effectué par le Maroc, qui se détourne en partie de l’Europe pour développer davantage ses intérêts économiques en Afrique, offre non seulement aux investisseurs et exportateurs marocains de nouvelles opportunités à l’étranger mais augmente également l’attractivité du pays en tant que porte d’entrée vers la région.

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