Le Café Presse Politique (CPP), l’émission politique de Radio M, la web radio d’Interface médias, a eu lieu jeudi 5 novembre, avant la demande d’audience des « 19 » où des ex-proches de Bouteflika doutent de sa capacité à gouverner ou du moins d’être suffisamment informé. De manière prémonitoire l’un des intervenants avait relevé que Louisa Hanoune est passée au registre du président Bouteflika « qui ne sait pas ce qui se passe ». Souhila Benali, elle, n’a pas posé cette « vieille question ». Elle a lancé l’émission par une boutade au sujet du projet de révision de la Constitution : « Bouteflika serait-il en train de nous faire une démocratie dans le dos ? ».
Saïd Djaafer et Abed Charef restent sceptiques. En Algérie, la Constitution n’est pas destinée à être appliquée, note le premier. L’Algérie ne souffre pas du texte de la Constitution, mais de « vivre à côté de la Constitution » ajoute le second. Le projet de réforme qui n’est pas encore rendu public sert surtout au clan présidentiel à entretenir l’idée que Bouteflika pourrait organiser une « sortie par le haut » estime El Kadi Ihsane.
L’opposition piégée
Pour lui, l’idée d’une commission indépendante de surveillance des élections n’est pas anodine, le pouvoir se donne les moyens au cas où les choses se dégradent de dire que les mécanismes sont en place pour avancer. « Bouteflika prépare une constitution pour après lui, il ne la sort pas vite pour ne pas avoir à l’appliquer » ajoute El Kadi. Abed Charef l’exclut mais relève qu’en proposant la commission indépendante de surveillance des élections, le président Bouteflika piège l’opposition.
« Il offre cette commission à l’opposition en sachant que cela ne lui coute rien. Toutes les élections ont été gérées par une commission indépendante. Toutes les commissions avalisent le système de trucage. L’opposition s’est fait avoir. » Saïd Djaafer souligne pour sa part que les tenants du pouvoir ont un rapport au droit totalement biaisé. Il cite à cet effet des propos de feu Abdelhamid Mehri qui lui a dit que « depuis l’assassinat de Abane Ramdane, l’Algérie a un problème de respect des règles qui se prolonge jusqu’à aujourd’hui ».
Abane Ramdane… un symptôme
Cela a amené Souhila Benali à orienter la discussion sur les propos sur Abane Ramdane attribués à Daho Ould Kablia. Abed Charef pense que si l’Algérie avançait et n’était pas dans l’immobilisme, les déclarations de Ould Kablia passeraient pratiquement inaperçues. Said Djaafer qualifie ces déclarations de « chamailleries indécentes » et souligne que des aînés comme Hocine Aït Ahmed ont témoigné sur Abane Ramdane et son rôle avec un « sens historique élevé » qui dispense les jeunes de suivre ces polémiques.
El Kadi Ihsane rappelle pour sa part que Abane Ramdane est l’un de ceux qui ont posé les fondements de « l’Etat national jacobin centralisateur » absolument nécessaire dans le combat indépendantiste. Ce concept est aussi à la base de l’autocratisme algérien « où s’est nourrit » Daho Ould Kablia y compris dans sa carrière postindépendance.
La crise de Nidaa Tounes expliquée par Lotfi Madani
El Kadi Ihsane s’étonne par ailleurs de la mauvaise lecture que fait le régime marocain en lançant l’idée d’une « autodétermination de la Kabylie ». « Je suis ahuri par la faiblesse de l’analyse du Makhzen sur cette question… ». Saïd Djaafer souligne pour sa part que cette sortie de la diplomatie marocaine est « contreproductive » et dessert l’action de ceux qui veulent faire avancer la relation algéro-marocaine. Le « pouvoir algérien est content de cette déclaration, elle va le servir » ajoute El Kadi Ihsane.
En 2ème partie, Lotfi Madani, homme de médias établi en Tunisie, a donné de précieuses informations et analyses sur la crise qui secoue, Nidaa Tounes, le parti au pouvoir. Avec pour toile de fond la question de succession de Beji Caïd Essebsi, à la tête de l’Etat et du parti. Des explications à écouter impérativement pour ceux qui s’intéressent à la Tunisie où se joue, encore, l’unique transition démocratique en cours dans le monde arabe.
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