Le premier ministre par intérim et ministre de l’énergie et des mines Youcef Yousfi a bel et bien annoncé une hausse inévitable des tarifs de l’énergie en Algérie mardi dernier à Alger. Le scénario d’un tel ajustement existe. Deux Seules questions : sera-t-il mis en œuvre en 2015 ou avant ? Et par qui ?
Le démenti de Youcef Yousfi, selon lequel il n’a pas annoncé de hausse programmée des tarifs d’électricité en Algérie, suite à une dépêche de l’APS qui rapportait le contraire, a dénoué des langues dans le secteur de l’énergie et des mines. Maghreb Emergent s’est rapproché de deux sources fiables dans le secteur au fait des dossiers du ministère de l’énergie et des mines, de la commission de régulation de l’électricité et du gaz (CREG) et du groupe Sonelgaz : « le chemin économique de l’ajustement des tarifs de l’électricité mais aussi des carburants est prêt dans deux versions temporelles, l’une rapide l’autre plus étalée dans le temps, » a confirmé une des deux sources, tandis que l’autre a évoqué des résistances politiques depuis deux ans pour ne pas prendre le risque de mesures impopulaires.
Manque de courage politique
« Il existe un premier plan de hausse des tarifs qui date de 2009, mais l’éclatement de l’affaire Sonatrach et surtout la disgrâce de Chakib Khelil l’a fait avorter. Puis il y a eu le printemps arabe en 2011,» a expliqué cette seconde source. Il a été reproché à plusieurs reprises, en différentes situations, à YoucefYousfi de ne pas être suffisamment courageux politiquement pour défendre des prix de l’énergie plus réalistes, alors même que le DG de Sonelgaz,NourredineBouterfa, ne rate presque jamais une occasion pour rappeler que les tarifs actuels de l’électricité compromettent le plan d’investissement de Sonelgaz dans le moyen terme faute de fonds propres suffisants pour le financer.
Le ministre de l’énergie et des mines fait un lobbying très prudent pour sauver la solvabilité de son secteur. Les marges de Naftal dans la distribution du carburant sont elles aussi devenues incompatibles avec l’extension du réseau de distribution. « Il a fait actualiser par son équipe, plusieurs documents qui détaillent le scénario d’une hausse des tarifs année après année. Il sait que le niveau actuel des tarifs est un danger systémique pour l’Algérie. Je crois que c’est ce qu’il a voulu laisser entendre à l’hôtel Hilton devant les spécialistes et les étudiants de Polytechnique ». Le problème est que le premier ministre par intérim a peut être un peu oublié le contexte électoral tendu de la campagne présidentielle.
40 milliards de dollars de facture énergétique
La mouture de la dépêche de l’APS du mardi 08 avril rapportait, dans la bouche de Youcef Yousfi, que « les tarifs bas de l’électricité doivent augmenter d’une manière progressive et rationnelle en tenant compte du pouvoir d’achat des citoyens ».«Les tarifs bas « fixés par les autorités publiques » sont une décision politique prise pour favoriser le développement social du pays (…) bien entendu, cette situation ne peut pas durer éternellement », a-t-il déclaré. « Le citoyen doit contribuer un peu plus à la facture énergétique au fur et à mesure que son niveau de vie et son pouvoir d’achat augmentent », a affirmé Youcef Yousfi. Des propos que corroborent les autres journalistes présents, dont celui de Maghreb Emergent.
Le premier ministre par intérim s’est plaint également, de ce que la facture énergétique du pays « s’alourdit » d’année en année en raison d’une « hausse fulgurante » de la demande interne. Rien qu’en 2013, elle a coûté la bagatelle de près de 40 milliards de dollars. Elle sera de 80 milliards à l’horizon 2030. Le principal conseiller de Youcef Yousfi au ministère de l’énergie, Ali Hached, avait déjà appelé dans des termes voisins à ceux du ministre, à une nécessaire reconsidération du système des prix intérieurs de l’énergie, notamment du carburant. C’était le 31 octobre dernier lors de la conférence nationale sur l’énergie organisée par le FFS.