L’animatrice du Café presse politique (CPP), Souhila Benali, n’y croyait pas trop, ce jeudi 17 mars et pourtant Chakib Khelil est rentré en Algérie, quelques heures à peine après la fin de l’émission. Un retour que les journalistes du CPP pressentaient en s’interrogeant dès la matinée sur le sens de la réhabilitation en cours depuis plusieurs semaines de l’ancien ministre de l’Energie, cité dans le scandale de corruption de l’affaire Sonatrach II.
De l’affaire des missiles Stinger à El Oued au retour de Chakib Khelil à Alger, il n’y a qu’un pas que les journalistes du Café presse politique ont franchi lors de l’émission du jeudi 17 mars.
C’est Abed Charef, journaliste indépendant, qui a ouvert le débat en analysant « deux messages dans l’histoire de la saisie d’armes massives à El Oued ». « D’un côté, on dit aux Occidentaux qu’il y a des Stinger et des armes qui se baladent à la frontière ; de l’autre on nous dit aux Algériens que depuis le départ de Toufik Médiène, il y a six mois, la lutte antiterroriste est beaucoup plus efficace ».
Ihsane El Kadi, directeur d’Interface Medias éditrice de Maghreb Emergent, lui ne voit qu’un « seul agenda interne » : « Il y a l’alignement de deux agendas qui est de faire peur aux Algériens », affirme-t-il. « Dramatiser les risques contribue à entretenir le statut-quo », relève le rédacteur en chef de Maghreb Emergent en pointant une « inintelligence du clan présidentiel à vouloir tirer tous les dividendes à lui ».
« On assiste à une volonté de détricoter tout ce qu’a fait le DRS de Toufik à commencer par la corruption menée conjointement à la remontée de la campagne pour essayer de réhabiliter Chakib Khelil. C’est suffoquant », s’exclame Ihsane El Kadi.
« Scandaleux !», renchérit Saïd Djaafer, directeur éditorial du Huffington Post Algérie, estimant que « Chakib Khelil devrait au moins répondre à la justice algérienne ».
« Réhabiliter Chakib Khelil, c’est réhabiliter Saïd Bouteflika »
« Quel est intérêt du président Bouteflika à réhabiliter Chakib Khelil? » a poursuivi Abed Charef qui s’est dit intrigué par cette campagne. « Je ne trouvais pas de solution d’autant plus que le risque est énorme » a –t-il déclaré. « Jusqu’au moment où un ami économiste m’a dit une chose qui est évidente : réhabiliter Chakib Khelil, c’est réhabiliter Said Bouteflika ».
« Quand le Président Abdelaziz Bouteflika a eu son AVC il y a deux ans, le DRS a su que son frère Said était impliqué dans cette histoire », a développé le journaliste. « A travers la réhabilitation de Chakib Khelil, on cherche à effacer cette histoire », estime-t-il en relevant que « Saadani étant l’éclaireur du pouvoir depuis deux ou trois ans, il nous dit où l’on va aller ».
« Ce retour signerait en tous cas la 3e mort du général Toufik », a conclu Ihsane El Kadi.
Le Maroc a-t-il perdu une bataille au Sahara occidental?
C’est la question qui a occupé les journalistes du CPP en seconde partie de l’émission suite à la manifestation spontanée au Maroc contre le secrétaire d’Etat de l’ONU, Ban Ki Moon, qui a, à la suite des évènements ayant suivi sa visite au Sahara occidental a décidé d’annuler son voyage au Maroc.
« Le Maroc n’en finit pas de découvrir que l’ONU est tenue à ses résolutions : pour elle le principe même de l’autodétermination reste posée. », a analysé Saïd Djaafer. « Ban Ki Moon n’as pas dit quelque chose d’extraordinaire : le Maroc occupe le Sahara occidental de facto, en termes de droit, ce n’est pas reconnu, c’est une occupation », a-t-il développé. « Les Marocains réagissent mal à une déclaration qui est dans l’ordre des choses », a-t-il poursuivi en regrettant cette réaction d’autant que, selon lui, « le secrétait d’Etat n’était pas venu en se positionnant d’emblée du côté du Polisario mais pour faire avancer le dossier ».
Pour Akram Kharief, éditeur du blog « Secret Difa3 », cette hyper-réaction est un signe que le « Maroc sent que le dossier est en train de lui échapper car le statut-quo jouait en sa faveur ».
Malgré la tension, le fait que cette question revienne sur le devant de la scène est bon signe, a conclu Ihsane El Kadi. « Cela signifie qu’il existe encore des puissances pour rappeler une position de droit ». « Après que fait-on avec ça, il faut faire de l’ingénierie diplomatique », a-t-il suggéré.
Voir la vidéo de l’émission :
Ecouter le sonore :