Le dérapage de Peugeot confirme que le consommateur algérien reste vulnérable - Maghreb Emergent

Le dérapage de Peugeot confirme que le consommateur algérien reste vulnérable

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Face aux grandes marques qui dominent le marché en Algérie, le consommateur demeure vulnérable. La raison ? Une défaillance de l’administration et des associations de protection consommateurs ne font pas encore le poids.

Une banale affaire de défaut de fabrication sur le modèle Peugeot 301, mal gérée, s’est transformée en une épreuve pour l’automobiliste algérien. Les associations de consommateurs s’en sont emparées, les sites internet et les réseaux sociaux ont pris le relais , et l’affaire a fini sur la place publique, mettant la marque française dans l’embarras.
La nouvelle née de Peugeot, la 301, devenue rapidement très prisée en Algérie en raison de son prix d’entrée de gamme, a révélé une malfaçon à cause d’une poulie. Mais au lieu de jouer la transparence et d’annoncer publiquement le défaut, en prenant en charge la réparation, Peugeot s’est montré discret. La firme se contentait de prendre en charge les véhicules endommagés, dont les propriétaires se présentaient pour faire valoir la garantie. Un responsable de Peugeot Algérie a même évité de parler de défaut de fabrication, affirmant qu’il s’agissait d’une opération de « modernisation » du véhicule. Mais des clients de Peugeot ont confirmé la défaillance à Maghreb Emergent, précisant que Peugeot leur a recommandé de ne pas utiliser le véhicule jusqu’à ce que la pièce défaillante soit changée.
Cette affaire révèle bien la manière dont les marques traitent le client algérien, insuffisamment protégé. Selon M. Zebdi, président d’une association de consommateurs, l’automobile demeure le secteur le plus souvent mis en cause. Mais la contestation touche aussi d’autres produits, comme l’électroménager, l’immobilier, la téléphonie mobile, et même les médicaments sont concernés, a t-il déclaré à Maghreb Emergent.
Transparence insuffisante
«Les gens ignorent souvent leurs droits », affirme M. Zebdi, qui note « une transparence insuffisante dans les transactions », ainsi qu’un « manque de connaissance du marché et des produits » de la part des consommateurs. Du côté des entreprises, « la transparence sur l’offres est insuffisante », dit-il, ce qui met le consommateur dans une position d’inégalité face aux entreprises commerciales. Celles-ci font valoir, parfois à raison, que «personne n’oblige le consommateur à acheter», bien que dans certains secteurs, elle bénéficient d’une position dominante sur le marché, se n’est d’un quasi monopole. En l’absence d’une loi sur la publicité, « il faut avoir des arguments pour prouver » la faute d’une puissante entreprise.
Le consommateur n’est toutefois pas totalement démuni, en théorie. « Il s’agit plutôt d’un état d’esprit », nous dit un économiste. « Certains consommateurs trainent encore avec eux la crainte de la pénurie », dit-il, précisant que ce n’est pas seulement une impression, car on a réussi à créer les pénuries dans l’automobile pendant plusieurs années, avec des attentes qui dépassaient six mois ». Selon cet économiste, qui avait suivi l’établissement des concessionnaires, « il est inconcevable que le client paie une partie du prix d’un véhicule et attende six mois pour en prendre possession. Mais l’administration a laissé faire, mettant le client à la merci du fournisseur », dit-il, rappelant aussi que Djezzy avait vendu des cartes SIM plusieurs mois avant de lancer la téléphonie mobile en Algérie.
Progrès timides
Il suffit de se rendre auprès du service après-vente des compagnies automobiles, pour constater la vulnérabilité des clients. Et malgré le discours officiel, les progrès demeurent très timides, même si, selon M. Zebdi, de nombreuses actions ont abouti. Des entreprises, menacées de procédures judiciaires, ont accepté de retirer des publicités mensongères, dit-il. Pourtant, insiste-t-il, la règlementation est claire quand il s’agissait de concessionnaires automobiles. Le décret 07/390 prévoit qu’en cas d’immobilisation du véhicule de plus de quinze jours, obligation est faite au concessionnaire de fournir un véhicule de remplacement. A défaut, le client peut être indemnisé pour les journées durant lesquelles le véhicule a été immobilisé, sur présentation de factures ou de justificatifs de paiement. Mais plus généralement, les compagnies rechignent à reconnaitre leur faute. Et quand une compagnie redoute une publicité dommageable, elle accepte discrètement de dédommager ses clients.
La défaillance de l’administration est évidente sur ce dossier. A défaut d’imposer des règles strictes de respect du consommateur, elle pourrait soutenir les associations de consommateurs, qui n’arrivent plus à répondre au flux de plaintes qui se multiplient.

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