La plus grande victoire de Bouteflika est d’avoir rompu l’osmose qui régnait entre l’état-major de l’armée et le DRS du temps du général major Mohamed Lamari, estime Mohamed Chafik Mesbah. Cette victoire a conféré un ascendant de Bouteflika sur une partie des chefs militaires mais pas sur toute la chaine du commandement, nuance-t-il.
Le politologue Mohamed Chafik Mesbah est revenu ce mardi au cours de l’émission « Invité du Direct » de Radio M, la webradio de Maghreb Emergent sur le rapport de force cercle présidentiel-DRS.
L’ancien Colonel du DRS (direction du Renseignement de la Sécurité) affirme que la campagne qui visait à déstabiliser le chef des services de renseignements, le général Mohamed Mediène alias Toufik et qui visait à l’écarter de la scène n’est pas liée à sa présumée opposition au 4e mandat de Bouteflika.
Selon lui, ce qui a importuné le cercle présidentiel, ce n’est pas le rôle de police politique que joue DRS. « Ce qui les a indisposé sont les résultats des enquêtes sur la grande corruption parce que l’entourage du président a été mis en cause », a-t-il indiqué, estimant néanmoins que les services du général Toufik ont voulu posé dans les conclusions des enquêtes sur la corruption le problème en termes de survie du système et par conséquent des réformes à apporter.
Reconnaissant la capacité d’anticipation des services du général Toufik, l’ « Invité du Direct » estime que le DRS a compris que « le statu quo pouvait conduire à une implosion du système ». « Je pense que le chef des services de renseignements a exposé ces préoccupations. Ce qui a déplu au cercle présidentiel. D’où la campagne qui visait à déstabiliser le DRS et à l’écarter de la scène », a-t-il dit.
M. Mesbah qui pense qu’à aucun moment, le général Toufik n’était enclin à s’opposer au 4e mandat, dresse un profil d’un « officier discipliné » qui n’est pas « dans une logique de confrontation politique » qui a « exécuté » la suspension des enquêtes de grande corruption.
Bouteflika a rompu l’osmose entre l’état-major et le DRS
Sur le rapport de force au sein même de l’Armée, l’ancien colonel du DRS estime que Bouteflika a réalisé une grande victoire en « rompant » l’ « osmose » qui régnait auparavant entre l’état-major incarné par le général Lamari et le DRS du général Toufik. Selon lui, l’harmonie entre ces deux structures permettait de peser sur la décision. Ce qui n’est plus le cas aujourd’hui avec un commandement divisé. « Bouteflika a créé un fossé entre les deux structures que le cercle a encouragé », a-t-il précisé. Pour autant, Bouteflika n’a pas l’ascendant sur tout le commandement de l’Armée, a-t-il ajouté.
Selon lui, l’actuel président pourrait avoir des atouts sur quelques chefs militaires, citant le cas du chef d’état-major, Gaid Salah qui est devenu, d’après lui, un bras armé du régime. Cependant, si Bouteflika a un ascendant sur quelques chefs militaires qui lui doivent d’ailleurs leur position ce n’est pas le cas sur toute la chaine de commandement, observe le politologue.
Pour lui, il y a la catégorie de « chefs intermédiaires » que d’autres observateurs désignent par le vocable de « jeunes officiers », composée d’universitaires, patriotes et disciplinés qui peut jouer un rôle important dans le changement du système.
Cette catégorie d’officiers va se ranger du côté du peuple si ce dernier exprime des attentes légitimes pour une période de transition démocratique. « Si jamais demain la société est encadrée pour s’exprimer politiquement dans la rue, l’armée ne tirera pas », a-t-il assuré.