Souvenez-vous en ! ça s’est passé à peu près il y a un an et demi. Un « col blanc » et capitaine d’industrie, en l’occurrence l’ex-patron du groupe Renault-Nissan « prenait la tangente », alors qu’il était incarcéré dans une prison au Japon.
La nouvelle de l’évasion de Carlos Ghosn, ancien P-DG franco-libanais de Renault-Nissan avait choqué le monde entier et en particulier le Japon. A la fois emblématique et controversé, Ghosn n’imaginait pas finir ses jours dans les geôles de Tokyo, ou un procès chez la justice japonaise l’attendait.
Dans une interview accordée à la chaine BBC, il revient sur les tenants et les aboutissants de son évasion spectaculaire, digne des meilleurs thrillers américains.
Déguisement, dissimulation ou encore contorsionniste…En effet, toute la panoplie du parfait « fugitif » y est passé. Carlos Ghosn avoue avoir usé de nombreux subterfuges pour pouvoir échapper aux regards en se rendant à un aéroport, où un avion privé l’attendait, parmi lesquels un déguisement qui lui permettait de marcher dans le rue sans être démasqué.
Il lui fallait par la suite se déplacer en TGV pour se rendre à Osaka. « Le plan était que je ne pouvais pas montrer mon visage, donc je devais rester caché quelque part », a-t-il déclaré. « La seule façon de le faire était d’être dans une boîte ou dans un bagage pour que personne ne puisse me voir ou me reconnaître », se souvient-il. Le choix s’est finalement porté sur un étui d’instrument de musique, dans une ville qu’il disait pleine de concerts.
Pour Carlos Ghosn, il aura fallu se résigner à faire des choses « banales » auxquelles il n’avaient jamais songé. « Vous pouvez imaginer que j’ai dû aller dans des endroits où je n’étais jamais allé, acheter des vêtements que je n’avais jamais achetés auparavant », a-t-il concédé. Et d’ajouter : « Tout cela faisait partie de la manière de se donner un maximum de chances de réussir sans attirer l’attention sur soi. »
L’itinéraire qui devait mener Carlos Ghosn à cet aéroport d’Osaka synonyme de liberté pour lui, était truffé de pièges. Mais le moment décisif selon lui, était celui qu’il a passé dans ce caisson qui l’a transporté sous d’autres cieux plus cléments envers lui. « Quand vous entrez dans la boîte, vous ne pensez pas au passé, vous ne pensez pas au futur, vous pensez juste au moment présent ». « Vous n’avez pas peur, vous n’avez pas d’émotion sauf l’énorme concentration sur…C’est votre chance, vous ne pouvez pas la manquer. Si tu la rates, tu vas le payer de ta vie, de la vie d’un otage au Japon », a-t-il raconté.
Au final, le franco-libanais dira que la décision de s’évader de prison lui a semblé pertinente lorsqu’il ne pouvait plus communiquer avec sa femme carole, alors qu’il était à l’époque, assigné à résidence. Son cauchemar prenait fin lors d’une escale en Turquie, avant qu’il puisse enfin regagner le Liban, là où personne ne pouvait demander son extradition.
Pour rappel, Carlos Ghosn a été interpellé en 2018 par la police japonaise, dans le cadre d’une affaire financière portant sur des soupçons de malversations l’impliquant personnellement. Cette affaire suscite la controverse par les sommes en jeu pour l’opinion publique d’une part et la santé du secteur automobile d’autre part.
Chronologie de l’affaire :
- 19 novembre 2018 : première arrestation au Japon.
- 10 décembre 2018 : Carlos Ghosn est inculpé après une garde à vue de 22 jours pour avoir dissimulé aux autorités boursières japonaises des revenus de Nissan entre 2010 et 2015, non perçus mais disponibles pour son départ à la retraite, pour environ cinq milliards de yens (38 millions d’euros).
- 20 décembre 2018 : une troisième enquête judiciaire est ouverte au Japon pour « abus de confiance aggravé »
- 10 janvier 2019 : deuxième inculpation portant sur la dissimulation sur les revenus des années 2015 à 2018, pour un montant de quatre milliards de yens (31 millions d’euros).
- 4 avril 2019 : deuxième arrestation au Japon. Carlos Ghosn est de nouveau arrêté et placé en détention pour abus de confiance aggravé.
- 22 avril 2019 : quatrième inculpation pour abus de confiance aggravé.
- 29 décembre 2019 : fuite de C. Ghosn du Japon à Beyrouth, au Liban.