Grâce à un investissement de 10 milliards de dollars sur 10 ans, un projet de ville nouvelle industrielle au Maroc pourrait déboucher sur la création de 100 000 postes, et ainsi hisser le pays au rang de centre régional de production au cours des années à venir.
Fin mars, le roi Mohammed VI et la société aéronautique chinoise Haite ont conclu un accord de financement préliminaire portant sur la Cité Mohammed VI Tanger Tech, une ville industrielle et technologique chiffrée à 10 milliards de dollars, qui s’étendra sur 2 000 hectares à proximité de la ville de Tanger.
Le projet sera déployé en trois phases, et financé par Haite, la banque nationale BMCE et le gouvernement marocain ; néanmoins, les détails relatifs à la contribution financière de chaque partenaire n’ont pas encore été communiqués. Une fois le projet lancé, le gouvernement espère parallèlement attirer les investissements de quelque 200 multinationales.
En mars toujours, le roi Mohammed VI a initié la première phase du projet, qui verra la construction de 500 hectares de complexes industriels. Les deux phases suivantes seront marquées par la mise en place de services intégrés sur 500 hectares, puis la construction de logements résidentiels sur 1 000 hectares.
Les ambitions du projet
Dans le contexte des efforts déployés par le gouvernement pour développer les secteurs automobile, aéronautique et des transports, le parc industriel de la ville technologique ouvrira ses portes à des fabricants de pièces automobiles, d’équipement aéronautique et de produits routiers et ferroviaires.
Le parc a par ailleurs pour ambition de développer des technologies dans des secteurs à forte valeur ajoutée, notamment le commerce électronique, l’industrie pharmaceutique, les télécoms, le matériel informatique et l’équipement pour la production d’énergie renouvelable, ainsi que des sites de production d’appareils électroménagers, de matériaux de construction et de produits agricoles.
Les autorités espèrent voir les exportations dans ces segments de marché atteindre 5 milliards de dollars d’ici 10 ans. D’après la Banque mondiale, les exportations totales du pays ont été chiffrées à 22 millions de dollars en 2015.
Au terme du projet, qui devrait s’étaler sur 10 ans à compter du lancement de la construction, la ville technologique devrait pouvoir accueillir 300 000 personnes et créer 100 000 postes, dont 90 % seront alloués aux Marocains.
Tanger-Med
La ville technologique bénéficiera du développement considérable des infrastructures auquel le pays a œuvré ces dernières années : en 2016, le réseau autoroutier national s’étendait sur 1 772 kilomètres, un linéaire 17 fois plus important qu’en 2001.
Le potentiel d’exportation de la ville nouvelle émanera essentiellement des quatre zones franches de Tanger et de son port en eaux profondes, appartenant tous au complexe Tanger Med. Situé à moins de 15 kilomètres de l’Europe, le port Tanger Med sert de centre de transbordement et d’exportation. Il verra sa capacité plus que doubler pour atteindre 8,2 millions d’unités équivalents vingt pieds lorsque son second terminal, Tanger Med II, entrera en activité en 2018.
Ces développements s’inscrivent dans la lignée du vaste Plan d’accélération industrielle 2014-20, qui vise à porter la production industrielle à 23 % du produit intérieur brut (PIB) à l’horizon 2020 (contre 16 % l’an dernier), notamment en développant des grappes autour d’industries existantes, telles que l’aérospatial et l’automobile. Le Maroc espère ainsi que la ville technologique parviendra, grâce à son offre diversifiée, à attirer des acteurs industriels de premier plan, qui permettront la création de chaînes d’approvisionnement autour des nouvelles usines.
Des signes de progrès peuvent d’ores et déjà être observés. En septembre dernier, le gouvernement a signé un accord avec Boeing portant sur la création d’un parc industriel spécialisé dans l’aéronautique, afin d’encourager 120 fournisseurs à lancer des opérations dans le pays. Au mois d’avril, le constructeur automobile français Renault a signé une série d’accords avec des entreprises locales afin d’investir 10 milliards de dirhams (924,5 millions d’euros), qui devraient permettre de créer 50 000 emplois locaux.
Des stratégies bilatérales
La collaboration entre la Cité Mohammed VI Tanger Tech devrait par ailleurs renforcer les relations bilatérales entre la Chine et le Maroc. Une fois achevée, la ville pourrait constituer la dernière étape en Méditerranée sur la nouvelle route de la soie chinoise.
Alors que les nouveaux accords entre les deux nations pour définir les modalités futures du projet prennent forme, il est probable que les échanges financiers s’intensifient entre les deux pays, la Chine ayant besoin d’un nouveau point d’accès au marché européen, et le Maroc cherchant à attirer de nouveaux investissements et à dynamiser ses exportations.