Les autorités du port de Valence, en particulier, vont probablement suivre de très près le mégaprojet algérien. En effet, avec le nouveau projet, les flux de transbordement actuels pourraient dévier vers le sud et d’importants investissements étrangers, qui auraient sinon été destinés à la côte nord de la Méditerranée, pourraient être perdus.
En janvier, l’Algérie a annoncé son projet de développer un port maritime de plusieurs milliards de dollars à El Hamdania, près de la ville de Cherchell, soit un des plus importants projets d’infrastructure depuis son indépendance.
L’installation portuaire de 3,3 milliards de dollars s’étendra sur 2000 ha et sera située à moins de 100 km de la capitale, Alger. Elle devrait plus que tripler la capacité de manutention de fret actuelle de la nation, pour atteindre les 35 millions de tonnes par an. Aujourd’hui, les ports existants d’Alger et de Ténès ont une capacité combinée de 10,5 millions de tonnes par an, selon la presse locale.
Le nouveau port comptera 23 quais avec un débit annuel de 6,5 millions d’équivalents vingt pieds (EVP) et reliera les réseaux ferroviaires et routiers d’Algérie, devenant un centre de transbordement régional et national.
Implication de la Chine
La construction du port, qui se déroulera en deux étapes, sera menée par une joint-venture sino-algérienne, selon un accord signé mi-janvier entre le Ministère algérien des Transports, la China State Construction Engineering Corporation et la China Harbour Engineering Company.
Selon l’accord et conformément à la loi sur l’investissement étranger du pays, les partenaires chinois détiendront 49% du capital et le gouvernement algérien gardera une part majoritaire de 51%.
La construction du mégaprojet devrait prendre sept ans, avec le financement à long terme des coûts de construction assuré par la Chine.
Trajectoire commerciale
Cette collaboration n’est pas surprenante au vu du rapprochement depuis plusieurs années entre la Chine et l’Algérie sur le plan commercial et au niveau des investissements.
Alors que l’Europe demeure le premier marché d’exportation de l’Algérie en 2015, avec en tête l’Espagne, l’Italie et la France, la Chine, quant à elle, a maintenu sa place de premier importateur du pays pour la troisième année consécutive. Depuis une décennie, la Chine développe de plus en plus ses échanges commerciaux avec l’Algérie, avec une forte augmentation des volumes bilatéraux, qui sont passés de 608 millions de dollars en 2003 à 8,3 milliards de dollars comptabilisés en 2014.
La Chine a également participé à certains des plus importants projets d’infrastructure de l’Algérie à date, tels que l’autoroute Est-Ouest de 8 milliards d’euros, qui a été en partie construite par China Railroad Construction Corporation et China International Trust and Investment Corporation.
Plaque tournante chinoise
Le port devrait permettre à l’Algérie de drainer davantage de trafic chinois, alors qu’une compétition bat son plein dans la région pour attirer les activités maritimes du géant asiatique.
China Ocean Shipping Company (Cosco), une des compagnies maritimes chinoises les plus importantes, vise actuellement des ports de l’ouest de la Méditerranée afin de renforcer son rôle dans la région, selon les médias locaux. En 2009, l’entreprise a remporté une concession d’une durée de 35 ans pour exploiter deux terminaux à conteneurs dans le port de Pirée en Grèce, qui est devenu sa plaque tournante régionale pour l’est méditerranéen.
Cosco est actuellement en train de fusionner avec un géant maritime public chinois, la China Shipping Company. Avec un tel rapprochement, les deux entreprises formeront la quatrième compagnie maritime la plus importante au monde, contrôlant environ 8% du trafic maritime mondial.
Concurrence maritime
Le port de Cherchell a le potentiel d’altérer de manière significative les flux du commerce maritime dans l’ouest de la Méditerranée, alors que les ports régionaux, dont Valence, Algésiras et Barcelone en Espagne, et Gioia Tauro en Italie, concourent pour devenir la plaque tournante chinoise de l’ouest de la Méditerranée.
Les autorités du port de Valence, en particulier, vont probablement suivre de très près le mégaprojet algérien. En effet, avec le nouveau projet, les flux de transbordement actuels pourraient dévier vers le sud et d’importants investissements étrangers, qui auraient sinon été destinés à la côte nord de la Méditerranée, pourraient être perdus. Autant de facteurs qui pourraient impacter la levée de fonds et les opportunités de partenariats pour le projet d’expansion portuaire de Valence, dont l’appel d’offres est prévu à la fin de l’année.
Un volume significatif de cargaisons en vrac destinées à terme à l’Algérie font une première escale au port de Valence, qui gère aujourd’hui environ 4,5m d’EVP par an, où elles sont divisées en chargements plus petits pour la suite du transport. Avec de nouvelles installations, une grande partie du dégroupage pourrait ainsi être directement gérée par le nouveau port algérien.