La chronique hebdomadaire de El Kadi Ihsane sur El Watan s’est attardée sur le bilan d’Abdelmoumen Ould Kaddour après une année à la tête de la Sonatrach et la loi sur le e-Commerce qui arrive avec 10 ans de retard.
Cela va bientôt faire une année, Ould Kaddour Abderrahmane débarquait à la tête de Sonatrach. Le nouveau patron de la première compagnie algérienne a survécu à un premier choc.
Celui d’avoir à assumer son histoire sulfureuse. Il a réussi à déplacer la question en attaquant de front le premier. Tableau chaotique de la non-gestion de ce qui est pour lui «une administration et non une entreprise», présence physique directe et fréquente sur l’amont pétrolier par-dessus son top management, débordement hors périmètre de compétence en abordant les questions de fiscalité pétrolière à réformer. Abderrahmane Ould Kaddour est un manager du secteur public avec un logiciel du privé. Il n’a pas peur d’engager, de signer, de décider, de réagir.
C’est l’exact inverse de ce qui s’est déroulé à la tête de la compagnie depuis la chute du «Kheliland pétrolier». Ould Kaddour a réglé les contentieux pendants (raffinerie d’Alger, Eni), relancé les chantiers dormants dans le bassin du Touat Gourara et ailleurs dans les provinces historiques du sud-est. Il a tenté de stopper la saignée des cadres de la compagnie, amorcé le désengagement des activités non centrales pour Sonatrach.
Il a surtout demandé et obtenu de partager le rôle de promoteur du domaine minier algérien avec l’Alnaft, l’Agence dédiée à cette tâche. Atout évoqué, un lien direct avec les partenaires historiques de Sonatrach, qui sont les plus indiqués pour prendre à nouveau des risques sur les blocs non explorées après les échecs de 4 appels d’offres successifs. Ould Kaddour vient de signer un mémorandum d’entente avec Statoil et BP pour engager de nouveaux investissements ensemble. Il est l’interlocuteur direct des Américains d’Anadarko lorsqu’ils manifestent un intérêt pour l’exploitation des réserves de gaz de schiste en Algérie. Il se prononce sur le cadre légal de son activité et préconise de revoir en priorité le volet fiscal de la loi sur les hydrocarbures pour relancer l’attractivité de l’investissement des majors énergétiques en Algérie.
Le dernier PDG de Sonatrach à être aussi puissant s’appelait Chakib Khelil. Il était, certes, ministre de l’Energie en même temps. Mais qui peut affirmer aujourd’hui que Abderrahmane Ould Kaddour n’est pas l’homme fort du secteur de l’énergie en ce moment ? Au sens khelilien du mot ? Il faut, bien sûr, espérer que non.
Le patron de Sonatrach a toute la confiance des Bouteflika. Il leur doit son hallucinant come-back. Il restera à savoir si son audace dans le management qui est en train de sortir Sonatrach de la paralysie de ces dernières années mène à une croissance vertueuse de la compagnie. Et là surviennent en cascade les limites systémiques. Sonatrach ne travaille pas encore en 2018 sur la transformation de son modèle d’affaires.
Actifs carbone, énergie verte, digitalisation, recherche et développement, alliance amont-aval, prise d’actifs à l’étranger, nouvelle gouvernance. Trop en demander en une année au PDG qui n’a peur de rien ? Il faut bien le dire ici. Abderrahmane Ould Kaddour n’a pas donné le sentiment dans ses prises de parole publique de vouloir se situer à ce niveau de vision prospective. De vouloir ou de pouvoir ? Une enquête publiée par Huffington Post Algérie montre que contrairement à ce qu’affirme le CV affiché sur le site de Sonatrach, le PDG de la compagnie n’est pas PHD à MIT, prestigieuse université scientifique de Boston, mais «seulement» détenteur de Master. Ould Kaddour a de grandes qualités de persuasion. C’est ce qui a permis à BRC, la joint-venture qu’il a dirigée au début des années 2000 et qui lui a valu ses déboires, de vendre ses prestations à des prix exorbitants. Principal client embrouillé ? Sonatrach.
La loi sur le commerce électronique votée par l’APN la semaine dernière arrive dix années en retard. Le législateur n’en a pas profité pour la mettre à jour. Elle est donc vieille de dix ans. En effet, la loi est charpentée pour une activité de e-Commerce adossée à des sites internet. Seul sésame pour ouvrir droit à la capacité commerçante. Or, aujourd’hui plus de 80% du commerce en ligne se fait à travers l’internet mobile et ses terminaux smartphones et tablettes. Les développeurs au sein des start-up algériennes risquent en théorie d’être interdits de monétiser leurs solutions pour le public si elles n’ont pas un site internet sur lequel se fait la transaction.
Autre oubli de la loi, le f-Commerce qui passe par les plateformes des GAFA. L’actualité coïncide avec l’avènement d’un nouveau service sur Facebook qui permet d’acheter et de vendre en ligne à ses abonnés en Algérie d’abord sur le modèle de l’annonce vitrine, ensuite bientôt par paiement électronique. Conséquence fulgurante, le site de vente sur le web Ouedkniss vient d’être délogé par Facebook de la 4e place dans le classement Alexa des sites visités par les Algériens. En réalité, la loi réfléchit plus à contrôler les acteurs du e-Commerce du côté de l’offre de biens et de services que de réguler de manière équitable un instrument de digitalisation de la vie active des citoyens. Reste le plus inquiétant. Le gouvernement n’a toujours pas institué l’instance de certification de la signature électronique. La sécurité des transactions électroniques n’est toujours pas couverte légalement en Algérie. Personne ne veut s’y coller ? Normal, c’est le propre même d’une vacance de la gouvernance.En attendant, commercer sur internet est bien parti pour se faire au noir en Algérie. Atavisme résistant.
L’exclusion par la Cour européenne des territoires sahraouis de l’accord de pêche avec l’Union européenne est ici l’occasion de rappeler combien l’économie marocaine reste dépendante du secteur primaire. Ce ne sont pas les efforts de diversification qui ont manqué ces dernières années. Ils s’évaluent notamment dans les chiffres de l’exportation des biens manufacturés avec le passage à 14% des biens exportés classés à contenu de haute valeur technologique.
La production manufacturière a approché les 30% de la production domestique en 2017. Mais il a suffi d’une forte progression de la production agricole en 2017 par rapport à une récolte de 2016 sinistrée par la sécheresse pour impacter tout le tableau d’activité de l’économie marocaine. 2017 a donc été une année de rebond de la croissance grâce notamment à la pluviométrie appréciable du premier semestre de l’année. Un archaïsme persistant dans les notes de conjoncture du Haut commissariat au plan. Il divise son analyse en approche globale et hors agriculture. Comme en Algérie pour le hors hydrocarbures. Ceci pour rappeler qu’une politique de diversification des exportations met de longues années à modifier la structure d’une économie. Et que l’Algérie perd du temps à ne pas l’entamer sérieusement.