Maintenant que l’hypothèse de la sortie, sans violence, du système de gouvernance algérien, a été mise en échec par le pouvoir, il s’agira, selon Ahmed Benbitour, de définir les étapes d’une transition démocratique en Algérie.
D’emblée, Benbitour estime qu’une transition démocratique suppose qu’il y ait, à un moment ou à un autre, une négociation entre pouvoir et l’opposition. « Cela dépendra du rapport de forces qui sera construit », précise l’ancien chef du gouvernement, invité du « direct » de Radio M. Selon lui, il existe deux rapports de force : d’abord, entre les gouvernants et la rue et entre les gouvernants et l’opposition. « Dans les circonstances actuelles le rapport est très en faveur de la rue et je ne serais nullement étonné qu’il y ait une explosion sociale dans le pays,» prévient-il. Pour le rapport de force avec l’opposition, il faudra le construire dès maintenant « pour que demain si explosion sociale il y aura, une solution pourrait être trouvée contrairement à ce qui s’était passé en Libye, par exemple, où les choses étaient hors de maîtrise », souligne Benbitour.
Liamine Zeroual et le FFS seront sollicités
L’ancien chef de gouvernement et membre de l’Alliance nationale pour le changement (ANC), composée de plusieurs partis politiques, dont Soufiane Djilali de Jil Djadid, Mohcen Belabbes du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) et Abderazak Mokri du MSP, a démenti avoir eu des contacts avec l’ancien président Liamine Zeroual pour faire partie de cette coordination née le 5 février dernier. Il n’exclut pas néanmoins la possibilité de contacter M. Zeroual «pour être partie prenante de l’après conférence nationale pour le changement». « L’ancien président fait partie des personnalités qui ont une présence et une caution dans la société, » estime Benbitour.
En revanche, l’ANC a rencontré le candidat malheureux à la présidentielle d’avril 2014, Ali Benflis. « Nous nous sommes mis d’accord pour travailler ensemble sur toutes les questions qui concernent l’avenir du pays, »a-t-il dit, soulignant toutefois une divergence avec Benflis sur la démarche pour amorcer le changement démocratique : «Eux (Benflis et ses partisans NDLR) parlent de revenir à la légitimité populaire, c’est-à-dire les élections, car ils estiment avoir été spoliés d’une victoire à la présidentielle du 17 avril,» révèle Ahmed Benbitour, alors que la coordination propose une sortie via « transition démocratique négociée », à l’image de ce qui s’est passé en Espagne dans les années 1970. L’hôte de Radio M a également souligné que la coordination invitera le Front des forces socialistes (FFS) à faire partie de la conférence des 17 et 18 mai.
Les conditions pour une transition pacifique
Pour Benbitour, l’objectif commun de l’Alliance nationale pour le changement est «la sauvegarde de la nation algérienne qui est en danger». Un objectif qui ne peut être atteint qu’avec un changement du système de gouvernance, poursuit Benbitour.
Pour réussir cette ambition, il convient de réunir trois éléments importants à ses yeux : l’élargissement du cercle de mobilisation pour le changement, la mise en place des instruments et des mécanismes nécessaires pour y arriver, et sécuriser l’atteinte de cet objectif contre le statu quo et le retour en arrière.
La conférence sur le changement à laquelle appelle l’ANC est ouverte à tous les partis politiques et les associations de la société civile qui voudraient y prendre part. « Nous avons invité un certain nombre de personnalités et de partis politiques qui voudraient bien venir. S’ils viennent, c’est bien, dans le cas contraire, cela ne changera rien à l’initiative », a estimé Benbitour.