Le rapport des entreprises algériennes aux banques publiques ou privées reste compromis par la difficulté pour les premières d’accéder aux financements, devant la réticence des banquiers qui exigent des garanties.
«Ce problème se pose plus spécialement pour les jeunes promoteurs qui ne disposent pas de suffisamment de patrimoine à hypothéquer en guise de garanties à présenter aux banques », a constaté mardi Réda Hemiani, président du Forum des chefs d’entreprises (FCE) lors de la journée parlementaire organisée par le bureau de l’APN sous le thème « L’entreprise algérienne face à la banque, réformes et défis ». Pour Hemiani, au d’insurmontables démarches administratives pour créer leur entreprise, les jeune se heurtent à l’écueil « non moins insurmontable du financement car ils n’ont pas de patrimoine à engager, et par conséquent ils ne sont pas éligibles au crédit », a-t-il indiqué.
Des banques publiques au services des entreprises publiques
L’Etat ayant pris acte de cette situation, les caisses de garantie et les fonds régionaux ont été crées. Les 48 wilayas ont été dotées d’une assiette financière de un milliard de dinars chacune, «mais sans impact réel sur le terrain», constate encore le président du FCE. En 2009, l’Etat a mis en place le Fond national d’investissement (FNI) avec une dotation budgétaire de 150 milliards de dinars, cagnotte à laquelle une rallonge de 75 milliards de DA a été rajoutée l’année suivante. «La mission du fond était de soutenir les gros projets d’investissement et faire émerger les champions économiques. Résultat : rien. On a utilisé cette manne pour doter Air Algérie d’avions et soutenir la politique du médicament du groupement Saïdal. Aucune action n’a été engagée au profit du secteur privé », déplore Hemiani.
Comparée à ses voisins, l’Algérie fait figure de poids plume en matière de financements accordés aux entreprises par rapport au PIB national, selon Hemiani. Sur la période de 2006 à 2009, les financements aux entreprises accordés par le gouvernement algérien ont représenté 13% de son PIB soit l’équivalent de 5.000 milliards de dinars dont 2700 milliards DA pour le secteur public. Au Maroc, les financements aux entreprises ramenés au PIB étaient de 64% en 2009. La Tunisie a fait encore mieux avec 68% durant la même année. « Ce qui nous place largement en deçà du potentiel financier qui est dévolu à la création d’entreprises et à son financement », note Hemiani.
Changer de mentalité
De son côté, le ministre de l’industrie Amara Benyounès a reconnu que les banquiers ont du mal à s’adapter et à prendre des risques pour accompagner les promoteurs. Il appelle les banquiers à « changer de mentalité » et à aller vers plus de prise de risque avec les entrepreneurs. Il souligne toutefois que la dépénalisation de l’acte de gestion, sur laquelle une réflexion est engagée au niveau du Premier ministère, ne signifie pas donner le quitus aux gestionnaires du secteur public notamment les banquiers. «On ne peut pas donner un chèque à blanc en matière de gestion », a-t-il dit. Car, en tant que membres du gouvernement nous sommes en devoir de protéger les intérêts de l’Etat algérien », a précisé le ministre. « Les patrons trouvent en effet que nous n’allons pas très vite et les banquiers ont du mal à s’adapter. Mais je pense qu’il y a une prise de conscience et nous sommes tous d’accord que l’entreprise doit être au cœur du projet économique ».
Financer les entreprises qui réussissent
De son côté l’économiste Abdelhak Lamiri a répondu à Benyounès en lui suggérant de financer plutôt les entreprises qui réussissent que celles qui sont en difficulté. Il affirme que l’Algérie dispose d’un système financier à 90% public, qui consacre l’essentiel de ses activités à l’importation et un volume important de ses volumes à financer les entreprises publiques déstructurées qui n’ont aucune chance d’améliorer leur efficacité et rembourser leurs crédits.