Les membres du Conseil de la Nation ont adopté mercredi à une majorité écrasante le projet de loi de finances 2016. Cette loi de finances, qui sera signée la semaine prochaine par le Président de la république, ouvre le capital des entreprises publiques aux investisseurs privés.
Sans surprise, la loi de finances 2016 a été adoptée à l’unanimité par les membres du Conseil de la Nation: 121 pour et 2 contre! Le projet de loi avait été adopté le 30 novembre dernier au Parlement au cours d’une séance marquée par de violentes protestations des groupes parlementaures de l’opposition, dont celui du Parti des travailleurs, qui avaient tenté de bloqué le vote. Ailleurs dans les milieux médiatiques, spécialisés et universitaires, des réactions mitigées sur cette loi de finances avaient été enregistrées. Elle a été qualifiée d »’impopulaire » par les partis de l’opposition, et servant les intérêts de »l’oligarchie ».
Techniquement, cette loi est basée sur un prix de référence du baril du pétrole à 37 dollars et un taux de change de 98 DA pour 1 dollar. Une prudence du gouvernement prise alors que le prix du brut sur les marchés poursuit depuis le second semestre 2014 une lente décrue.
La LF2016 table ainsi sur une croissance hors-hydrocarbures de 4,6%, une inflation contenue à 4%, un solde global du Trésor déficitaire de 2.452 mds DA et des réserves du Fonds de régulation des recettes (FRR) de 1.797 mds de DA à fin 2016. Les importations prévues seront en hausse à 54,7 milliards de dollars, et un recul des exportations des hydrocarbures à 26,4 milliards de dollars. Les dépenses budgétaires seront de de 7.984,1 milliards Da (mds DA) dont 4.807,3 mds DA pour le fonctionnement et 3.176,8 mds DA pour léquipement, soit une baisse de 9% par rapport à 2015. Quant aux recettes budgétaires, elles sont estimées à 4.747,43 mds DA composées de 3.064,88 mds DA de recettes ordinaires et de 1.682,55 mds DA de fiscalité pétrolière.
Entreprises à vendre
Lors de sa discussion au niveau du Parlement, cette loi de finances avait provoqué un tollé général, notamment l’article 62, relatif à l’ouverture du capital des entreprises économiques publiques à l’actionnariat national. Celui-ci stipule que « les entreprises publiques économiques, qui réalisent des opérations de partenariat à travers l’ouverture du capital social en faveur de la participation de l’actionnariat national résident, doivent conserver au moins 34% du total des actions ou des parts sociales ». En outre, « l’actionnaire national résident peut détenir ces actions sur une période de cinq ans. Après une expertise juridique sur le respect des engagements souscrits, il est possible de soumettre au Conseil des participations de l’Etat (CPE) l’option de l’achat du reliquat des actions ».
L’autre article qui a soulevé une forte polémique, est l’article 71, qui introduit un mécanisme d' »équilibre budgétaire » permettant au ministre des Finances, à travers des décrets d' »ajustements », de geler ou d’annuler des crédits destinés à la couverture de dépenses « en cas de détérioration des équilibres généraux ». Cependant, « le ministre des finances doit fournir au Parlement à la fin de chaque exercice budgétaire un exposé global sur les opérations d’ajustement ». Cet article avait été violemment dénoncé par les partis d’opposition selon lesquels le gouvernement peut sans recourir au Parlement geler des projets et réaffecter leur budget à d’autres secteurs.
Les réserves du gouvernement
Le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa, qui a défendu avec »bec et ongles » son PLF 2016, a cependant reconnu l’existence de « risques à moyen et long termes sur les équilibres budgétaires ». L’inquiétude du ministre est motivée par des indicateurs macroéconomiques qui devraient se dégrader en globalité durant l’année 2016. C’est ainsi qu’en évoquant le cadrage macroéconomique du PLF 2016, le ministre des Finances parle de la baisse des revenus issus de l’exportation d’hydrocarbures. Ces derniers devraient ainsi s’établir à 26,4 milliards de dollars en 2016, contre une prévision de clôture de 33,8 milliards de dollars en 2015. Le premier argentier du pays a également évoqué le niveau des réserves de change qui risquent de passer de 151 milliards de dollars en 2015 à 121 milliards à fin 2016. Un niveau qui représente 23 mois d’importations. Des chiffres qui ne semblent pas entamer pour autant l’optimisme du ministre des Finances, qui estime que « ce niveau de réserves est plus important que ce dont disposent de nombreux pays. «Encore faut-il préserver ces réserves et ne pas alimenter les importations», a ajouté prudemment M. Benkhalfa. Autre chiffre inédit annoncé par le ministre des finances, le gouvernement table sur un déficit budgétaire de 12% en 2016.