Le gouvernement marocain a reçu une volée de bois ce mercredi avec la tenue d’une grève préventive d’une journée observée par les syndicats de gauche, rejoints par l’association Al Adl Wal Ihsane, de partis de gauche et même des journalistes marocains.
L’appel à la grève préventive d’une journée des trois syndicats proches des partis de la gauche marocaine, l’Union Marocaine du Travail (UMT), la Fédération Marocaine du Travail (FDT) et la Confédération marocaine du travail (CDT), rejointes par l’UGTM et l’association islamiste (tolérée) Al Adl Wal Ihsane a été largement suivi. Décrété pour ce 29 octobre, ce débrayage désavoue la politique sociale du gouvernement, dirigé par le parti islamiste (modéré) Justice et Développement (PJD), et met en avant de ses revendications la reprise du dialogue social, en panne depuis avril 2011. Dans un communiqué rendu public samedi dernier, les trois syndicats rappellent que ce débrayage intervient après »épuisement de tous les moyens pour amener le gouvernement à engager un dialogue tripartite ». Pour les trois syndicats, »le gouvernement est incapable de répondre positivement aux doléances des salariées et des citoyens ». Organisé sous forme de sit-in devant le parlement à Rabat, ce débrayage préventif a été décidé »pour protester contre la politique du gouvernement et sa gestion du dialogue social », rappelle la CDT dans un communiqué.
Dialogue à relancer
L’une des revendications des syndicats, est la reprise du dialogue social avec le gouvernement et le patronat sur les grandes questions économiques et sociales du pays. Les trois partenaires ne s’étaient plus réunis depuis avril 2011, après la décision du chef du gouvernement Abdelilah Benkirane de reporter le sommet social, au cours duquel devaient être discutées les principales revendications des syndicats marocains. Ces revendications, portées par l’UMT, la FDT et la CDT, portent principalement sur la nécessité de mettre en œuvre tous les engagements pris par l’exécutif notamment ceux en suspens, relatifs à l’accord du 26 avril 2011, dont l’augmentation des salaires et des pensions, la réforme du système de retraite, outre le respect des libertés collectives et individuelles, particulièrement la liberté syndicale et le droit de grève. La réforme de la caisse de compensation des prix administrés, dont ceux des produits pétroliers, est également dans le collimateur des syndicats. La CDT a particulièrement dénoncé la »dégradation des conditions sociales et économiques de la classe ouvrière, la menace de la paix sociale, la marginalisation » des organisations syndicales ainsi que les décisions prises « de façon unilatérale et injuste » sur les grandes questions qui nécessitent un dialogue collectif. La dernière augmentation salariale au Maroc a été décidée à la veille des festivités du 1er Mai 2013. Le gouvernement avait annoncé une hausse de 10%, en deux tranches, du Salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) et du salaire minimum agricole garant (SMAG), soit 5% à partir du 1er juillet 2014 et 5% en juillet 2015. Du coup, le SMIG dans le secteur public remonte à 3.000 DH par mois (300 euros environ), un peu plus que dans le secteur privé, avec moins de 2500DH/mois.
Surdité gouvernementale
Le gouvernement a, de son côté, jugé »incompréhensible » l’appel à cette grève préventive. »Le gouvernement estime que la grève à laquelle ont appelé plusieurs syndicats, pour protester notamment contre la réforme du régime de retraite, est non justifiée et incompréhensible », a indiqué Mustapha El Khalfi, porte parole du gouvernement. Le chef du gouvernement a même estimé, lors de l’examen du projet de loi de finances 2015, que cette grève »n’est pas une solution » aux questions en suspens. Pour autant, il a affirmé que »le gouvernement poursuivra la mise en œuvre des réformes », dont celle du régime de retraite. Défiant les syndicats, Benkirane ajoute: »les tentatives constantes visant ébranler et perturber le gouvernement (ne) l’empêcheront pas de mettre en œuvre les réformes nécessaires ».