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Algérie

Licences d’importations, éviter les mauvaises interprétations (Contribution)

Par Maghreb Émergent
18 juillet 2017
Licences d’importations, éviter les mauvaises interprétations (Contribution)

Dans cet article, le Pr. Abderrahmane Mebtoul répond à son confrère, l’économiste Mouloud Hedir au sujet de la question des licences d’importations. Le texte de Mouloud Hedir était lui-même une réponse à un article du PrMebtoul paru dans le journal l’Expression.

 

Le gouvernement algérien a instauré des licences d’importation pour un certain nombre de biens et services afin de limiter les transferts de devises en cette période de crise économique. Une situation jugée utile et nécessaire par les pouvoirs publics, qui suscite tout de même des inquiétudes de la population et des opérateurs nationaux et étrangers quant aux pénuries et aux spéculations sur les prix de certains produits, comme c’est le cas pour des pays dont l’économie dépend principalement des recettes des hydrocarbures, à l’instar du Venezuela. Et s’enfermer dans une gestion administrative autoritaire qui conduirait l’Algérie comme du temps du gouvernement Belaid Abdesselam 1992/1993, droit à la cessation de paiement 2019/2020. Pour éviter toute confusion de la part des tenants de la rente, induisant en erreur l’opinion nationale et internationale, certains affirmant faussement que le nouveau Premier ministre serait guidé par une gestion administrative des années 1970. Or, nous sommes en 2017, et cela ne saurait en aucune manière s’assimiler aux modalités des anciennes licences d’importation des années 1970/1980. Selon plusieurs communiqués officiels du gouvernement algérien, reprises par l’agence APS : « l’Algérie se conformera aux règles régissant le commerce international dont l’OMC, qui prévoient des restrictions quantitatives lorsqu’un pays a des difficultés de balance de paiement ».

La notion de licence selon les règles de l’OMC

Les licences d’importation peuvent être définies comme étant des procédures administratives qui exigent, comme condition préalable à l’importation de marchandises, la présentation à l’organe administratif compétent d’une demande ou d’autres documents (distincts des documents requis aux fins douanières). Les procédures de licences automatiques ne doivent pas être administrées de façon à exercer des effets de restriction sur les importations et aucune discrimination ne doit être faite entre les personnes ou entités demandant des licences automatiques. Toutes les personnes remplissant les conditions légales prescrites devraient pouvoir, dans des conditions d’égalité, demander et obtenir des licences d’importation. On entend par licences d’importation non automatiques les licences d’importation qui ne répondent pas à la définition des licences d’importation automatiques (article 3:1). Les licences non automatiques ne doivent pas exercer, sur le commerce d’importation, des effets de restriction ou de distorsion s’ajoutant à ceux que causera l’introduction de la restriction, et doivent correspondre, quant à leur champ d’application et à leur durée, à la mesure qu’elles servent à mettre en œuvre (article 3:2). L’article VIII du GATT (intitulé Redevances et formalités se rapportant à l’importation et à l’exportation) traite des procédures de licences d’importation de manière non spécifique. Le paragraphe 1 c) établit, en ce qui concerne les formalités, une obligation générale aux termes de laquelle les membres reconnaissent la nécessité de réduire au minimum les effets et la complexité des formalités d’importation et d’exportation et de réduire et de simplifier les exigences en matière de documents requis à l’importation et à l’exportation. Le paragraphe 2 fait obligation à chaque membre « d’examiner l’application de ses lois et règlements compte tenu des dispositions du présent article » à la demande d’un autre membre. Le paragraphe 3 fait interdiction aux membres d’imposer « des pénalités sévères pour de légères infractions à la réglementation ou à la procédure douanières ». L’article X fait obligation aux membres de publier dans les moindres délais les lois, règlements et décisions judiciaires et administratives d’application générale, y compris celles visant les prescriptions relatives à l’importation ou à l’exportation et de les appliquer d’une manière uniforme, impartiale et raisonnable. Le Code du Tokyo Round intitulé Accord relatif aux procédures en matière de licences d’importation était l’un des accords visant les mesures non tarifaires conclus au cours des négociations commerciales multilatérales tenues entre 1973 et 1979. Ce code est entré en vigueur le 1er janvier 1980 avec pour objectif d’empêcher que les procédures en matière de licences d’importation n’entravent indûment le commerce international. En tant qu’accord distinct, ce code n’était contraignant que pour les seuls pays qui l’avaient signé et ratifié. Au cours du Cycle d’Uruguay il a été révisé pour renforcer les disciplines relatives à la transparence et aux notifications. L’Accord révisé est entré en vigueur le 1er janvier 1995, il a force obligatoire pour tous les membres de l’OMC. Ainsi, les membres doivent appliquer les procédures de licences d’importation avec neutralité et les administrer de manière juste et équitable (article 1:3). Les demandes ne doivent pas être refusées en raison d’erreurs mineures dans la documentation ou faire l’objet de fortes pénalités en cas d’omissions ou d’erreurs dans les documents ou dans les procédures qui sont manifestement dénuées de toute intention frauduleuse ou ne constituent pas une négligence grave (article 1:7). Les marchandises importées sous licence ne doivent pas être refusées en raison d’écarts mineurs en valeur, en quantité ou en poids par rapport aux chiffres indiqués sur la licence attribuables à des raisons compatibles avec une pratique commerciale normale (art1:8).

L’Algérie respectera ses engagements internationaux

Aussi, pour éviter toute confusion, l’introduction des licences en Algérie ne doivent pas être calquées sur les modalités des anciennes licences d’importation source de corruption et d’enrichissement d’une minorité. L’Algérie devant respecter ses engagements internationaux et se conformer avec les règles régissant le commerce international qui prévoient des restrictions quantitatives lorsqu’un pays membre a des difficultés de balance de paiement. Les accords internationaux stipulent que les licences d’importation sont des procédures administratives exigeant, comme condition préalable à l’importation de marchandises, la présentation à l’organe administratif compétent d’une demande qui est distincte des documents requis aux fins douanières, le gouvernement devant préciser que ce genre de licence n’entraîne pas une restriction ou une distorsion des importations. A la différence du régime restrictif de licences appliquées auparavant en matière d’importation, ces licences sont définies comme des procédures administratives dans les règles de l’OMC et visent à assurer une meilleure qualité et sécurité des produits afin de préserver la santé humaine, animale et végétale, à veiller sur la loyauté des transactions commerciales, et ce, que ce soit entre la communauté des commerçants eux-mêmes lorsqu’il font leurs échanges ou entre le détaillant et les consommateurs alors que l’ancien régime avait pour but la répartition d’un montant de devises sur des importateurs. L’Algérie, selon nos sources, tout en préservant ses intérêts propres comme tout pays, entend se conformer aux accords internationaux, notamment l’Accord d’association avec l’Europe, les négociations avec l’OMC, dont il n’est nullement de remettre en cause, afin de ne pas discréditer l’image de l’Algérie au niveau international. La liberté du commerce et de l’industriel est le fondement de la politique économique et commerciale du gouvernement algérien, consacrée par l’ensemble des dispositions de la législation algérienne. Dans ce cadre, cette législation à l’instar de ce qui est prévu par les législations de plusieurs pays à économie ouverte en Europe et ailleurs , la possibilité de recourir dans des cas précis et prédéfinis, période de transition, afin de mettre à niveau l’appareil productif, aux licences d’importation ou d’exportation neutres dans leur application et administrées de manière juste et équitable, pour gérer des exceptions à cette liberté du commerce et ce en conformité aux règles du commerce international. Le nouveau gouvernement entend durant cette phase difficile de tensions budgétaires, rationaliser les dépenses, ce qui ne signifie pas interdire ce qui serait contraire aux principes de la nouvelle constitution et de ses engagements internationaux. L’actuel premier ministre avait déclaré officiellement au moment où il assurait l’intérim du ministère du commerce je le cite: « nous ne réduirons pas d’un kilogramme tout ce qui est importé en matière de légumes secs, de céréales, d’huile et de sucre. Pour les autres produits, la qualité serait exigée en premier lieu». Selon mon point de vue le débat est ailleurs : avoir une vision stratégique de l’Algérie 2017/2020/2030 et comment avec la chute du cours des hydrocarbures qui sera de longue durée, approfondir les réformes structurelles pour une stratégie hors rente. Il ne suffit pas de restreindre uniquement les importations, mais aussi de lutter, contre les surcouts, la mauvaise gestion, la corruption et entamer rapidement les véritables réformes structurelles conciliant efficacité économique et une profonde justice sociale, condition sine qua non d’une production et exportation hors hydrocarbures dans le cadre des valeurs internationales. Je réitère la proposition que j’ai faite entre 1982/1983 lorsque je dirigeais le département des études économiques et le département des contrats, en tant que haut magistrat, premier conseiller à la Cour des comptes, chargé du dossier des surestaries par la présidence de l’époque, lors du programme anti-pénurie de l’époque d’une structure, chargé d’un tableau de la valeur en temps réel, (qui n’a jamais été mis en place car touchant d’importants intérêts de rente), sous l’égide du Premier ministre, supposant un système d’information reliés aux réseaux internationaux, permettant des interconnexion ministère des finances ( banques)- douanes- fiscalité, les port/ aéroports , entreprises publiques/privées et l’organisme de la statistique de la douane et l’ONS pour lutter contre les surfacturations et les trafics de tous genres (produits de mauvaises qualités ou périmés).

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