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L’unique raffinerie du Maroc risque d’être fermée par décision de justice

Par Nabil Mansouri
octobre 29, 2018
L’unique raffinerie du Maroc risque d’être fermée par décision de justice
Une source qui maîtrise parfaitement le dossier a indiqué à Maghreb Emergent que le tribunal avait autorisé la poursuite de la situation actuelle de la raffinerie jusqu’à la fin de ce mois d’octobre 2018, avant de se prononcer pour la fermeture ou la reprise de la Samir.

Depuis l’été 2015 et suite à une procédure de saisie lancée par la douane, l’unique raffinerie du Maroc, la Société anonyme marocaine de l’industrie du raffinage (Samir) est à l’arrêt avec des dettes bancaires et obligataires s’élevant à quelque 1,84 milliard d’euros.

Le tribunal de commerce de Casablanca a prononcé en 2016 la décision de liquidation judiciaire associée à une autorisation de continuité d’activité. Mais, deux ans après cette annonce et une année après la publication de l’appel à manifestation d’intérêt pour le rachat des actifs de la raffinerie, le dossier n’a toujours pas trouvé d’issue.

Une source qui maîtrise parfaitement le dossier a indiqué à Maghreb Emergent que le tribunal avait autorisé la poursuite de la situation actuelle de la raffinerie jusqu’à la fin de ce mois d’octobre 2018, avant de se prononcer pour la fermeture ou la reprise de la Samir.

« Une décision de fermeture de la raffinerie provoquera le licenciement du personnel et le démantèlement de la raffinerie (vider les bacs, se  débarrasser de l’azote etc.) », a souligné notre interlocuteur en ajoutant que « l’arrêt de la raffinerie voudrait dire qu’elle ne pourra être remise en marche sauf à un prix très fort ».

Une offre pour convaincre le tribunal ?

Depuis 2017, le tribunal a reçu plus d’une trentaine d’offres de reprises venues de différentes nationalités ; Canadienne, Britannique, Chinoise, Saoudienne, Emiratie,  Jordanienne, Coréenne etc. Mais selon les médias marocains qui ont épluché ce dossier, il existe parmi ces offres trois qui tiennent cependant le haut du pavé.

Il s’agit en premier de ‘’Evsen group’’ qui a déposé son offre en décembre 2017 pour un montant de 25 milliards de dirhams conditionné par un paiement par tranches. Quelques jours après, le groupe turc  ramenait son offre à 22 milliards, payable sur 2 ans et assorti d’une caution de 15 % sur la première tranche.

La deuxième offre a été déposée en juillet 2018 par le groupe financier australien ‘’Macquarie’’, portée par la division « marché énergétique » du groupe, sous la responsabilité d’Erik Petersson avec le soutien d’Anis Remadi et du Marocain Yassine Benjelloun, ex-Medicapital. Cette offre ne mentionnait cependant aucun détail sur les tablettes du syndic consultées, selon les médias marocains.

Pour la troisième et probablement la plus élaborée de toutes selon nos sources et aussi des médias marocains, provient de la société belge Carbonaphta, adossée au trader Baha Bastane Energy (BB Energy) basé à Dubaï. Elle est dirigée par Roger Houzel, fils du vétéran du négoce pétrolier Xavier Houzel, réputé pour ses entregents auprès des régimes moyen-orientaux et dans nombre d’opérations de raison d’Etat.

L’offre Carbonaphta propose de relancer rapidement les opérations par un transfert des dettes de la Samir dans une structure de défaisance.

« Cette offre de Carbonaphta est correcte et recevable juridiquement et en ordre avec des professionnels du pétrole et du gaz qui se disent intéressé par le raffinage », reconnaît un initié du dossier dans une déclaration à Maghreb Emergent.

La même source nous explique qu’une bonne vingtaine d’acquéreurs se sont présentés avec une offre de 2,5 milliards de dollars, ce qui correspond aux exigences du Tribunal, mais avec des lettres de banques qui se sont avérées fausses et non confirmées. « Ces repreneurs se sont évaporés dans la nature. Donc il n’y a eu aucune offre sérieuse à part celle de Carbonaphta », conclut-il.

Le redémarrage de la Samir n’arrange pas certains intérêts

Actuellement, la raffinerie est dans un très bon état selon les analystes, mais il faut en urgence procéder à des travaux de maintenance. « Des travaux que le tribunal ne peut pas engager car il ne dispose pas de financement », selon notre source.

D’autre part, il y a des assurances et des salaires à payer. Les salaires des mois derniers ont été payés par une filière de la raffinerie (100% de distribution), nous dit notre interlocuteur. Aussi, le personnel cadre de valeur qui, face à la situation de la Samir, est en train de quitter l’entreprise.

Notre source va encore plus loin dans cette affaire en déclarant que le fond du problème de la Samir « est qu’il y a des gens au Maroc qui ne souhaitent pas que la raffinerie redémarre ». Il explique à ce propos que depuis 3 ans, les distributeurs de carburent ont eu à se réjouir de cette situation. « On parle de 3 milliards de dollars de gains au profit des distributeurs et cela sur le dos des contribuables », nous révèle notre source.

Il ajoute dans ce sens qu’un rapport sur le carburent parle d’une entente entre les distributeurs pour gagner d’importantes marges. « Ceci soulève le problème de l’existence d’un marché non régulé qui n’est pas contrôlé par les autorités », affirme notre source.

En ce moment, les propositions de reprises de la raffinerie notamment les plus convaincantes d’entre-elles, déposées sur le bureau du tribunal, « se retrouvent face à un mur, pas celui d’incompréhension mais d’austérité », affirme notre source.

Si ce fleuron de l’industrie marocaine ne trouve pas un repreneur, la raffinerie pourrait être démantelée et vendue comme de la vulgaire ferraille. Ce qui représente une grosse perte pour le Maroc, le Maghreb mais aussi pour l’Afrique tout entière.

Pour rappel, la raffinerie la Samir existe depuis 1990 et est passée en 1997 sous le contrôle du groupe saoudien Corral Pétroleur Holdings. Elle est située près du port pétrolier de Mohammédia, dans la plus grande zone industrielle des carburants au Maroc. Elle a été conçue pour traiter 1 250 000 tonnes de brut par an.

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