Le militant des droits humains, Kamel Eddine Fekhar, décédé hier en prison, a été maltraité les derniers jour de sa vie dans la prison de Ghardaïa et dans le pavillon carcéral de l’hôpital de la même ville, a déclaré son avocat, Me Salah Dabouz hier soir lors de son passage dans l’émission Café presse politique de Radio M.
Kamel Eddine Fekhar qui a été arrêté « arbitrairement » le 31 mars dernier, « était hospitalisé dans des conditions d’hygiènes effroyables » a souligné Me. Dabouz.
Avant son hospitalisation, il a été incarcéré dans une pièce de 02 m² en compagnie de son codétenu, Hadj Brahim Aouf. Les deux militants n’ont bénéficié que de deux couvertures. « Au fond de la toute petite pièce se trouvait « une cuvette de toilette turque ». Quand les deux prisonniers tendaient leurs jambes c’est sur la cuvette qu’ils les posaient» a raconté l’avocat. Il soupçonne que Fekhar et Aouf aient attrapé une infection dans cet endroit insalubre où ils avaient entamé leur grève de la faim.
Après la dégradation de l’état de santé de Fekhar et son codétenu, ils ont été transférés à l’infirmerie de la prison où ils ont passé dix jours sans traitement. Il a fallu que Dr. Fekhar menace le médecin de poursuite judiciaire, pour qu’il ordonne son transfert au pavillon carcéral de l’hôpital de Gherdaia. Là aussi les conditions d’hygiènes étaient jugées dégradantes par l’avocat qui a pu rendre visite aux détenus. Ils ont été, là aussi, très mal pris en charge, aucun confort ne leur a été assuré. Pis encore, « l’endroit étaient plein de saletés et d’insectes par terre » a ajouté l’avocat.
La maladie qu’avaient attrapé les deux détenus, leur provoquait des crises épisodiques, Me Salah Dabouz été présent lorsque Fekhar avait fait une de ces crise. « C’était une crise d’une trentaine de minutes, il avait très mal à la tête et tremblait de fièvre » a raconté l’avocat. « Pendant sa crise, Kamel Eddine Fekhar, criait et appelait le médecin … en vain. Une dame qui est vraisemblablement médecin est venue après plus de 30 min pour uniquement toucher son front, ses mains et ses pieds. La dame est reparti sans même communiqué avec lui ! Il a été très mal pris en charge par le corps médical et paramédical » a-t-il regretté.
La chose la plus désolante pour Salah Dabouz est que les médecins et infirmiers les traitaient comme des prisonniers et non comme des malades. « Mercredi passé j’ai pu voir Hadj Brahim Aouf, Fekhar venait de se réveiller et m’a dit qu’il voulait expliquer son cas à un médecin, car lui-même était médecin de profession, mais le docteur du pavillon carcéral a refusé de communiquer avec lui en lui disant – Ne me parlez pas- » a rapporté Salah Dabouz. « Ce jour-là il m’avait dit, – Tu vois Salah ils ont programmé ma mort, ils sont en train de me tuer- » a continué Dabouz avec beaucoup d’émotions.
L’injustice exercée sur Kamel Eddine Fekhar a commencé avant sa grève de la faim dans la maudite pièce de 2 m² et avant son hospitalisation. Il a été arrêté le 31 mars dernier, ou il est resté en garde à vue pendant 48 heures chez la police, il a ensuite été présenté devant le procureur de la République puis le juge d’instruction de la première chambre du tribunal de Gherdaia. Ce dernier avait décidé de l’incarcérer avant de voir son dossier. Selon l’avocat il y a 14 chefs d’accusations dans le dossier, parmi lesquels la diffamation, l’atteinte à un corps constitué, incitation à attroupement armé, atteinte à l’unité nationale…
« Ce pack d’accusation est sorti à chaque fois que quelqu’un critique les autorités et que cette critique ne leur plait pas. Ils pensent que quand on lance des poursuites et quand on utilise la mise en détention provisoire, les gens auront peur et arrêteront de critiquer les autorités. Ce qui est complètement faux car les gens comme Kamel Eddine Fekhar sont capables d’aller jusqu’à la mort pour leurs idées » note Me. Dabouz
« Aujourd’hui Kamel Eddine Fekhar a prouvé par sa combativité qui lui a coûté la vie que ce qu’il disait était vrai. Il a, malheureusement, fallu qu’il meut pour qu’on le comprenne » a-t-il conclu.