Vingt quatre heures après sa désignation par le roi Mohamed VI comme nouveau Premier ministre, Saadedine El Othmani a eu le feu vert samedi 18 mars de son parti, le PJD, qui l’a appelé à accélérer la formation du gouvernement.
Le communiqué du Conseil national du parti Justice et développement (PJD) est tombé samedi soir: les militants du parti renouvellent leur confiance à Saadedine El Othmani, (président de ce Conseil national) et le félicitent pour sa nomination à la tête du gouvernement, en remplacement du SG du parti, Abdelilah Benkirane.
Les membres du Conseil national du PJD ont en outre, rappelé à El Othmani »l’impérieuse nécessité d’accélérer la formation d’un gouvernement, qui devra porter les caractéristiques de la force, de la cohésion et de l’efficacité », et conforme ‘’à la Constitution’’.
Le Conseil national du PJD a également rappelé au nouveau chef de gouvernement qu’il doit »poursuivre les réformes engagées par son prédécesseur », Abdelilah Benkirane.
Le roi Mohamed VI avait désigné Saadedine El Othmani nouveau chef de gouvernement vendredi 17 mars, moins de 48 heures après avoir limogé Abdelilah Benkirane, et à la veille de la tenue d’une réunion extraordinaire du Conseil national du PJD.
Le souverain marocain aurait-il ainsi coupé l’herbe sous le pied du PJD, dont certains cadres n’avaient pas apprécié le limogeage brutal de Benkirane ? Celui-ci avait ces dernières semaines parlé de »démission » et de »dissolution du PJD » dans le cas du maintien du blocage pour la formation d’un gouvernement de coalition.
Calculs d’un Roi
Le roi, de retour au pays après plusieurs semaines passées en Afrique, aurait lui également fait ses calculs pour sortir de l’impasse politique, cinq mois après les élections législatives. La désignation d’El Othmani, figure emblématique des milieux islamistes au Maroc, membre fondateur du PJD et son second secrétaire général après le départ d’Abdelkrim El Khettab en 2004, a été saluée par la classe politique marocaine.
A commencer par le président du Rassemblement National des Indépendants (RNI), ministre de l’Agriculture sortant, Aziz Akhannouch. Cet influent homme d’affaires, désigné comme seconde fortune du Maroc, originaire du Souss, tout comme El Othmani, a été le premier à féliciter le nouveau chef de gouvernement, et lui a souhaité »plein succès » dans sa mission.
Sur le site du RNI, Akhannouch estime qu’El Othmani possède »les qualités à même de faire avancer les négociations » pour la formation du prochain gouvernement. Le Mouvement Populaire (MP), l’Union Constitutionnelle (UC) et les socialistes de l’USFP, alliés du RNI qui avaient exigé de Benkirane l’inclusion dans le gouvernement de l’USFP et l’éviction de l’Istiqlal, ont eux également salué la nomination du N.2 du PJD. Ils ont manifesté leur volonté à »coopérer pleinement avec le chef de l’exécutif désigné. »
Quand le roi verrouille le jeu d’avance
Après avoir eu »la confiance » de son parti, à travers un plébiscite du Conseil national samedi, El Othmani devrait aller vite vers des tractations avec les partis alliés du PJD, l’Istiqlal et le Parti pour le Progrès et le Socialisme ((PPS). Il devra ensuite entamer des négociations plus musclées avec le RNI, chef de file d’une nouvelle force politique au Maroc, et qui pèse 93 sièges, passage obligé pour avoir une majorité de sièges.
Avec 125 sièges, le PJD n’a pas de majorité, à savoir 198 sièges sur 395 pour gouverner seul. C’était le »Talon d’Achille » de Benkirane, car les 46 sièges de l’Istiqlal et les 12 autres sièges du PPS (gauche) ne suffisaient pas. Reste à savoir maintenant quelle marge de manoeuvre aura El Othmani face aux exigences du RNI, à savoir l’exclusion de l’Istiqlal et la participation de l’USFP.
Juste après avoir été reçu vendredi par le roi, El Othmani avait répondu à la presse sur la question de savoir s’il va inclure l’USFP dans son gouvernement: »avec ma désignation, nous nous assoirons, nous effectuerons les consultations nécessaires avant de décider. »
La nouvelle Constitution marocaine de 2011, proposée par le roi Mohamed VI par référendum et votée en juillet de la même année dans le sillage des revendications du mouvement associatif local pour une monarchie Parlementaire au plus fort des manifestations du »printemps arabe » au Maroc, ne permet pas à un parti politique d’obtenir la majorité des suffrages.