Près de 4,2 millions de marocains en situation de vulnérabilité et 1,6 million sont en état de pauvreté absolue sur une population de 34,812 millions d’habitants, indique une enquête du HCP qui confirme que les subventions et aides publiques profitent surtout aux plus riches.
Selon cette enquête du HCP rendue publique mercredi 17 mai à Rabat, la pauvreté reste en progression en milieu rural, et le système de subventions des prix de première nécessité profite aux couches sociales les plus aisées.
Les résultats de cette enquête sur la pauvreté monétaire sont sans équivoque : sur un total de 1.683 communes et centres urbains, 39,2% affichent un taux de pauvreté monétaire inférieur à 5%, 29,8% ont un taux variant entre 5% et 10%, 23,8% affichent un taux entre 10% et 20%. 5,1% entre 20% et 30% et 2,2% des 1.683 communes ont un taux de pauvreté supérieur à 30%.
En milieu rural, sur les 1.279 communes, le taux de pauvreté monétaire est inférieur à 5% dans 28,5% des communes, et se situe entre 5% et 10% dans 34,4%. Ce taux oscille entre 10% et 20% dans 28,2% des communes, entre 20% et 30% dans 6,0%, et il est supérieur à 30% dans 2,9% des communes.
Selon la même enquête, sur les 404 communes et centres urbains, 73,3% affichent un taux de pauvreté inférieur à 5%, 15,1% un taux de pauvreté compris entre 5% et 10%, 9,7% un taux entre 10% et 20%, et 2,0% affichent un taux supérieur à 20%.
Les aides publiques vont aux riches
Commentant les résultats de cette enquête à la lumière des politiques publiques d’aides aux populations vulnérables, et notamment à travers l’INDH (Indicateur national de développement humain), le secrétaire général du HCP Abdelhak Allalat a souligné que »les aides sociales vont à l’ensemble de la population et profitent à ceux qui en ont le moins besoin ».
« Dans le domaine de la couverture médicale, le Régime d’Assistance Médicale (Ramed) qui est destiné à la population pauvre et vulnérable non couverte par un système d’assurance maladie, n’échappe pas à ce type de distorsion. Alors que seuls 26,1% de ses bénéficiaires provenaient du quintile ayant le niveau de vie le plus faible, 7,6% appartenaient au quintile le plus aisé », poursuit le secrétaire général du HCP lors d’une conférence de presse de prézsentation des résultats de cette enquête.
»Nos travaux à partir de l’Enquête nationale sur la consommation et les dépenses des ménages (ENCDM) montrent qu’en 2014, près de 30% des subventions budgétaires destinées au soutien des produits alimentaires et de butane ont profité aux 20% des ménages ayant le niveau de vie le plus élevé, contre 13% aux 20% les plus défavorisés, avec un rapport de plus de 2 fois au profit des premiers » a-t-il relevé.
Comment réformer la caisse de compensation ?
»Ce rapport est de 2,4 fois dans le cas de la farine nationale de blé tendre, 3,4 fois dans celui du sucre et de 1,9 fois dans celui du gaz butane », ajoute-t-il. Pis, au niveau du système éducatif, « près de 30% des promotions du secondaire et du supérieur de 2014 appartenaient à la catégorie des 20% les plus aisés contre 10% relevant des 20% les plus défavorisés ».
Pour le HCP, ces disparités dans l’affectation des aides publiques aux couches sociales selon le degré de pauvreté sont le résultat direct du »mode de financement général des programmes sociaux. » Dès lors, le département de M. Ahmed Lahlimi propose au gouvernement une nouvelle cartographie de la pauvreté pour mieux cibler les aides publiques et les objectifs en matière de développement humain.
« Si on améliore l’affectation des ressources, on peut en améliorer le rendement, ainsi la majorité des bénéficiaires seront issus des populations pauvres, ce qui permettra une baisse du taux de pauvreté plus accentuée », explique Abdelhak Allalat.
La caisse de compensation des prix des prix des produits de première nécessité (sucre, farine, huile) a été instaurée en 1941 au Maroc, mais avait un autre objectif : celui de stabiliser les prix au plus fort de la seconde guerre mondiale, et non pas soutenir les prix.
La nouvelle carte de la pauvreté monétaire est ainsi, selon les responsables du HCP, une solution à la réforme de la caisse de compensation qui absorbe chaque année un budget de plus de 30 milliards de dirhams (environ 3 mds d’euros) pour le soutien des prix.