Tout en appelant à fixer des objectifs plus ambitieux pour le secteur des énergies renouvelables, Mourad Preure ne croit pas au déclin pétrolier de l’Algérie. Hier, sur Radio M. il a rappelé que la production gazière algérienne était « en train de reprendre et avec elle, une augmentation de la demande sur les contrats de long terme émanant des clients de Sonatrach ».
Mourad Preure, qui était hier mercredi « l’invité du direct » sur Radio M., est d’abord un excellent prévisionniste. Pour preuve, en mai 2016, et déjà sur les antennes de Radio M, il prévoyait « des prix pétroliers de 50 à 60 dollars vers le quatrième trimestre 2016 ». Une bonne raison pour prendre au sérieux cet autre pronostic qui mettra sûrement du baume au cœur des autorités algériennes : « l’orientation des cours pétroliers sera résolument à la hausse en 2017. »
En réalité, cet expert algérien n’a jamais eu beaucoup de doute sur le « rééquilibrage », qu’il juge inévitable, d’un marché pétrolier secoué depuis plus de deux ans par l’irruption du gaz de schiste américain. Une conviction qu’il tente, de longue date, de faire partager par les autorités algériennes en les invitant à inscrire leur action dans les tendances lourdes et « structurelles » d’un secteur où « les énergies fossiles vont occuper pendant encore plusieurs décennies une place prédominante ».Et pour cause, « la demande pétrolière mondiale va passer de 98 millions de barils/jour actuellement à 115 millions de baril en 2030 ».
Pas de déclin pétrolier et gazier
Une autre facette, sans doute la plus importante, du personnage de Mourad Preure dans le contexte présent est qu’il ne croit pas du tout au déclin pétrolier de l’Algérie. Il dénonçait hier, avec véhémence, ce qu’il appelle le « catastrophisme » ambiant. « La production gazière algérienne est en train de reprendre et avec elle, une augmentation de la demande sur les contrats de long terme émanant des clients de Sonatrach », assure-t-il. « Les exportations algériennes, qui avaient baissé ces dernières années à 45 milliards de m3, ont progressé de 11% en 2016 avec un total de 54 milliards de m3. « Alors que l’on parlait du déclin de la production gazière à partir de 2015, nous assistons, au contraire, à sa reprise », ajoute-t-il.
La « fiabilité » de la ressource algérienne
Pour Mourad Preure, les atouts de l’Algérie, ainsi que la « fiabilité » de la source algérienne mise à mal par une campagne de communication qu’il juge tendancieuse et éventuellement orchestrée par les concurrents de notre pays, ne résident d’ailleurs pas seulement dans la reprise de sa production mais également dans les infrastructures qu’elle a mis en place depuis des décennies au prix d’investissements très importants. « Les gazoducs intercontinentaux qui relient l’Algérie à l’Europe, à travers l’Italie et l’Espagne constituent une véritable ‘’garantie’’ pour les clients européens de Sonatrach, en plus d’être une bien meilleure option que le GNL proposé par certains pays. Un pays comme le Qatar, avec ses dizaines de millions de tonnes de capacité de liquéfaction de gaz, peut abandonner un client s’il trouve une meilleure offre alors que les gazoducs reliant l’Algérie à l’Europe ne risquent pas d’être déplacés », argumente-t-il.
« Il faut accélérer la transition énergétique »
Mourad Preure, qui plaide depuis de très nombreuses années en faveur d’une « stratégie offensive » de développement du secteur de l’énergie, incarne également, comme personne dans notre pays, une forme de volontarisme qui se nourrit d’un optimisme à toute épreuve. Ce volontarisme trouve une nouvelle occasion de se manifester à travers les programmes de développement des énergies renouvelables annoncés récemment par les autorités algériennes.
Même s’il se félicite de cette nouvelle orientation, Mourad Preure ne se prive pas de qualifier l’objectif de 22 000 MW d’électricité verte à l’horizon 2030 de « conservateur » : « Il faut accélérer la transition énergétique. L’Algérie est une véritable pile électrique à ciel ouvert. Nous disposons d’un ensoleillement sans équivalent et de ressources minérales qui nous donnent des avantages comparatifs considérables notamment en matière d’énergie solaire. Ce serait faire preuve d’un véritable aveuglement stratégique que de continuer à produire de l’électricité à partir des combustibles fossiles. »
« Le champion national, c’est Sonatrach »
Pour Mourad Preure, le développement de l’électricité verte ne doit pas se contenter de rechercher le prix du kw /heure le moins élevé possible : « On ne peut pas décemment s’engager dans la transition énergétique sans champions nationaux. Tous les pays producteurs mettent le paquet pour avoir de puissants acteurs énergétiques. » Pour l’ancien directeur de la stratégie de Sonatrach, la transition énergétique algérienne doit s’appuyer d’abord sur le renforcement de la compagnie nationale, « qui est restée debout bien quelle ait subie au cours des dernières années des attaques sans équivalent dans aucun pays du monde ».
Mourad Preure en est convaincu : « Le champion national c’est Sonatrach qui est actuellement seule à avoir la capacité de mener un projet ambitieux de renouvelable quitte à être la matrice pour l’apparition ultérieure de nouveaux acteurs. »
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