[Opinion] Non, Aït Ahmed n'est pas récupérable par les clans, il est l'homme de la nation - Maghreb Emergent

[Opinion] Non, Aït Ahmed n’est pas récupérable par les clans, il est l’homme de la nation

Da l'Hocine entouré de nos collègues Saïd Djaafer et feu Ali Bey Boudoukha
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La mort de Hocine Aït Ahmed donne lieu à des expressions de reconnaissance venant même de ceux qui l’ont constamment insulté, dénigré et qui ont menti sur lui avec un aplomb extraordinaire. C’est inévitable et ses proches, sa famille, qui ont l’élégance du défunt sont obligés de faire avec et de laisser passer, d’attendre que la poussière retombe…

Pourtant, avouons-le, il nous est insupportable d’entendre Ammar Saadani dire, avec une absence de pudeur qui nous hérisse, que Hocine Aït Ahmed, “comme Boudiaf et même Bouteflika… ont fait l’objet d’injustice de la part de petits”.
Il nous est insupportable de l’entendre dire que lui et son clan veulent la démocratie que voulait Hocine Aït Ahmed. C’est faux. Hocine Aït Ahmed a combattu un régime autoritaire avec tous ses clans, par conviction et sans aucune compromission.
Il nous est insupportable d’entendre de la part d’un représentant d’un clan du régime suggérer que Hocine Aït Ahmed ait besoin d’une quelconque “réhabilitation”. Cela est indécent de la part d’un représentant qualifié d’un régime qui a dilapidé le capital historique et humain d’une des plus grandes révolutions du 20ème siècle.
Que ses proches nous pardonnent d’exprimer notre colère en ces temps de recueillement, Ammar Saadani, ne s’étant pas contenté de faire le minimum protocolaire mais a rompu la trêve de la pudeur.
Il faut donc lui rappeler que Hocine Aït Ahmed a combattu l’ensemble du régime avec sa police politique et ses meutes d’aboyeurs politiques et médiatiques qu’il lâchait contre les militants de la démocratie et de la liberté.
Il faut donc lui rappeler que Hocine Aït Ahmed n’a jamais, au grand jamais, joué un clan contre un autre et qu’il les considérait, tous, comme faisant partie d’un même régime, d’une même entreprise de saccage systématique de l’énorme potentiel de notre nation.
Hocine Aït Ahmed était bien dans l’opposition au régime mis en place à l’orée de l’indépendance, il n’était pas seulement opposé “à certains responsables dont il contestait le mode de gouvernance et la méthode de gestion.”, selon la formule de Bouteflika.
Non, Hocine Aït Ahmed n’est pas récupérable. Irrémédiablement, il a pris le camp de la société contre le régime. Et ce n’est pas une déclaration scandaleusement opportuniste de M.Saadani qui changera les choses.
Hors de question d’apporter une quelconque légitimité à certaines parties du régime contre d’autres. Ils font partie, pour lui, du même désastre.
Hocine Aït Ahmed, contrairement aux éléments de langage que le régime a fourni à ses fonctionnaires politiques et à ses médias, n’a jamais été un homme qui ne dit “que non”. C’était un grand homme politique, un dirigeant responsable, soucieux d’éviter que le pays n’éclate en morceaux en raison de l’impéritie de ceux qui le gouvernent.
Et même s’il ne tenait pas en grande estime ceux qui détenaient le pouvoir, il a toujours affiché sa disponibilité à discuter la recherche d’un compromis vertueux pour faire sortir le pays et la société de la régression, pour aller vers le rétablissement de la souveraineté de peuple et sortir d’une confiscation aux conséquences désastreuses.
Disponibilité au compromis mais intransigeance absolue sur sa finalité qui ne peut être qu’un sortie ordonnée et pacifique vers l’Etat de droit et la démocratie. Hors de question de participer à la guerre des clans ou de l’alimenter.
C’est ce qui rendait absolument pitoyables ces journaux qui ont “vu” Hocine Aït Ahmed avec le général Toufik à l’aéroport de Boufarik ou ceux qui n’en finissaient pas de trouver les preuves du “deal”.
Ce n’est pas aujourd’hui qu’on instrumentalisera SI L’Hocine. Aucun clan ne peut l’utiliser car il était contre le système des clans. Il n’était pas contre Toufik pour être avec Bouteflika ou Saadani.
Trop grand pour ces mesquineries. Il avait une autre idée de la politique et de l’Algérie.
Il était jusqu’au bout ce rêve d’une Algérie humaine, plurielle, moderne et citoyenne que les clans nous ont empêché d’avoir. Et de voir. Et que nous voulons toujours.
Laissez-nous donc enterrer Hocine Aït Ahmed, sans vos pitreries, sans vos opportunismes. Laissez les Algériens saluer le départ d’un grand sans vos parasitages. Que l’on ne nous force pas à aller plus loin. Ne nous forcez pas à rompre la trêve de la pudeur.
Qu’on se le dise: Hocine Aït Ahmed n’a pas besoin d’une “réhabilitation” de la part du régime, de ses hommes, de ses clans. Il est au paradis des révolutionnaires, dans le cœur des femmes et des hommes. Dans nos cœurs.

 

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