Avec deux nouvelles ouvertures à Sétif et Alger, le français Regus, leader mondial du coworking (espaces de travail partagé), confirme son engagement vis-à-vis du marché algérien. Dans un entretien exclusif, Maghreb Emergent a rencontré le Directeur Afrique francophone du groupe Regus, Tarek Abou-Zeinab.
Maghreb Emergent : Pouvez-vous nous parler de Regus et du concept du coworking succinctement ?
Tarek Abou-Zeinab : Regus est une marque créée par un entrepreneur pour les entrepreneurs de toute taille : de la start-up à la multinationale. La société a été fondée en 1989 par le Britannique Mark Dixon, car, entrepreneur lui-même, il manquait d’espaces de travail à la demande. Près de 30 ans plus tard, nous sommes devenus le leader mondial des espaces de travail flexibles : bureau, salles de réunion, coworking…
Regus est une des filiales du groupe IWG (International Workplace Group) qui est le plus grand réseau d’espaces de travail présent dans 120 pays avec 3400 sites. Regus est présent dans 21 pays en Afrique dont l’Algérie, le Maroc et la Tunisie. En tant que premier hébergeur mondial d’entreprises, nous proposons dans notre gamme d’espaces de travail : le coworking. C’est un espace de travail partagé par différentes entreprises. Au delà du partage de mètres carrés, il y a aussi une émulation, le partage des bonnes pratiques et la possibilité de saisir des opportunités professionnelles.
Quels sont les avantages du coworking ?
L’avantage est déjà d’avoir un espace de travail clé en main avec tous les services intégrés (connexion haut débit, secrétariat téléphonique, gestion du courrier, domiciliation…) pour un coût maitrisé. C’est aussi la possibilité d’élargir son carnet d’adresses, de rompre la solitude de l’entrepreneur et de s’intégrer à une communauté de créateurs. C’est un gage de crédibilité pour celui qui se lance dans le monde de l’entrepreneuriat. Il ou elle peut recevoir ses clients dans un cadre propice. Enfin, c’est aussi un levier de recrutement.
Selon la dernière « Global survey » d’IWG, réalisée dans 100 pays, 80% des salarié(e)s ont déclaré que lorsqu’ils sont confrontés à deux offres d’emploi similaires, ils refusent celle qui n’offre pas de solutions d’espaces de travail flexibles, type coworking.
Quelle a été la stratégie de pénétration du marché maghrébin pour Regus ?
Notre présence au Maghreb s’inscrit dans la durée. Par exemple, nous sommes présents depuis 1997 au Maroc et 2006 en Algérie. Notre stratégie est souvent de s’associer à un partenaire local qui a une bonne connaissance de son marché domestique et de l’écosystème des entrepreneurs. Pour répondre à la règle universelle de l’immobilier, nous visons les meilleurs emplacements. Cela peut être dans les quartiers d’affaires, mais aussi dans les zones résidentielles pour éviter les temps de déplacement.
Comment fait-on pour marketer un tel produit ou service dans le Maghreb et plus spécialement en Algérie ?
Notre expérience de 30 années au service des entreprises nous permet de trouver les mots justes pour nos clients et prospects. Notre gamme de services est très simple et repose sur une logique d’abonnement ou de réservation à la carte d’espaces de travail clés en main et flexibles. Par ailleurs, nous avons développé une application pour smartphone, « My Regus », qui propose notre offre en temps réel dans le monde entier. Par exemple, si vous avez un rendez-vous client de dernière minute à Alger ou à Rabat, il suffit de se connecter et de réserver une salle de réunion.
Vous a-t-il fallu faire un travail de vulgarisation du concept pour atteindre certaines cibles et bousculer les habitudes de consommation ? Cela n’a pas été un frein à votre développement ? Quel a été l’apport de l’économie collaborative dans votre métier ?
Il est vrai que nous avons transformé les usages par rapport aux classiques de l’immobilier de longue durée. Nous offrons la flexibilité et la simplicité avec tous les services à portée de main. Notre marque Regus est devenue la référence des centres d’affaires et un réflexe pour les grands comptes qui souhaitent s’implanter à l’étranger. Ce fut le cas par exemple de Google au Kenya. L’apport de l’économie collaborative qui est en fait une économie de l’usage a été essentielle. Les clients se concentrent à 100% sur leur business et oublient les à-côtés que nous gérons pour eux.
Les soubresauts politiques qu’a connus l’Algérie dernièrement ont rebattu les cartes des partenariats économiques en Algérie, de quelle manière Regus s’est accommodé du changement de décor qui s’est produit ?
Nous n’avons pas réellement perçu de changement de notre côté. Certains de nos clients ont peut-être été un peu plus attentistes dans le cadre de cette transition politique. Nous avons continué de répondre à la demande de nos clients. Par exemple, nous avons ouvert en décembre 2019 notre 3ème centre Regus au Park-Mall de Setif. Nous sommes confiants dans l’économie algérienne qui a de bons fondamentaux.
Le nouveau gouvernement a décidé de mettre en place une nouvelle stratégie dans le domaine du numérique pour booster les startups et l’économie du savoir. Est-ce une bonne nouvelle pour votre développement ?
C’est une excellente nouvelle ! Si des jeunes ou moins jeunes sont encouragé(e)s pour lancer leur activité, nous sommes prêts à leur offrir la meilleure infrastructure pour la développer. Les rencontres professionnelles qu’ils peuvent faire dans nos centres peuvent leur mettre le pied à l’étrier. Certains de nos clients s’inscrivent dans une logique de mentorat et aiment partager des conseils avec les jeunes pousses du numérique.
Qui sont vos partenaires dans le marché algérien et quelles sont vos cibles prioritaires ?
Nos partenaires sont diverses. Par exemple, pour notre nouveau centre ouvert à Sétif, nous avons conclu un partenariat avec la société Spa Prombati qui gère le Park-Mall de la ville. Le spectre est large. Nous pouvons aussi proposer de conclure des contrats de franchises.
Pouvez-vous nous exposer votre stratégie court/moyen terme dans la zone Maghreb ?
Notre stratégie est double : Avoir un bon taux d’occupation dans nos centres existants et en ouvrir de nouveaux pour répondre à la demande des entreprises. En Algérie, en 2020, nous ouvrirons un nouveau centre à Hydra dans le secteur d’Alger. Au Maroc, nous allons lancer 2 nouveaux centres à Casablanca : à Anfa Place et dans la nouvelle tour Casablanca Finance City.
Quel est selon vous l’avenir du coworking en Algérie ? Trouvera-t-il toute sa place auprès des consommateurs « lambda » comme service à part entière ?
Le coworking est un cercle vertueux. Nos espaces accueillent beaucoup de start-up, de porteurs de projets et même des « grands comptes » qui se retrouvent pour développer leur business et s’enrichir de l’expérience des autres. Nous sommes des incubateurs de talents et souhaitons créer de l’émulation. Avec l’émergence des « digital nomad » et le fait d’avoir son bureau un peu partout, nous sommes confiants sur l’avenir du coworking en Algérie. Cette solution économique et pratique devrait ravir le plus grand nombre. Le coworking s’adresse à tout le monde. Il est corrélé à l’envie d’entreprendre. La population algérienne est jeune et a le désir de réussir. Tous les ingrédients sont donc réunis.
Entretien réalisé par Kheireddine Batache