Selon le spécialiste, le prix du baril se situera entre 70 et 80 dollars dès l’année 2019.
« La hausse des cours du pétrole enregistrée ces dernières semaines est due essentiellement au fait que la demande mondiale reprenne son rythme habituel». C’est ce qu’a déclaré à Maghreb Emergent le spécialiste des questions énergétiques, Mourad Preure.
De son point de vue, « les prix sont structurellement orientés vers la hausse sur le long terme » et devront terminer l’année avec un prix moyen de 70 dollars. Un prix qui devrait se situer entre 70 et 80 dollars dès l’année 2019.
Il s’agit globalement, d’une « tendance haussière de long terme contrariée par des tendances (baissières) de court terme, résultant de plusieurs facteurs, notamment la crise économique mondiale et le rôle des fondamentaux, l’offre, la demande et les stocks ».
Preure signale, dans ce contexte, que la demande mondiale sur l’or noir a enregistré une augmentation de 1,4 million de barils par jour (mbj) en 2017et les prévisions, pour 2018, parlent d’une progression de la demande de 1,4 mbj, pour atteindre très prochainement les 99,4 mbj. « Ce qui permet au marché de se rééquilibrer », a-t-il souligné.
Pour l’expert, l’augmentation des prix est liée à une anticipation d’épuisement des gisements, d’une part, et à l’augmentation des coûts d’extraction d’autre part. « Les gisements vieillissent et le niveau des découvertes selon (le cabinet d’experts) Wood Mackenzie est le plus bas depuis 1947 », a-t-il affirmé.
De plus, les Américains ont une portée limitée sur le marché pétrolier. « Avant juillet 2014, le nombre de puits aux Etats-Unis était estimé à 1500. Ensuite, le nombre est descendu à 600 pour remonter, par la suite, à quelque 800 puits. Aussi, depuis 2014, les investissements de l’industrie pétrolière ont baissé de 1000 milliards de dollars. Ce qui mènera le marché pétrolier vers une contrainte d’offre à l’horizon 2020-2025 ».
D’un autre côté, Preure pense que le facteur géopolitique a joué un très grand rôle dans l’amplification du mouvement haussier du marché. « La situation économique difficile et très tendue de la Russie et de l’Arabie saoudite, a poussé ces deux grands producteurs de pétrole a renouveler leur accord (de limitation de production)», a-t-il expliqué.
Concernant la production du pétrole de schiste américain, Preure considère qu’il s’agit d’un élément déterminant qui ajuste le marché pétrolier. « Quand les prix du pétrole sont en hausse, les producteurs du schiste apparaissent et quand les prix chutent, ils disparaissent ».
« 80% de la croissance de la demande pétrolière va venir des pays émergents »
La demande de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) était estimée à 50 millions de barils par jours en 2010. Elle a baissé 45 millions de barils en 2017. Par contre, la croissance de la consommation sera en grande partie tirée par les pays émergents. «80% de la croissance de la demande en pétrole va venir des pays émergents», assure l’expert.
Cette croissance de la consommation proviendra du secteur des transports, et plus particulièrement du transport routier. « On ne va pas reproduire tous les véhicules en électrique ? Aujourd’hui il y a 27 Chinois sur 1000 qui possèdent un véhicule, et 12 Indiens sur 1000, contre 721 Américains sur 1000 et 500 Européens sur 1000 qui possèdent une voiture. Nous n’avons qu’à imaginer la marge de progression pour les pays émergeants qui vont tirer la demande pétrolière», remarque Mourad Preure.
D’autre part, Preure indique que le P-DG de Sonatrach « a eu raison de dire que ce n’est pas encore la fin du pétrole. On en est même très loin». Il ajoutera que « dans l’industrie du pétrole on a tendance à assister à beaucoup de propagande et d’effets d’annonce et de manipulation de l’information. Mais les statistiques sont là pour confirmer le contraire de ce qui se dit ». « Je ne pense pas que le pétrole va disparaitre du bilan énergétique mondial avant 2050 » conclut-il.