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Pourquoi la voiture électrique n’est pas prête de rouler en Algérie

Par Kheireddine Batache
février 10, 2021
Pourquoi la voiture électrique n’est pas prête de rouler en Algérie

Les discours enchanteurs et démagogiques des responsables sur les voitures électriques en Algérie sont aux antipodes de la réalité.

Le ministre de la Transition énergétique et des Energies renouvelables, Chems-Eddine Chitour, a un nouveau credo qui s’appelle la voiture électrique. Il a considéré mardi à Alger ce modèle comme l’une des options pouvant faire sortir l’Algérie de sa dépendance aux hydrocarbures.

Le ministre a indiqué que « l´Algérie achète chaque année deux milliards de tonnes de carburants et que d´ici 2030, la tonne de CO2 émise, selon le Groupe des experts climat de l’ONU (Giec), sera de plus en plus chère et, par la même, il y aura de moins en moins de voitures thermiques ».

Il relève par ailleurs que le Giec a défini que la tonne de CO2 devait connaitre une importante augmentation pour atteindre en 2030 les 100 euros.

Néanmoins, Chitour concède que le consommateur algérien n’est pas encore prêt à troquer la voiture classique qui fonctionne aux carburants fossile contre un véhicule électrique, offrant certes quelques avantages, mais très loin d’être parfait.

En effet, le ministre omet de s’attarder sur un certain nombre de paramètres, n’ayant pas permis aux ventes de voitures électriques de dépasser les 2% du marché en Europe, où le carburant coûte beaucoup plus cher qu’en Algérie.

Cette situation a valu au modèle 100% électrique de nombreuses critiques de la part de grands patrons de l’automobile, à l’image de Carlos Tavares, P-DG du groupe PSA, ou encore le directeur du développement de BMW, Klaus Fröhlich, qui avait déclaré récemment (2019) : « Il n’y a aucune demande pour des véhicules électriques de la part des clients. Aucune ».

Selon le cabinet EV-Volumes, il s’y est vendu près de 118.000 voitures 100 % électriques sur les cinq premiers mois de l’année 2019, et 227.000 en comptant les hybrides rechargeables. Ces chiffres ne représentent que 1,7 % des ventes de voitures neuves (et 3,3 % en comptant les hybrides rechargeables).

Un mirage ?

Alors, pourquoi dans ce cas l’Algérie, qui n’a toujours pas réussi à se dépêtrer de l’engrenage de la voiture fabriquée localement, suite à l’échec de toutes les stratégies élaborées par les gouvernements successifs, s’embarquerait elle dans cette aventure, au risque de se planter une nouvelle fois par manque de préparation ?

Et pour cause, d’aucuns diront qu’il s’agit d’une vision irréaliste, qui s’inscrit en porte-à-faux avec la réalité de l’industrie et du marché automobiles algériens, du moins sur le court terme, et ce pour plusieurs raisons ignorées par Chems Eddine Chitour.

Le prix :

D’abord, le prix d’une voiture électrique n’est pas à la portée de tous. Les constructeurs proposent de plus en plus de modèles mais le marché reste actuellement limité et les prix sont toujours très élevés par rapport à un véhicule classique, y compris les modèles hybrides.

Les voitures électriques coûtent plus de 30 000 €  pour les modèles populaires dans certains pays européens : Renault Zoe (32 600€ ou 24 400€ si l’on choisit la location des batteries), VW eGolf (33 000€), Nissan Leaf (36 500€), BMW i3 (40 700€). Seules la Smart Fortwo (24 000€), la Smart Forfour (24 500€) et la Volkswagen eUp (23 000€) descendent sous les 30 000€ !

Cependant, il existe une exception faite par la Chine, qui réussi à produire des voitures électrique qui coûtent moins de 20 000 dollars. En effet, Kandi, une compagnie automobile chinoise vient d’annoncer que deux de ses modèles (K27 et K23) ont reçu un certificat de conformité de l’Agence de protection de l’environnement (EPA) aux États-Unis, où elles seront commercialisées.

Mais le best-seller du moment reste la Hong Guang MINI EV de Wuling (fruit d’une joint-venture entre SAIC et GM), qui coûte moins de 5000 euros. Lancé en juin dernier, ce modèle a établi un record de ventes en novembre 2020, avec quelque 30 000 unités commercialisées.

Les batteries :

La batterie électrique est le composant le plus cher dans une voiture électrique. la productionde ce équipements posent de grands problèmes environnementaux et sociaux. les constructeurs utilisent de plus en plus de batteries au lithium pour les véhicules.  

Selon les spécialistes du segment électrique, ces préoccupations restent d’actualité, même si l’efficacité des batteries évolue rapidement. Entre 2009 et 2016, elles sont passées de 100 Wh/litre à 350 Wh/litre, soit une capacité 3,5 fois plus élevée pour la même taille. Dans le même temps, leur prix a été divisé par trois. Mais en fin de vie, la batterie constitue un problème sur le plan environnemental, au niveau de la gestion des déchets.

L’autonomie de la batterie :

Là aussi, il s’agit d’une véritable « barrière à l’entrée » de la voiture électrique sur le marché algérien. Considérée comme un facteur limitant, force est de constater que l’autonomie des voitures électriques évolue. De plus en plus de modèles proposent proposent 300 km, voire 600 km avec une seule charge.

Mais ce paramètre demeure un inconvénient de taille pour l’automobiliste algérien, qui est plus ou moins habitué à enchaîner les kilomètres sans trop se soucier de l’autonomie de son véhicule. D’autant plus qu’une conduite agressive ou une utilisation accrue de la climatisation, accélère la consommation de l’énergie générée par la batterie.

Les bornes de recharge :

Même si l’on peut recharger sa voiture chez soi, via une prise normale, l’installation de bornes de recharge publiques est indispensable pour introduire la voiture électrique en Algérie. En effet, l’Algérie devra créer ex-nihilo un réseau étoffé de bornes, à travers tout le territoire national.

Un équipement technologique que l’Etat devra importer en masse et par conséquent en assumer le coût sur le court terme, à moins de se lancer dans la production locale, ce qui nécessite une ingénierie et un savoir-faire.

En France le coût relatif à l’installation de 100 000 bornes publiques « rapides » (à 20.000 euros l’unité) a été évalué à 2 milliards d’euros, en 2018.

Les habitudes de consommation :

Enfin, pour s’imposer comme produit à large consommation en Algérie, la voiture électrique devra bousculer les habitudes de consommation des ménages. Autrement dit, il faudra inéluctablement promouvoir un nouveau mode de consommation de l’automobile, auquel les ménages ne sont pas prêts, car l’automobiliste algérien reste très attaché au carburants fossiles (essence et diesel), et moins enclin à envisager une évolution dans ce domaine, comme en témoigne l’échec relatif de la stratégie du GPLc en Algérie, qui peine à convaincre les consommateurs, malgré les avantages financiers qu’il offre.

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