Dans un revirement stupéfiant qui ébranle les fondements mêmes de la démocratie algérienne, la Cour Constitutionnelle a proclamé les résultats « définitifs » de l’élection présidentielle du 7 septembre 2024, plongeant le pays dans une crise de légitimité sans précédent. Cette annonce, loin de clarifier le processus électoral, soulève un tollé de questions sur l’intégrité des institutions et la réalité du choix populaire.
« Nous annonçons que M. Abdelmadjid Tebboune est élu président pour un deuxième mandat et (qu’il) prendra ses fonctions dès sa prestation de serment », a déclaré le président de la Cour Constitutionnelle, Omar Belhadj. Cette affirmation, diffusée en direct sur les ondes nationales, sonne comme une tentative de légitimation d’un processus électoral profondément entaché.
En effet, les chiffres avancés par la Cour défient toute logique électorale. Alors que l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) avait initialement déclaré Tebboune vainqueur avec un score de 94,65% et 5,3 millions de voix, la Cour a revu ces chiffres à 84,3%, soit 7.976.291 voix. Cette révision s’accompagne d’une augmentation significative du nombre total de votants, passant de 6 millions à 11.226.065.
Cette modification drastique des résultats s’étend également aux scores des opposants. Abdelaali Hassani, le candidat islamiste modéré, voit son résultat tripler, passant de 3,17% à 9,56%, tandis que Youcef Aouchiche, le candidat socialiste, passe de 2,16% à 6,14%. La découverte de 1.764.637 bulletins nuls parmi les 11.226.065 votants ajoute une couche supplémentaire de complexité à la situation.
Le taux de participation, désormais fixé à 46,10%, semble avoir été ajusté pour donner une apparence de légitimité à un scrutin largement boycotté par la population. Sur un corps électoral de 24.351.551 inscrits, ce chiffre reste néanmoins peu convaincant et ne reflète guère l’enthousiasme démocratique.
L’article 89 de la Constitution algérienne, qui prévoit la prestation de serment du président « devant le peuple », prend désormais des allures de farce au vu des irrégularités entachant les résultats électoraux. Cette situation met en lumière la fragilité du système politique algérien et révèle une volonté désespérée de maintenir une façade de légitimité démocratique.
Le peuple algérien, qui a déjà manifesté son désir de changement lors du Hirak de 2019, se trouve à nouveau confronté à un système réfractaire aux réformes. La question cruciale est désormais de savoir combien de temps ce statu quo pourra perdurer face à une population de plus en plus consciente et exigeante.