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Algérie

Problématique de la sphère informelle en Algérie : Economie de marché, Etat de Droit et Démocratie (Contribution)

Par Mohamed Boukhalfa
décembre 21, 2015
Problématique  de la  sphère informelle en Algérie : Economie de  marché, Etat de Droit et Démocratie (Contribution)

 

 

 

 

Le débat sur le poids de l’économie parallèle ou informelle en Algérie où le gouvernement veut légaliser les activités de cette sphère en récupérant l’argent, qui y circule, est animé par d’éminents économistes. Après le passage du  »Gourou » de l’économie informelle, le Péruvien Hernando De Soto à radio M, la web radio de Maghrebemergent, le Dr Abderrahlmane Mebtoul explique à son tour les enjeux de cette problématique.

  

Le premier ministre algérien en 2014 a donné un montant faramineux de 37 milliards de dollars circulant au sein de la sphère informelle. Or, l’étude réalisée, sous ma direction pour l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI- 8ème Think Tank mondial Paris France décembre 2013) intitulé « le poids de la sphère informelle au Maghreb et impacts géostratégiques » montre qu’en 2012, selon les données officielles de la banque d’Algérie et du Ministère du commerce, cette sphère contrôlait plus de 55 milliards de dollars  au cours de l’époque.

Dans ce cadre, face à la chute du cours des hydrocarbures,  le gouvernement vient de prendre deux mesures : premièrement  en 2014 l’obligation de l’utilisation de chèques dans les transactions commerciales pour un montant supérieur à un million de dinars, qui est une pratique   normale dans une économie normale. Deuxièmement en 2015 sous réserve d’un impôt forfaitaire, autoriser le dépôt d’argent sans poursuites judiciaires  de cette sphère sous réserve  que cela ne provienne pas  d’actions illicites : mais peut-on distinguer juridiquement activités licites et illicites au sein de cette sphère ?  Or, cette  sphère est  elle même hétérogène, contrôlant des segments importants de l’économie,  utilise de la monnaie fiduciaire (billets de banques) au lieu de la monnaie scripturale (chèques) ou électronique faute de confiance favorisant la hausse des prix, la corruption et donc le divorce Etat/citoyens et la détérioration du pouvoir d’achat des Algériens.

 

1. Comment définir la sphère informelle et la quantifier ?

Le concept de «secteur informel» apparaît pour définir toute la partie de l’économie qui n’est pas réglementée par des normes légales. En marge de la législation sociale et fiscale, elle a souvent échappé à la Comptabilité Nationale et donc à toute régulation de l’État, encore que récemment à l’aide de sondages, elle tend à être prise en compte dans les calculs du taux de croissance et du taux de chômage. Il y a lieu de différencier la sphère informelle productive qui crée de la valeur de la sphère marchande spéculative qui réalise un transfert de valeur. L’économie informelle est donc souvent qualifiée de « parallèle », « souterraine », « marché noir » et tout cela renvoie au caractère dualiste de l’économie, une sphère qui travaille dans le cadre du droit et une autre sphère qui travaille dans un cadre de non droit, étant entendu que le droit est défini par les pouvoirs publics en place. Pour les économistes, qui doivent éviter le juridisme, dans chacun de ces cas de figure nous assistons à des logiques différentes tant pour la formation du salaire et du rapport salarial, du crédit et du taux d’intérêt qui renvoient à la nature du régime monétaire dualiste. La formation des prix et des profits dépendent dans une large mesure de la forme de la concurrence sur les différents marchés, la différenciation du taux de change officiel et celui du marché parallèle, de leur rapport avec l’environnement international (la sphère informelle étant en Algérie mieux insérée au marché mondial que la sphère réelle) et en dernier lieu leur rapport à la fiscalité qui conditionne la nature des dépenses et recettes publiques, en fait par rapport à l’Etat, le paiement de l’impôt direct étant un signe d’une plus grande citoyenneté, les impôts indirects étant injustes par définition puisque étant supportés par tous les citoyens riches ou pauvres. Aussi, l’économie informelle est réglée par des normes et des prescriptions qui déterminent les droits et les obligations de ses agents économiques ainsi que les procédures en cas de conflits ayant sa propre logique de fonctionnement qui ne sont pas ceux de l’Etat, nous retrouvant devant un pluralisme institutionnel/juridique contredisant le droit traditionnel enseigné aux étudiants d’une vision moniste du droit. Quelles sont les méthodes de quantification de cette sphère (voir notre étude IFRI pour plus de détail)? Plusieurs approches peuvent être utilisées pour évaluer l’activité dans le secteur informel. La ou les approches choisies dépendront des objectifs poursuivis, qui peuvent être très simples, comme obtenir des informations sur l’évolution du nombre et des caractéristiques des personnes impliquées dans le secteur informel, ou plus complexes, comme obtenir des informations détaillées sur les caractéristiques des entreprises impliquées, les principales activités exercées, le nombre de salariés, la génération de revenus ou les biens d’équipement. Le choix de la méthode de mesure dépend des exigences en termes de données, de l’organisation du système statistique, des ressources financières et humaines disponibles et des besoins des utilisateurs, en particulier les décideurs politiques participant à la prise de décisions économiques. Nous avons l’approche directe ou microéconomique fondée sur des données d’enquêtes elles-mêmes basées sur des réponses volontaires, de contrôle fiscal ou de questionnaires concernant tant les ménages que les entreprises. Elle peut aussi être basée sur la différence entre l’impôt sur le revenu et le revenu mesuré par des contrôles sélectifs. Nous avons l’approche indirecte ou macroéconomique basée sur l’écart dans les statistiques officielles entre la production et la consommation enregistrée. On peut ainsi avoir recours au calcul des écarts au niveau du PIB (via la production, les revenus, les dépenses ou les trois), de l’emploi, du contrôle fiscal, de la consommation d’électricité et de l’approche monétaire. Les méthodes directes sont de nature microéconomique et basées sur des enquêtes ou sur les résultats des contrôles fiscaux utilisés pour estimer l’activité économique totale et ses composantes officielles et non officielles. Les méthodes indirectes sont de nature macroéconomique et combinent différentes variables économiques et un ensemble d’hypothèses pour produire des estimations de l’activité économique. Elles sont basées sur l’hypothèse selon laquelle les opérations dissimulées utilisent uniquement des espèces ; ainsi, en estimant la quantité d’argent en circulation, puis en retirant les incitations qui poussent les agents à agir dans l’informalité (en général les impôts), on devrait obtenir une bonne approximation de l’argent utilisé pour les activités informelles. Les méthodes basées sur les facteurs physiques utilisent les divergences entre la consommation d’électricité et le PIB. Cette méthode a ses limites car elle se fonde sur l’hypothèse d’un coefficient d’utilisation constant par unité du PIB qui ne tient pas compte des progrès technologiques. Enfin, nous avons l’approche par modélisation développée par Frey et Weck et approfondie par Laurent Gilles, qui consiste à utiliser le modèle des multiples indicateurs – multiples causes (MIMIC) pour estimer l’indice de l’économie informelle. Cette approche présuppose l’existence de plusieurs propagateurs de l’économie informelle incluant la lourdeur de la réglementation gouvernementale et l’attitude sociétale envers la bonne gouvernance.

 

2.- Quel est le poids de la sphère informelle ?

 

Pour une analyse objective et opérationnelle, on ne peut isoler l’analyse de la sphère informelle du mode de régulation mis en place c’est-à-dire des institutions en Algérie. L’extension de la sphère informelle est proportionnelle au poids de la bureaucratie qui tend à fonctionner non pour l’économie et le citoyen mais en s’autonomisant en tant que pouvoir bureaucratique. Dans ce cadre, il serait intéressant d’analyser les tendances et les mécanismes de structuration et restructuration de la société et notamment des zones urbaines, sub -urbaines et rurales face à la réalité économique et sociale des initiatives informelles qui émergent, impulsant une forme de régulation sociale. Cela permettrait de comprendre que face aux difficultés quotidiennes, le dynamisme de la population s’exprime dans le développement des initiatives économiques informelles pour survivre, ou améliorer le bien-être, surtout en période de crise notamment pour l’insertion sociale et professionnelle de ceux qui sont exclus des circuits traditionnels de l’économie publique ou de la sphère de l’entreprise privée. Les données sont souvent contradictoires  et tout  dépend de la méthode de calcul. La méthode monétaire nous donne environ 40% de la masse monétaire en circulation hors banques (avec une intermédiation financière informelle limitant la politique monétaire globale de l’Etat), mais beaucoup plus si l’on inclut les transactions en nature et l’on soustrait la rente de Sonatrach et plus de 65% des produits de première nécessité : marché du poisson, de  la viande rouge et blanche, le marché des fruits et légumes et à travers l’importation, le textile et le cuir. A travers l’ensemble du territoire national, toujours selon cette organisation, plus de 50% du marché algérien est occupé par le secteur informel et plus de la moitié du chiffre d’affaires des activités commerciales échappe au Trésor public. Le secteur industriel est marginal représentant moins de 5% du produit intérieur brut et sur ces 5%, environ 95% sont des PMI/PME familiales,  peu initiées au management stratégique. Environ 97/98% des exportations sont le  fait des  hydrocarbures à l’état brut ou semi brut y compris les dérivées  et important 70% des besoins des ménages et des entreprises publiques  et privées dont le  taux d’intégration ne dépasse pas 15%, posant d’ailleurs un problème pour le retour au crédit à la consommation. Environ 70% du  pouvoir d’achat des algériens  et la valeur du dinar via les réserves de change sont corrélés à la rente des hydrocarbures. En 2015 Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach.  En matière d’emploi, les données sont contradictoires  variant entre 25%  selon le Ministère du travail et 50% selon certains organismes internationaux. L’Office national des statistiques (ONS) a  mis en relief le 20 juillet 2010 relatif dans une enquête du second semestre 2009 que la moitié de la population occupée n’était pas affiliée à la sécurité sociale soit un taux de 50,4% de l’ensemble des travailleurs occupés. Et que 69,1% des salariés non-permanents et 80,1% des travailleurs indépendants n’étaient pas affiliés à la sécurité sociale durant la même période. Plus précisément, sur les 9.472.000 travailleurs occupés recensés, 4.778.000 personnes ne sont pas affiliées au régime de la sécurité sociale, soit un occupé sur deux. La proportion des occupés du monde rural qui ne sont pas affiliés à la sécurité sociale représente 60,1%, tandis qu’elle est de 46,3% dans le monde urbain. Concernant justement l’évasion fiscale due à la sphère informelle il y a plusieurs estimations contradictoires. Pour l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), le manque à gagner induit par l’évasion fiscale dans les transactions commerciales en Algérie dépasserait  3 milliards de dollars annuellement  tout en précisant que 80% des transactions commerciales se font sans aucune facturation, alors que 70 à 80% des transactions utilisent le « cash », comme moyen de payement. Et que près de 80%  des commerçants inscrits au CNRC ne payent pas leurs cotisations à la Casnos.

  

3. -Quelle est l’évolution de la sphère informelle en Algérie ?

Nous avons deux périodes, la première pouvant aller de l’indépendance à  1986/1990 (période de la chute du cours  des hydrocarbures)    et la période des années 1990 à nos jours avec quelques variantes entre 2003/2015. La première période se caractérise par  la gestion administrative centralisée qui avait consacré le système de l’État-providence prônant le plein emploi par le moyen de sureffectifs dans les entreprises publiques et les administrations pour acheter, du moins temporairement, la paix sociale. Durant cette période, l’Etat fixe les prix, les salaires, le taux d’intérêt, le taux de change d’une manière administrative. Pour preuve on distribue des bénéfices même aux unités déficitaires et nous avons un quasi monopole sur toutes les activités. Encore, qu’avec l’envolée des prix du pétrole ces dernières années, la tentation est grande sous la pression populiste de revenir à l’ancienne période, ce qui serait suicidaire pour l’avenir du pays, montrant d’ailleurs qu’il y a un lien inversement proportionnel entre l’avancée des réformes et l’évolution du cours des hydrocarbures, réformes ralenties paradoxalement lorsque le cours est en hausse alors que cela devrait être le contraire si l’on veut préparer l’ère hors hydrocarbures. Comme conséquence des politiques de cette période et cela n’est pas propre à l’Algérie, les pays de l’ex camp communiste ont connu le même phénomène, nous assistons à l’extension de la sphère informelle où nous avons le prix fixé par l’Etat bas dont bénéficie une minorité qui devant également la rareté de l’offre nous trouvons ces mêmes marchandises sur le marché parallèle au prix du marché donnant des rentes de situation à une frange de monopoleurs issus du secteur d’Etat. Sur le plan externe les trafics aux frontières profitent de cette distorsion de prix, également sur le marché de la devise, pénalisant en dernier lieu le budget de l’Etat algérien. Pour la seconde période non achevée de 1994 à 2015,  nous avons plusieurs   variantes fonction des recettes de Sonatrach.  Avec la crise où les recettes des hydrocarbures se sont effondrés ayant assisté sous la pression des événements extérieurs à des réformes timides et la période de 1986 à nos jours avec le point culminant de 1994 date du rééchelonnement et de l’ajustement structurel, étant toujours dans cette interminable transition ni économie de marché concurrentielle, ni économie administrée expliquant d’ailleurs les difficultés de la régulation politique, sociale et économique. Entre 2003 à 2014 le cours élevé des hydrocarbures a permis   des  subventions généralisées   et des assainissements des entreprises publiques pour calmer le front social  contrairement aux années 1994/1999 où  les entreprises publiques notamment ont subi  des « plans sociaux » qui se  sont traduit  par des dégraissages massifs ; La période 2016/2020 sera certainement caractérisé par des ajustements économiques  et sociaux, impliquant un sacrifice partagé renvoyant à la morale,  si l’on veut éviter  le retour au FMI horizon 2020 et l’enjeu à l’avenir   qui sera plus douloureux est l’ajustement social de la fonction publique qui sera inévitable avec la réduction des emplois improductifs. Cette période qui commence donc vers les années 1990,  est caractérisée par une  libération des prix et la levée du monopole de l’Etat sur le commerce extérieur qui expliquent pour beaucoup les changements qui ont lieu dans l’économie informelle, changements sans la mise en place de nouveaux mécanismes de régulation dans la mesure où en économie de marché la fonction de l’Etat régulateur est stratégique.   Ce qui explique que l’ouverture anarchique avec une tendance du passage d’un monopole d’Etat à un monopole privé beaucoup plus néfaste a donné lieu à de nouvelles pratiques informelles. Avec la consécration de la convertibilité commerciale du dinar en 1994, les sociétés d’import-export ont ainsi commencé à connaître une prolifération, la majeure partie de ces sociétés ayant été créées soit par des détenteurs de capitaux ou par d’anciens cadres du secteur public en quête de placements à gains à très court terme. Faute d’institutions solides s’adaptant à la nouvelle situation, car le contrôle s’avère de peu d’efficacité (sinon il faudrait une armée de contrôleurs avec des coûts faramineux), nous assistons à une multiplication des petites activités informelles se concentrant surtout dans le petit commerce et les services, comme mode de survie dans un marché de l’emploi en crise. A cet aspect, se sont greffés la fraude fiscale, la corruption et les détournements des fonds publics. 

4- Sphère informelle et la politique socio-économique

(…) Dans ce cadre, la sphère informelle en Algérie est favorisée par l’instabilité juridique et le manque de visibilité de la politique socio-économique. Les entrepreneurs qu’ils soient nationaux ou étrangers demandent seulement à voir clair, du moins ceux qui misent sur le moyen et long terme (investissement inducteurs de valeur ajoutée contrairement à l’importation solution de facilité). Or ils sont totalement désemparés face aux changements périodiques du cadre juridique ce qui risque de faire fuir le peu de capitaux surtout en cette période de crise qui montre le rapatriement massif vers les pays d’origine et orienter les nationaux vers la sphère informelle. Que nos responsables visitent les sites où florissent l’informel de l’Est à l’Ouest, du Nord au Sud et ils verront que l’on peut lever des milliards de centimes à des taux d’usure mais avec des hypothèques car il existe une intermédiation financière informelle. Le gouvernement ne peut empêcher cette pratique, ayant fait deux fois   marche arrière. La dernière mesure  a été d’exiger  un chèque pour un montant supérieur à 500.000 dinars,  mesure  qui  a été gelée en 2011 au  même titre que la mesure précédente  lorsqu’il avait été  instauré  l’exigence d’un chèque pour 50.000 dinars officialisée au Journal Officiel  par le Décret exécutif n° 05-442 du 14 novembre 2005. Ces mesures n’ignoraient  elles  pas  le contexte économique,  social et culturel où l’important est la mise en place de mécanismes de régulation transparents renvoyant à l’adhésion des citoyens  et donc  l’Etat de Droit et à la bonne  gouvernance? Car, il existe un contrat moral (la confiance) entre le vendeur et l’emprunteur dans les règles de l’art. Les mesures autoritaires bureaucratiques produisent l’effet inverse et lorsqu’un gouvernement agit administrativement et loin des mécanismes transparents et de la concertation sociale, la société enfante ses propres règles pour fonctionner qui ont valeur de droit puisque reposant sur un contrat entre les citoyens, s’éloignant ainsi des règles que le pouvoir veut imposer : exemple les transactions au niveau des frontières pour contourner les myopies des bureaucraties locales, agissant sur les distorsions des prix et des taux de change et le droit coutumier dans les transactions immobilières. On ne peut isoler la sphère réelle de la sphère monétaire, le cours du dinar sur le marché officiel étant passé de 80 dinars un euro à 117 dinars un euro en ce mois de  décembre 2015  et sur le marché parallèle étant passé de 150 dinars  un euro à 180 dinars un euro.  Avec la crise mondiale, l’épargne de l’émigration ayant été affectée (diminution de l’offre) n’explique pas tout, l’explication essentielle étant le grossissement de la sphère informelle (accroissement également de la demande). Le constat est donc amer, pour les petites bourses, en l’absence de mécanismes de régulation et de contrôle, les prix des produits de large consommation connaissent, comme de coutume, notamment à la veille de chaque fête des augmentations sans précédent, les discours gouvernementaux et les organisations censés sensibiliser les commerçants ayant peu d’impacts, prêchant dans le désert, les lois économiques étant insensibles aux slogans politiques. Un grand nombre d’intermédiaires entre le producteur et le consommateur (agriculture et industries tant pour la production locale que pour les importations) prend des marges non proportionnelles aux services rendus ce qui fait que le contrôle sur le détaillant ne s’attaque pas à l’essentiel. Or, la sphère informelle contrôle quatre segments-clefs : celui des fruits et légumes, de la viande, celui du poisson pour les marchandises locales et pour l’importation, le textile – chaussures. Avec la détérioration du pouvoir d’achat de la majorité car il s’agit d’analyser les liens entre l’accumulation, la structuration du modèle de consommation et la répartition des revenus par couches sociales, enquêtes inexistantes en Algérie. L’inflation étant par définition source de concentration du revenu au profit des revenus variables, existant un lien dialectique entre la logique rentière et l’extension de la sphère informelle produit de la bureaucratie et des dysfonctionnements des appareils de l’Etat. 

 

5.-Liens entre la sphère informelle et la gouvernance

La construction d’un Etat de Droit est inséparable du développement des  libertés, seule garantie   de la transparence et ce  dans toutes les sphères de la vie politique, économique et sociale. C’est également une des conditions   de l’instauration d’une véritable économie productive reposant sur l’entreprise créatrice de richesses ce, afin de pouvoir favoriser une saine concurrence et attirer les flux d’investissement nécessaires pour une croissance durable, Il ne suffit pas de crier sur les toits que cette sphère ne paye pas les impôts. Il faut expliquer les raisons de son existence et de son extension et surtout les actions à mener pour son intégration, dans la mesure où la sphère informelle n’est pas le produit historique du hasard mais trouve son essence dans les dysfonctionnements de l’Etat et ce, à travers toutes les sphères, n’étant que la résultante du poids de la bureaucratie et du trop d’Etat au sein d’une économie et du blocage des réformes. Aussi, les obstacles ou la rapidité de la construction d’un Etat de droit et d’une véritable économie de marché concurrentielle qui fait que cette sphère diminue ou s’étend. Cela pose d’ailleurs la problématique de la construction de l’Etat et ses nouvelles missions en économie de marché. C’est faute d’une compréhension l’insérant dans le cadre de la dynamique sociale et historique que certains reposent leurs actions sur des mesures seulement pénales, la taxent de tous les maux, paradoxalement par ceux mêmes qui permettent son extension en freinant les réformes. Cela ne concerne pas uniquement les catégories économiques mais d’autres segments difficilement quantifiables. Ainsi, la rumeur est le système d’information informel par excellence, accentué en Algérie par la tradition de la voie orale, rumeur qui peut être destructrice mais n’étant que la traduction de la faiblesse de la démocratisation du système économique et politique, donnant d’ailleurs du pouvoir à ceux qui contrôlent l’information. L’utilisation de divers actes administratifs de l’Etat à des prix administrés du fait des relations de clientèles transitent également par ce marché grâce au poids de la bureaucratie qui trouve sa puissance par l’extension de cette sphère informelle. Cela pose d’ailleurs la problématique des subventions qui ne profitent pas toujours aux plus défavorisées (parce généralisables à toutes les couches) rendant opaques la gestion de certaines entreprises publiques et nécessitant à l’avenir que ces subventions soient prises en charge non plus par les entreprises mais budgétisées au niveau du parlement pour plus de transparence. 

En résumé, comme j’ai eu à l’affirmer dans plusieurs contributions depuis 15 années,  ( voir google),l’ intégration de la sphère informelle au sein de la sphère réelle ne peut relever d’un seul département ministériel devant impliquer la présidence, chefferie du gouvernement, les services de sécurité,  et  tous les  départements ministériels dont les finances, la justice, l’intérieur etc.) et ce avec la participation réelle des segments de la société civile. (1). 
Sans une vision stratégique d’ensemble de sortie  de la crise multidimensionnelle supposant une profonde mutation systémique embrassant le politique, l’économique et le social solidaires, la sphère informelle ne peut que s’étendre et toutes les mesures ponctuelles s’assimileront à du replâtrage. 

 

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