Le climat des affaires a figuré comme un des thèmes principaux de débat au long des trois jours qu’a duré la Conférence nationale que vient d’organiser le Ministère de l’industrie sur le développement économique et social. De nombreux intervenants s’en sont pris, à cette occasion, au classement du Doing Business.
Le Doing Business de la Banque Mondiale. Un instrument qui évalue et qui classe chaque pays en fonction d’une batterie de critères conçus pour mesurer la qualité et l’efficacité de ses réglementations économiques. Il est vrai que l’Algérie a encore dégringolé dans le classement, passant à une peu enviable 154ème place, à un moment où quelques fonctionnaires s’attendaient à la voir remonter. Cette façon de classer les économies des pays est certainement discutable. Les expériences historiques de chacun d’eux ne sont pas saisissables à travers la même lucarne ni ne sont forcément solubles dans des indicateurs universels. Un pays comme la Chine, qui a fait des bonds considérables et qui, l’espace de deux décennies, a donné naissance à la seconde puissance économique mondiale, ne figure toujours qu’à la 96ème place du Doing Business 2014.
Le système de régulation en question
Mais si cet outil, lancé en 2003 par la Banque mondiale, est contestable, il n’est pas non plus insignifiant. C’est que la compétitivité des entreprises, véritables lieux de création de richesses, tient tout autant à la qualité de leur management qu’à celle des systèmes de régulation des pays au sein desquels elles évoluent. Dans un monde de plus en plus interdépendant, où les échanges commerciaux croissent plus vite que la production et où l’information et les technologies circulent librement, une administration économique efficace et diligente est indispensable pour le développement et la croissance. En d’autres termes, on se consolerait facilement d’un mauvais classement international, si, comme la Chine ou le Brésil, notre pays était en mesure de réaliser des taux de croissance élevés, sur une longue période, et s’il entamait véritablement la diversification de son économie.
Les investissements industriels représentent moins de 1% du PIB
Nous n’en prenons pas encore le chemin. Si l’on s’en tient aux chiffres du site-web de l’ANDI ,qui s’appuient pour une fois sur des investissements réalisés et non pas de simples intentions d’investissements, le montant des investissements industriels réalisés sur la période 2002-2012 s’élève à un total de 1 570 Mds de DA, soit une moyenne annuelle de 143 Mds de DA. Cela représente donc bien moins de 1% du PIB, à comparer avec les investissements au titre du budget d’équipement qui se montent à une moyenne annuelle dépassant les 25% du PIB. Et il ne s’agit pas là d’un quelconque effet d’éviction puisque l’équipement public n’est pas en concurrence avec le financement bancaire et que les seuls dépôts auprès des banques primaires dépassent en 2012 les 6 600 Mds de DA. Mais comment expliquer que, des années durant, des montants aussi importants soient gelés dans nos banques au moment même où la demande nationale en biens industriels explosait et que, faute d’industries en mesure d’y répondre, le pays était contraint de recourir à la solution facile de l’importation ? Quand la question leur est posée, les banques répondent que c’est faute de projets viables. Les entreprises, quant à elles, évoquent toute une série de contraintes allant du foncier, aux procédures bancaires et aux lourdeurs bureaucratiques. A défaut d’avoir raison, chacun, dans son coin et selon sa propre logique, a ses raisons. C’est, en principe, le rôle des services de l’Etat de dénouer une telle situation mais, dans les faits, aucun d’eux n’en est véritablement responsable, ni comptable. On a bien tenté l’expérience du guichet unique pour donner un visage à l’administration et une adresse pour les investisseurs, mais celle-ci a fini, de guerre lasse, par être abandonnée. Le comble, c’est qu’au lieu de donner un coup de pied dans cette fourmilière, c’est un organe administratif supplémentaire, le Conseil national de l’investissement, qui a été superposé à cette machine bureaucratique.
Le doing business et les décisions simples de remise en ordre
Par ailleurs, le rapport annuel Doing Business de la Banque mondiale, ne peut non plus être balayé d’un revers de main. A titre d’exemple, voila plus de dix ans qu’il nous apprend, chiffres à la clef, que les taux de fret maritime à destination de notre pays coûtent en moyenne 50% plus cher que ceux appliqués à destination des ports marocains ou tunisiens. Ce sont ainsi des montants en devises considérables qui sont transférés indûment à l’étranger, sans que personne jamais ne s’en inquiète. Et puis, sortir simplement une marchandise des ports algériens prend en moyenne plus de 30 jours, là où, dans les ports modernes à travers le monde, le temps de transit ne dépasse pas 48 heures. Les mesures à prendre pour diversifier l’économie nationale sont simples et bien connues. Il n’y a pas de doute que quelques décisions très simples de remise en ordre de la part de nos administrations économiques, seraient un message cent fois plus fort en ce sens que toutes ces conférences bruyantes, coûteuses et peu efficaces.