Le gaz naturel de Gazprom ne transite plus vers l’Europe par l’Ukraine depuis le 1e janvier dernier. Le contrat de cinq ans qui liait depuis 2019 le géant russe du gaz et la compagnie énergétique ukrainienne Naftogaz a expiré après avoir été maintenu durant les 34 mois de guerre enclenchés par l’invasion de l’Ukraine par son voisin russe.
La disparition de 14 milliards de m3 de gaz naturel du marché d’Europe centrale en 2025 interpelle l’ensemble des fournisseurs classiques en gaz naturel de l’Europe, parmi eux Sonatrach, troisième fournisseur en Europe depuis que la part du gaz russe est tombée de 150 milliards de m3 en 2021 à moins de 40 milliards de m3 au début de 2024.
L’effondrement des importations de gaz russe en Europe depuis février 2022 devrait continuer de profiter essentiellement aux mêmes acteurs du gaz en 2025 après cette nouvelle contraction des exportations russes depuis le 1ᵉʳ janvier. Ce sont les États-Unis qui ont le plus supplanté Gazprom en multipliant par plus de deux leurs exportations vers l’Europe depuis le début de la guerre en Ukraine, suivis de la Norvège et du Qatar acteur majeur du GNL.
La nouvelle coupure des livraisons russes, après celle, plus importante, de North Stream en 2022 suite à un probable sabotage américain en mer Baltique, ne devrait offrir que de modestes opportunités à Sonatrach pour élargir ses parts de marché sur le Vieux Continent. La faute à la fois à une faible élasticité de l’offre additionnelle disponible à l’exportation et à un accès par gazoduc plus avantageux par la voie nord-européenne pour cette partie de l’Europe.
Un pied en République Tchèque
L’Algérie a exporté, en 2023, 52 milliards de m3 de gaz dans le monde, dont 18 milliards de m3 de gaz naturel liquéfié. Sonatrach a contenu la régression de ses exportations de la décennie précédente grâce à l’arrivée progressive de la production des champs gaziers du sud-ouest (Reggane et Timimoun) à partir de 2021, mais doit continuer à faire face à une croissance rapide de la consommation domestique de gaz naturel.
La compagnie énergétique algérienne a toutefois pris pied sur ce marché de l’Europe centrale en deux temps. D’abord en devenant fournisseur de la Slovénie, ancienne république de la fédération Yougoslave à partir de l’Italie, client historique de l’Algérie. Sonatrach livre depuis novembre 2024, 300 millions de m3 de gaz à son nouveau partenaire frontalier de l’Italie. Elle a ensuite conclu un accord pour exporter, toujours par la voie de l’extension nord du réseau italien, du gaz vers la République tchèque en prévision de la coupure des approvisionnements russes via l’Ukraine et la Slovaquie.
Les premiers volumes de gaz algérien sont arrivés en octobre 2024 en république tchèque. Ils demeurent modestes, 2% de la consommation du pays en gaz naturel, « de quoi alimenter 100 000 ménages » selon le porte-parole de la CEZ, l’opérateur énergétique tchèque.
Les gouvernements slovaque et hongrois sont les plus exposés à la rupture des livraisons de Gazprom et une poursuite de l’infiltration du gaz algérien en Europe centrale n’est pas à exclure dans le proche avenir pour des volumes d’appoint assurant une plus grande diversité des approvisionnements de ces pays, clients traditionnels de la Russie.
Par Samy Injar